Les propositions de Macron et Le Pen pour l'énergie et l'environnement
Ce dimanche, les Français sont appelés à voter pour choisir leur prochain président de la République. L'occasion pour Selectra de passer en revue les positions d'Emmanuel Macron et de Marine Le Pen sur l'énergie et l'environnement. Voici les actions et chantiers que les candidats s'engagent à mettre en œuvre au cours du prochain quinquennat pour la prochaine décennie, s'ils sont élus.
Nucléaire et transition énergétique
Si les deux candidats ont compris que la transition énergétique était nécessaire et intégré qu'il s'agissait d'un levier pour l'économie, leurs avis divergent sur son application concrète et sur l'abandon du nucléaire.
Quel mix énergétique pour la France ?
M. Macron s'inscrit dans la lignée de la loi de transition énergétique votée en août 2015, lorsqu'il était au gouvernement. Ainsi souhaite-t-il abaisser de 75% à 50% la part du nucléaire dans la production électrique française d'ici à 2025 et fermer les dernières centrales à charbon de France. Pour cela, il faudrait non seulement doubler la capacité des parcs solaires et éoliens sur la période, mais fermer en parallèle Fessenheim et 18 autres centrales. Pour trancher, il renforcerait les moyens de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) qui, sur la base des visites décennales programmées à partir de 2018 pourrait décider du prolongement ou non de la durée de vie des centrales. Au final, ce sont 15 milliards d'euros d'investissements qui seraient dédiés à la transition énergétique au cours du quinquennat.
Mme Le Pen défend l'idée d'une « écologie patriote », partant de l'idée de « développer massivement les renouvelables » : solaire, biogaz et bois principalement. Cette industrie permet de créer et pérenniser des milliers d'emplois non délocalisables, et d'autant plus en appliquant des mesures de protectionnisme et de patriotisme économique. Dans le même temps, elle instaurerait un moratoire immédiat sur l'éolien terrestre comme maritime, pour préserver les paysages ruraux et certaines espèces d'oiseaux mises en danger. Les professionnels notent toutefois qu'il s'agit d'une des filières renouvelable les moins chères et les plus matures. Sur le nucléaire, Le Pen reviendrait tout d'abord sur la fermeture de Fessenheim associée par le gouvernement à la livraison de l'EPR de Flamanville, a priori en 2019. Ensuite, elle s'engage à « maintenir, moderniser et sécuriser la filière nucléaire française », en engageant le plan de Grand carénage prévu par EDF pour prolonger la durée de vie des centrales de 20 à 30 ans.
Si Macron valide le projet contesté d'enfouissement des déchets nucléaires à Bure, la candidate Frontiste préférerait une répartition de ces déchets entre régions - ce qui ne résout pas le problème. Pour ce qui est de la question du pétrole et du gaz de schiste, ils souhaitent tous les deux maintenir l'interdiction d'exploiter les hydrocarbures non-conventionnels « tant que des conditions satisfaisantes en matière d'environnement, de sécurité et de santé ne seront pas réunies ».
Quelle ambition pour le logement ?
Si Marine Le Pen ne fixe aucun objectif, elle dit vouloir faire de l'isolation de l'habitat « une priorité budgétaire », notamment grâce à des prêts à taux zéro souscrits auprès de la Banque de France. M. Macron souhaite des audits énergétiques gratuits pour les ménages en précarité énergétique, à partir desquels un plan de rénovation augmenté à 1 million de logements serait enclenché. Aussi, le crédit d'impôt pour la rénovation des logements serait révisé pour permettre un versement immédiat de plutôt que différé. Enfin pour les bâtiments publics, un plan de rénovation assorti d'une enveloppe de 4 milliards d'euros est également au programme.
Ecologie et lutte contre la pollution
Les deux candidats à la présidence de la République ne sont pas les plus ambitieux en matière d'écologie. C'est pourquoi ils ont été poussés au cours de leur campagne à intégrer les thématiques environnementales dans leurs programmes repsectifs.
Une agriculture tournée vers le bio
La candidate du Front National défend la paysannerie et prône la fin de l'agriculture intensive. Elle propose de soutenir les agriculteurs qui respectent l'environnement, notamment en taxant moins les produits bio, et promet de ne pas ratifier les traités de libre-échange tels que le CETA avec le Canada. A ce sujet, le fondateur d'En Marche a récemment infléchi sa position : « Je nommerai une commission d'experts, de scientifiques irréprochables, dénués de tout lien avec les lobbies comme les industriels, pour dire ce qu'il en est exactement des conséquences environnementales, sur la santé, de cet accord » et ainsi prendre une décision en toute connaissance de cause et sans influence. Avec lui, les cantines scolaires devront proposer au moins 50% de produits bio ou locaux d'ici le terme de son mandat. Comme Mme Le Pen, il souhaite interdire les pesticides et perturbateurs endocriniens ; et s'oppose aux OGM, sauf dans le cadre de la recherche.
Pollution de l'air
Emmanuel Macron entend renforcer les normes anti-pollution en vigueur, au niveau européen : « il n’est pas acceptable de ne pas respecter les normes communautaires et les recommandations de l’OMS pour la qualité de l’air d’ici 2025 ». Pour réduire la pollution liée aux particules fines, il propose d'aligner progressivement la fiscalité du diesel et celle de l'essence ainsi que des incitations financières pour le remplacement des véhicules antérieurs à 2001, la conversion au diesel et l'achat d'un véhicule électrique.
Marine Le Pen est opposée à toute taxation du diesel à cause de l'impact que cela aurait sur le budget des ménages à faible revenu. Outre le développement de la filière hydrogène pour réduire l'indépendance de la France au pétrole, aucun objectif n'est fixé dans son programme pour l'amélioration de la qualité de l'air. De son côté, M. Macron a agrémenté son projet écologique au cours de la campagne et vise « 100% de plastique recyclé sur tout le territoire » d’ici 2025, grâce à la modernisation des centres de tri par l’augmentation progressive de la taxe sur l’incinération et l’enfouissement. Il dit vouloir amplifier la lutte contre l’obsolescence programmée en renforçant l’affichage de la durée de vie des appareils électroménagers, même si cette mesure n'est en réalité pas très contraignante pour les industriels.
Politique de l'énergie
Les propositions de l'ancien Ministre de l'Economie sur le diesel et les normes anti-pollution feront probablement augmenter les prix de l'énergie et certains biens énergivores. Il fixe l'objectif que la taxe carbone atteigne 100 euros la tonne en 2030 en Europe, contre à peine 5 € aujourd'hui. En 2013, le Front National qualifiait la taxe carbone d'« inacceptable mesure fiscale déguisée en vert ». Depuis rien. Sa candidate s'est engagée à faire baisser les tarifs réglementés de l'électricité et du gaz de 5% pour améliorer le pouvoir d'achat des ménages. Toutefois, elle souhaite une hausse de l'ARENH, le tarif auquel les fournisseurs alternatifs achètent l'électricité nucléaire auprès d'EDF, ce qui est en contradiction avec une baisse du prix pour les consommateurs.
M. Macron souhaite démarrer la dernière étape de la libéralisation du secteur de l'énergie avec la création d'un véritable marché européen unique de l'énergie. Parallèlement, il préconise de « focaliser les efforts de recherche, de développement et d'investissements des opérateurs sur le stockage de l'énergie et les réseaux intelligents ». A noter enfin qu'il souhaite lancer un plan anti-gaspillage pour inciter les régions et accompagner les PME dans la diminution de leur consommation d'énergie, et donc de leur empreinte environnementale.
Climat et environnement
La mise en œuvre de l'Accord de Paris est un engagement du candidat Macron. Face aux déclarations du président américain Donald Trump et pour l'inciter à ne pas sortir de cet accord, M. Macron a soumis l'idée de « mettre en place une coalition d’acteurs étatiques et non-étatiques ». Il souhaite aussi poursuivre l'idée d’une Organisation mondiale de l’environnement et négocier un Pacte universel sur l’environnement avec les Etats et les ONG, auprès des Nations Unies, « qui comporterait des principes utilisables et invocables en droit ». Enfin, il envisagerait d’organiser une conférence mondiale sur la biodiversité dans un territoire d’outre-mer.
Mme Le Pen a quant à elle voté contre la ratification de l'Accord au Parlement européen. Aucune mention du « climat » n'est faite dans son programme.