Électricité / Gaz : 3 fournisseurs sur 4 peuvent demander un dépôt de garantie (pouvant aller jusqu'à 600€)

Électricité / Gaz : 3 fournisseurs sur 4 peuvent demander un dépôt de garantie (pouvant aller jusqu'à 600€)

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Ce n'est plus une exception, mais une règle quasi générale : 3 fournisseurs d'électricité et de gaz sur 4 se réservent aujourd'hui le droit d'exiger un dépôt de garantie à la souscription. Cette caution, qui peut alourdir votre budget jusqu'à 600 € avant même d'avoir consommé le moindre kilowattheure, est devenue la nouvelle norme. Face à cette pratique en pleine expansion, notre enquête exclusive, basée sur l'étude de près de 250 contrats, révèle l'ampleur du phénomène.

Pourquoi cette méfiance ? La flambée des impayés comme toile de fond

Pour comprendre l'émergence de ces dépôts de garantie, il faut rembobiner un peu. La crise énergétique de ces dernières années a laissé des traces profondes dans le portefeuille des Français. L'envolée des prix, même si elle connaît des accalmies, a mis de nombreux ménages en difficulté.

En 2024, selon le Médiateur national de l'énergie, plus de 1,2 million d'interventions pour impayés ont eu lieu, un bond de 24 % en une seule année. Depuis 2019, la hausse atteint un niveau vertigineux de 85 %.

Évolutions des interventions pour impayés depuis 2019

Source : Médiateur de l'Énergie - Graphique : Selectra

Face à ces difficultés pour payer, les fournisseurs d'énergie se retrouvent en première ligne. Chaque facture non réglée représente une perte sèche qui, multipliée par des milliers de clients, pèse lourdement sur leur équilibre financier. Selon les estimations de l’Association de Régulation des Paiements dans l’Energie (ARPE), ce fléau représente un coût entre 20 et 45 € HT par an pour chaque consommateur, y compris pour ceux qui paient leurs factures en temps et en heure.

C'est dans ce climat tendu que le dépôt de garantie est réapparu, non plus comme une exception, mais comme un outil de gestion du risque de plus en plus courant.

ARPE : le nouveau registre qui peut déclencher la demande de garantie

Pour organiser leur riposte face aux mauvais payeurs, plusieurs fournisseurs se sont regroupés au sein d'une structure discrète mais efficace : l'ARPE. Créée en juillet 2023, cette association gère un registre commun des clients ayant des incidents de paiement répétés. L'objectif est de permettre à un fournisseur de vérifier le passif d'un nouveau client avant de s'engager.

Concrètement, si vous avez une dette supérieure à 50 € qui reste impayée 30 jours après un second courrier de relance, votre fournisseur peut vous inscrire sur cette liste, après vous en avoir informé.

Dès lors, si vous souhaitez souscrire un contrat ailleurs, le nouveau fournisseur, s'il est membre de l'ARPE, consultera ce registre. Une inscription peut alors directement motiver une demande de dépôt de garantie, voire, dans certains cas que nous étudions, un refus de souscription.

Le registre ARPE en bref

Ce fichier n'inclut pas les consommateurs considérés en situation de précarité, comme les bénéficiaires du chèque énergie ou du Fonds de Solidarité Logement (FSL). Son but est de cibler les comportements jugés frauduleux ou les défauts de paiement répétés. Pour être retiré du registre, il n'y a qu'une seule solution : régler l'intégralité de sa dette. La suppression est alors effectuée sous deux jours.

On ne coupe pas l'électricité ou le gaz du jour au lendemain en France. Avant d'en arriver à une coupure ou à une réduction de puissance, un fournisseur doit respecter une procédure longue et strictement réglementée, faite de multiples relances et de délais incompressibles. Pour un client standard, ce processus s'étend sur près de deux mois. Pour un ménage bénéficiaire du chèque énergie, cette protection est encore renforcée, avec des délais qui peuvent dépasser les 100 jours avant qu'une coupure effective ne puisse avoir lieu. 

délai en cas d'impayé d'une facture d'électricité sans cheque énergie

S'ajoute à cela le dispositif incontournable de la trêve hivernale. Du 1er novembre au 31 mars, toute coupure d'énergie est interdite. Concrètement, pour un impayé survenant à l'automne, un fournisseur peut se retrouver à fournir de l'énergie sans être payé pendant près de six mois, sans aucun recours possible avant le printemps suivant.

Ce cadre, bien que nécessaire, crée un risque financier considérable pour les fournisseurs. Chaque procédure de recouvrement infructueuse représente une dette que le fournisseur aura beaucoup de mal à récupérer. Ce sont ces pertes qui, au final, sont mutualisées et répercutées sur les factures de l'ensemble des clients, y compris ceux qui paient en temps et en heure. 

Face à un système où le recouvrement est si long et incertain, les fournisseurs cherchent désormais à se prémunir en amont, en sélectionnant plus rigoureusement leurs clients via des outils comme le registre ARPE ou le dépôt de garantie.

Quels fournisseurs demandent un dépôt de garantie, et pour quel montant ?

L'analyse exhaustive effectuée par Selectra des conditions de vente et des fiches descriptives de l'ensemble des offres disponibles sur le marché, soit près de 250 documents, révèle une grande disparité chez les fournisseurs dans les pratiques adoptées.

Les fournisseurs n'ont pas une, mais deux approches principales pour se protéger. La première, de plus en plus courante, consiste à calculer le dépôt de garantie sur la base de votre consommation future estimée. La seconde, plus directe, est d'appliquer un montant forfaitaire fixe.

Le calcul basé sur vos futurs mois de consommation : une caution sur mesure

Plusieurs fournisseurs ont opté pour une méthode personnalisée, où le montant du dépôt est directement lié à votre profil de consommation.

Un premier groupe de fournisseurs, incluant Alpiq, Primeo Energie et Yéli by GEG, base son calcul sur l'équivalent de trois mois de facturation estimée. Dans ce cadre, Alpiq applique un plafond de 600 € (abonnement inclus), tandis que Yéli a fixé le sien à 300 €.

Extrait des conditions générales de vente du fournisseur Alpiq demandant un dépôt de garantie à la souscription
Extrait des conditions générales de vente du fournisseur Alpiq demandant un dépôt de garantie à la souscription

Une approche similaire est adoptée par Ekwateur et, par extension, Butagaz (qui vend de l'électricité en partenariat avec Ekwateur), qui se basent sur la consommation des mois d'hiver (décembre, janvier, février), en appliquant un montant plancher de 300 € HT.

D'autres fournisseurs modulent cette méthode : Alterna Énergie se limite à un maximum de deux mois de facturation, Dyneff ajuste son calcul entre l'électricité (jusqu'à trois mois) et le gaz (deux mois), et Plenitude opte pour un montant "proportionné" à la facture annuelle estimée.

Les dépôts à montant fixe : des seuils clairs mais élevés

D'autres acteurs préfèrent la simplicité d'un montant forfaitaire, ou du moins d'un seuil minimum. Le plus exigeant est Ohm Énergie, qui peut demander jusqu'à 500 €. Ce qui frappe chez ce fournisseur, au-delà de la somme, ce sont ses conditions d'application particulièrement larges, qui lui laissent une grande marge d'appréciation pour évaluer un "risque de non-paiement".

Extrait des conditions générales de vente du fournisseur Ohm Energie fixant les conditions pour demander un dépôt de garantie
Extrait des conditions générales de vente du fournisseur Ohm Energie demandant un dépôt de garantie à la souscription

Le cas de la bellenergie est particulier : le fournisseur compare deux montants, un forfait de 300 € et l'équivalent de deux mois de votre consommation, et vous demandera systématiquement le plus élevé des deux. 

Viennent ensuite les fournisseurs TotalEnergies, Octopus Energy et Papernest Énergie qui se sont alignés sur un seuil de 300 €. Enfin, un dernier palier a été fixé à 250 € par des acteurs comme Vattenfall et Mint Énergie

Panorama des fournisseurs d'énergie exigeant un dépôt de garantie en novembre 2025
FournisseurMontant du dépôtMéthode de calcul / Conditions principales
AlpiqJusqu'à 600 €Basé sur 3 mois de facturation estimée.
Ohm ÉnergieJusqu'à 500 €Montant forfaitaire, conditions larges basées sur l'estimation du risque.
La bellenergieMinimum 300 €Montant de 300 € ou 2 mois de facturation (le plus élevé des deux).
Ekwateur / ButagazMinimum 300 € HTBasé sur la consommation des mois d'hiver (déc./jan./fév.).
TotalEnergies300 €Montant forfaitaire, déclenché par des incidents de paiement répétés.
Yéli by GEGJusqu'à 300 €Basé sur 3 mois de facturation estimée, avec un plafond de 300 €.
Papernest ÉnergieMaximum 300 €Montant forfaitaire, lié à des incidents passés ou une inscription au registre des impayés.
Primeo EnergieVariableBasé sur 3 mois de facturation estimée.
Octopus Energy300 €Montant forfaitaire en cas d’incidents de paiement antérieurs.
Vattenfall250 €Montant forfaitaire, lié à des incidents de paiement passés ou actuels.
Mint Énergie250 €Montant forfaitaire, selon la politique de gestion de risques.
DyneffVariableBasé sur 2 mois (gaz) ou jusqu'à 3 mois (électricité) de consommation.
Alterna ÉnergieVariableBasé sur un maximum de 2 mois de facturation estimée.
GediaVariableBasé sur 1 mois de conso; déclenché si le client refuse le prélèvement automatique.
PlenitudeVariableBasé sur 2 mois de facturation estimée.
VialisNon spécifiéDéclenché si le client refuse le prélèvement automatique.
EnargiaNon spécifiéDéclenché en cas d'incident de paiement.

Les cas particuliers : des conditions qui surprennent

Au-delà des montants, ce sont parfois les conditions qui interpellent. Plusieurs fournisseurs comme Alterna Énergie, Vialis ou encore Gedia peuvent demander un dépôt de garantie si le client refuse le prélèvement automatique, jugé plus sécurisé. C'est une manière d'inciter fortement à choisir ce mode de paiement.

Même chose du côté de Dyneff. Uniquement pour son offre de gaz, le fournisseur se réserve le droit d'exiger un dépôt de garantie pour les clients payant par chèque ou par mandat cash. Une clause de prudence qui cible une catégorie d'usagers n'optant pas pour le prélèvement automatique.

Le mode d'emploi du dépôt de garantie : quand, comment et pour combien de temps ?

Attention, un dépôt de garantie ne se demande pas qu'à la souscription. Plusieurs fournisseurs, comme Mint Énergie, Ohm Énergie ou Papernest Énergie, peuvent l'exiger en cours de contrat, généralement après un premier incident de paiement. Une fois la demande formulée, le délai pour régler est court : vous disposez le plus souvent de 10 à 15 jours pour verser la somme, sous peine de voir votre contrat résilié.

Concernant le mode de paiement, si la plupart sont flexibles, Ekwateur (et par extension Butagaz) se distingue en imposant un règlement par carte bancaire.

La règle générale est une restitution à la fin du contrat, une fois toutes les factures réglées. Une poignée de fournisseurs se montrent plus souples et permettent de récupérer votre argent plus tôt :

  • Wekiwi : le plus rapide, avec un remboursement possible après seulement six mois sans incident.
  • Ohm Énergie, Papernest Énergie, la bellenergie et Mint Énergie : ils proposent tous une restitution sur demande, après 12 mois consécutifs sans défaut de paiement.

Versements initiaux : quand le paiement à la souscription est la règle

Au-delà des dépôts de garantie conditionnels, il existe une autre catégorie de versement initial : celui qui est systématique. Ici, la demande n'est pas liée à un risque que vous représentez, mais elle fait partie intégrante du contrat pour tous les nouveaux clients.

C'est le cas de Wekiwi, qui demande bien un dépôt de garantie (uniquement pour ses offres au réel), équivalent à un mois de consommation, mais le rembourse après six mois sans incident. Un autre exemple est celui d'Elecocité, qui a opté pour une "avance sur consommation" forfaitaire de 100€ à la souscription, tout en précisant ne pas demander de dépôt de garantie.

Le cas UEM : la subtilité entre "avance sur consommation" et "dépôt de garantie"

Le cas de l'Usine d'Électricité de Metz (UEM) est particulièrement instructif. Pour son offre Tarif Bleu, une avance sur consommation est systématiquement demandée à la souscription et n'est restituée qu'à la fin du contrat.

Extrait des conditions générales de vente de l'offre Tarif Bleu d'UEM demandant une avance sur consommation
Extrait des conditions générales de vente de l'offre Tarif Bleu d'UEM

Pourtant, la fiche descriptive de cette même offre affirme qu'il "n'existe pas de dépôt de garantie".

Extrait de la fiche descriptive de l'offre Tarif Bleu d'UEM
Extrait de la fiche descriptive de l'offre Tarif Bleu d'UEM

Techniquement, les deux affirmations sont correctes : une "avance" est un prépaiement, un "dépôt" est une caution. Mais pour le portefeuille du client au moment de la souscription, la différence est quasi inexistante : une somme doit être versée avant de consommer. Pour ajouter à la complexité, le fournisseur clarifie sa politique pour son offre de gaz Agilo, pour laquelle il ne demande ni avance, ni dépôt.

L'acompte de souscription, une autre forme de paiement initial

Une dernière pratique à ne pas confondre est celle de l'acompte de souscription. Il s'agit d'un petit paiement effectué au moment de la signature du contrat, qui est immédiatement déduit de la première facture.

Chez Primeo Energie, par exemple, un acompte forfaitaire de 10 € est requis lors de la souscription. Elmy adopte une approche légèrement différente : le jour de la souscription, un paiement par carte bancaire est demandé pour couvrir la consommation estimée des premiers jours du contrat.

Dans les deux cas, il ne s'agit pas d'une garantie conservée par le fournisseur, mais bien d'un premier versement qui solde une partie de la consommation à venir.

Certains fournisseurs résistent à la tendance

Dans un marché où la demande d'un dépôt de garantie semble devenir la norme, une minorité de fournisseurs, et non des moindres, choisit encore de faire le pari de la confiance en n'imposant pas cette contrainte financière à leurs clients particuliers.

Parmi eux, certains affichent leur politique de manière totalement transparente. C'est le cas d'ÉS Énergies Strasbourg, qui indique noir sur blanc dans ses conditions de vente qu'il ne demande pas de dépôt de garantie ni aucune avance sur consommation.

Pour d'autres acteurs majeurs du marché, c'est l'absence totale d'une telle clause dans leurs contrats qui confirme cette pratique. C'est notamment le cas pour EDF et ENGIE, ainsi que pour des fournisseurs comme Enercoop, Ilek, Gaz de Bordeaux, Happ-e ou encore Urban Solar Energy.

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