Assurance habitation : Lemonade pourra-t-elle à conquérir le marché français ?

Assurance habitation : Lemonade pourra-t-elle à conquérir le marché français ?

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Fin 2020, l’assurtech étasunienne Lemonade a fait son arrivée sur le marché français de l’assurance habitation. Une actualité alors largement commentée, car significative pour ce secteur en pleine métamorphose. Quelles sont les ambitions de Lemonade ? Y a-t-il des limites à son modèle  ? Selectra fait le point.

  • En bref : L’aventure française de Lemonade ne fait que commencer
  • L’assurtech Lemonade a été lancée en 2016 aux États-Unis ;
  • Sa spécialité : l’assurance habitation 100 % digitale pour les locataires et les propriétaires ;
  • Son modèle se base sur l’intelligence artificielle et l’économie comportementale ;
  • En juillet 2020, l’assurtech est entrée en Bourse ;
  • Après une commercialisation de ses produits en Allemagne et aux Pays-Bas, Lemonade a décidé de se lancer en France en décembre dernier ;
  • Pour l’instant, seule son offre d’assurance habitation pour locataires est disponible ;
  • Ses prix ultracompétitifs, tout en œuvrant pour plus de transparence et de flexibilité dans la gestion des offres assurantielles, questionnent de nombreux observateurs et acteurs du marché quant à la viabilité de son modèle sur la durée ;
  • Certains anticipent une baisse qualitative des offres elles-mêmes, alors que d’autres évoquent une augmentation significative des tarifs sur le long terme ;
  • À ce jour, l’on dispose de très peu d’informations officielles de la part de Lemonade concernant ses chiffres.

Lemonade : une assurtech arrivant tout droit des États-Unis

Le marché de l’assurance se métamorphose, et ses nouveaux acteurs se modernisent. Depuis 2016, Lemonade propose des assurances habitation sur le marché étasunien, à destination des locataires et des propriétaires. Son offre s’est par ailleurs agrandie en 2020, avec une couverture pour les animaux de compagnie.

Depuis ses débuts, Lemonade fait trembler le secteur de l’assurance, notamment en raison de l’attractivité de ses offres. Mais surtout en raison de son modèle basé sur l’intelligence artificielle – ou IA – et l’économie comportementale. L’assurtech sait qu’il est crucial de repenser le rapport des consommateurs à l’assurance, en imaginant des offres flexibles, optimisées grâce aux avantages de l’innovation technologique.

Peu à peu, Lemonade a commencé à investir le marché européen avec son assurance habitation, en Allemagne puis aux Pays-Bas. Et en décembre 2020, l’assurtech est arrivée en France, avec une offre 100 % digitale disponible à partir de 4 euros par mois pour les locataires. Comme toujours, celle-ci fonctionne dans le cadre du programme annuel « Giveback » de Lemonade. En bref : Lemonade pratique des tarifs fixes pour ses opérations et, lorsque l’assuré souscrit à une de ses offres, il a la possibilité de choisir une organisation à but non lucratif. Chaque année, une partie des fonds non utilisés de la cagnotte de cotisations est dédiée spécifiquement à ce geste financier.

lemonade assurance
© Lemonade

Sur un marché de l’assurance français où les acteurs traditionnels dominent encore, l’arrivée d’une assurtech comme Lemondade a de quoi inquiéter certains. Depuis plusieurs années, la métamorphose est en cours, et les assureurs réticents à bouleverser leur modèle pourraient bien rester derrière. Coverd, Luko, Alan, Lovys, Otherwise, Seyna : voilà autant de noms à retenir pour le futur du secteur assurantiel.

En juillet 2020, l’entrée en Bourse de Lemonade avait largement été reprise dans la presse. Après seulement quatre ans d’existence, l’action de l’assurtech avait augmenté de 140 % lors de son premier jour de cotation. L’an dernier, Lemonade était valorisée à 4,7 milliards d’euros.

Lemonade : l’assurtech américaine qui fait trembler le marché français

Les enjeux des nouveaux acteurs sont clairs : plus de transparence, de flexibilité et de simplicité, grâce à un modèle intégrant l’innovation technologique et le digital au cœur de ses offres. Le succès en France de l’assurtech Luko est la preuve très claire que ces assureurs nouvelle génération ont une place sur le marché. Désormais, l’entreprise française fondée en 2018 avance couvrir quelque 100 000 assurés, et sa démarche est très similaire à celle de Lemonade – cela fait de l’Américaine une concurrente directe.

Dans une interview donnée au Journal du Net en décembre dernier, Daniel Schreiber, créateur de Lemonade, expliquait ainsi que « depuis la création de Lemonade, [leur] but était de [se] lancer en France ». Il poursuivait : « Il y a beaucoup d’opportunités dans ce pays. Tout d’abord parce que les Français doivent s’assurer obligatoirement dans certaines situations et ensuite parce qu’il y a une forte demande pour le digital. Nous avons une grande ambition paneuropéenne ». Concernant l’offre même de Lemonade, le refrain est le même : digitale, sans engagement, personnalisable. « Une fois que vous avez téléchargé l’application, vous répondez à quelques questions pour obtenir un devis, indique-t-il. Vous pouvez ensuite modifier vos garanties et ajouter des objets à votre couverture d’assurance. »

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© Lemonade

Mais alors, à qui se destinent les offres commerciales de Lemonade ? Quelle stratégie adopte cette assurtech vis-à-vis des consommateurs. Monsieur Schreiber explique ainsi qu’en 2020, 75 % de leurs clients avaient moins de 35 ans. Cependant, la cible n’est pas forcément les jeunes, mais bien « les gens [qui] sont à l’aise avec les technologies ». Bien que Lemonade ne souhaite pas se limiter à une tranche d’âge, tout miser sur une offre uniquement accessible par des consommateurs à l’aise avec la technologie suppose une exclusion non négligeable. En 2021 encore, tout le monde n’est pas familier avec les plates-formes en ligne ou les applications mobiles, ou même la dématérialisation des services.

Enfin, le système du Giveback, aussi pratiqué par Luko, est par ailleurs susceptible d’attirer un certain type de publics, soucieux des dimensions éthiques des entreprises qui leur vendent des produits. Il y a donc un choix et une stratégie consciente de la part de l’entreprise, avec un modèle précis, ne s’éparpillant pas afin d’être rentable et qualitatif.

Quelques mois après l’arrivée de l’assurtech sur le marché français, il est impossible de dire si celle-ci pourra remplir ses objectifs. En effet, l’entreprise étant cotée, elle se réserve le droit de limiter les informations qu’elle divulgue publiquement. Le succès des néoassureurs et de nouveaux venus comme Lemonade sur le marché français doit être observé et commenté. Comme le faisait remarquer Christophe Dandois, fondateur de Leocare, à l’Argus de l’assurance, en France, « l’assurance était l’un des derniers secteurs à ne pas avoir connu sa transformation numérique ». Un sujet déjà longuement exploré sur Selectra, lequel a par ailleurs été remis au gout du jour en raison du Covid-19 et d’une potentielle accélération du processus de digitalisation pour le secteur assurantiel.

« La question est : est-ce que ces assurances seront durables ? », explique Julien Fillaud, directeur général du comparateur Hyperassur, à Capital. Il s’interroge : « Lorsqu’on regarde les tarifs de Lemonade, on a de quoi avoir des doutes. Je souhaite qu’ils réussissent, car cela voudrait dire que le marché dispose de marges suffisantes pour faire baisser les prix et en faire profiter le consommateur ». De nombreux observateurs semblent contester la viabilité du modèle économique de l’assureur étasunien à l’heure actuelle, sans qu’à terme l’on se retrouve avec une assurance lowcost, certes abordable, mais moins qualitative, sacrifiant bien souvent la qualité de service. Ou bien, en définitive, que Lemonade finisse par augmenter significativement ses tarifs. Il est complexe, à ce jour, de prendre du recul. Mais surtout, sans davantage de données provenant du concerné, il est difficile de leur donner tort, etc. ou raison.

Les prix de Lemonade sont très compétitifs et les couvertures sont très intéressantes. Cependant, il sera important pour l’assuré de prendre connaissance des exclusions de garantie, lesquelles pourraient être plus nombreuses que sur certains contrats similaires et plus onéreux, estime Boursorama. Cependant, à terme, il n’y a souvent pas de grosses différences entre les offres des acteurs traditionnels et des nouveaux, celles-ci sont tout simplement plus attractives.

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