Le chiffre qui alarme : une hausse de 10% sur l'électricité = 1,5% d'emplois en moins

Le chiffre qui alarme : une hausse de 10% sur l'électricité = 1,5% d'emplois en moins

Publié le
min de lecture

Votre facture d'électricité n'impacte pas seulement votre portefeuille, elle menace directement l'emploi en Europe. C'est la conclusion choc d'un nouveau rapport publié par Eurochambres, l'association des chambres de commerce et d'industrie européennes. Pour la première fois, une étude chiffre précisément le lien dévastateur entre la hausse des prix de l'énergie et la destruction de postes : une augmentation de 10% de votre facture d'électricité se traduit par la perte de 1,5% des emplois dans les secteurs les plus touchés.

Un lien direct entre prix de l'électricité et emploi

Le rapport, intitulé "Prix de l'électricité et emploi", a analysé les données de 28 pays européens sur une période allant de 2008 à 2021, en se concentrant sur 10 secteurs économiques clés. Les résultats sont sans appel : il existe une relation négative et statistiquement significative entre le coût de l'électricité et le niveau d'emploi.

Une facture qui détruit des emplois : le chiffre qui alarme

La conclusion de l'étude est un véritable signal d'alarme pour l'économie européenne : une hausse de 10 % sur la facture d'électricité se traduit par une baisse de 1 % à 1,5 % de l'emploi. L'impact n'est pas toujours immédiat, ce qui peut masquer sa gravité à court terme.

En effet, le rapport note que l'effet est encore plus prononcé lorsqu'on l'observe avec un décalage de deux ans. Cette inertie s'explique par la stratégie des entreprises : face à un choc sur les prix de l'énergie, elles commencent par réduire leurs marges et retarder leurs investissements. Si les prix élevés persistent, la variable d'ajustement devient inévitablement la masse salariale, d'abord par un gel des embauches, puis par des suppressions de postes.

Industrie, transport, commerce : les secteurs en première ligne

Sans surprise, l'impact est particulièrement violent dans les secteurs les plus "électro-intensifs", où l'énergie représente une part incompressible des coûts de production. Le rapport identifie trois secteurs principaux comme étant les plus vulnérables :

  • L'industrie manufacturière : des usines automobiles aux industries chimiques, ce secteur repose sur des machines gourmandes en électricité. Une hausse des prix frappe directement leur compétitivité face aux concurrents internationaux.
  • Le transport et la logistique : le fonctionnement des entrepôts, des chaînes du froid et des infrastructures de transport est un poste de coût énergétique majeur, rendant le secteur extrêmement sensible aux variations de prix.
  • Le commerce de détail : moins souvent cité, ce secteur est pourtant très exposé. L'éclairage, la climatisation des grandes surfaces et surtout l'alimentation des systèmes de réfrigération dans l'agroalimentaire représentent des charges fixes colossales.

Pourquoi l'électricité européenne est-elle si chère ?

La vulnérabilité de l'emploi européen s'explique par un handicap majeur : le prix de l'électricité y est structurellement plus élevé que chez ses concurrents mondiaux. Cette différence n'est pas un hasard, elle est le fruit de plusieurs facteurs spécifiques à l'Europe.

La dépendance au gaz : le "merit order" qui fixe les prix

Le marché européen de l'électricité fonctionne sur le principe du "merit order". Pour répondre à la demande, on active les centrales de production des moins chères (renouvelables, nucléaire) aux plus chères. Cependant, c'est le coût de la dernière centrale appelée, souvent une centrale à gaz, qui fixe le prix pour tout le monde

Ainsi, même avec une forte production renouvelable, tant que le gaz est nécessaire pour équilibrer le réseau, son prix élevé tire l'ensemble du marché vers le haut.

Le poids des taxes et des réseaux

La facture d'une entreprise n'est pas que le prix du MWh. En France, la part de la fourniture d'énergie ne représente qu'environ un tiers de la facture finale d'une entreprise. 

Les deux autres tiers sont constitués des coûts d'acheminement (le TURPE, qui finance l'entretien des réseaux) et surtout des taxes, comme l'accise sur l'électricité et la TVA. Ces prélèvements, bien plus élevés qu'aux États-Unis par exemple, alourdissent considérablement la facture finale.

À titre d'exemple, voici la décomposition de la facture d'électricité d'un ménage moyen en France. L'électricité ne représente que 39 % du montant total de la facture.

Décomposition d'une facture au tarif bleu résidentiel (en %)

À jour en août 2025 - Pour 5000 kWh/an en 6 kVA et en option HPHC - Fourniture : Part couvrant la production et la commercialisation de l'électricité. Réseau : Part couvrant le transport de l'électricité. Taxes et contributions : TVA, CTA, et Accise.

%

Le coût du carbone pour l'industrie

Le système d'échange de quotas d'émissions de l'UE (EU ETS), bien que nécessaire pour le climat, ajoute un coût supplémentaire. En août 2025, le prix de la tonne de CO2 avoisine les 70 €. Ce coût est répercuté par les centrales à gaz ou à charbon sur leur prix de vente, augmentant encore le prix final de l'électricité pour les entreprises.

Et la France ? Un colosse nucléaire aux pieds d'argile

Avec son parc nucléaire historique, la France devrait disposer d'un avantage compétitif majeur. Pourtant, la réalité est plus complexe.

Le paradoxe de l'avantage nucléaire

Si le nucléaire assure à la France une électricité majoritairement décarbonée, le pays n'est pas une île énergétique. Entièrement intégrée au marché européen, la France voit ses prix influencés par ceux de ses voisins, notamment l'Allemagne. 

En conséquence, les difficultés de production de ces dernières années ont parfois contraint la France à devenir importatrice, l'exposant ainsi directement aux prix élevés du marché spot. Cette situation a atteint son paroxysme en 2022 et 2023, lorsque des problèmes de corrosion sous contrainte ont forcé l'arrêt de près de la moitié du parc nucléaire français.

Alors que la France possédait une électricité à un prix très compétitif, le gros de cet avantage a été perdu aujourd'hui :

Augmentation du prix du kWh HT en Europe entre 2008 et 2023. Source Eurostat
Augmentation du prix du kWh HT en Europe entre 2008 et 2023. Source Eurostat

Comment sortir de l'impasse ? L'appel d'Eurochambres aux décideurs

Face à ce constat alarmant, Eurochambres lance un appel urgent aux gouvernements et aux institutions européennes. Pour préserver la compétitivité industrielle et les emplois en Europe, l'organisation préconise une stratégie claire, loin d'être une simple rustine.

1. Créer un véritable marché unique de l'énergie

Sur le papier, un marché européen de l'énergie existe. En réalité, il reste fragmenté par des "frontières électriques". Le rapport appelle à accélérer la construction de lignes à très haute tension entre les pays, notamment entre la péninsule ibérique et la France. 

L'objectif : permettre à l'électricité renouvelable la moins chère, produite en abondance dans un pays, d'être facilement accessible dans un autre, et ainsi lisser les prix pour tous.

2. Accélérer massivement le déploiement des énergies propres

L'électricité issue des énergies renouvelables (solaire, éolien) est aujourd'hui la forme la moins chère de nouvelle production. 

Eurochambres insiste sur la nécessité de simplifier et d'accélérer drastiquement les procédures d'autorisation pour les nouveaux parcs. Des projets qui prennent aujourd'hui des années à sortir de terre doivent voir leurs délais réduits à quelques mois pour peser sur le marché et faire baisser les prix.

3. Sécuriser les prix sur le long terme

L'une des recommandations phares est de favoriser les contrats d'électricité de longue durée (PPA - Power Purchase Agreements). Ces contrats permettent à une entreprise de s'approvisionner directement auprès d'un producteur d'énergie renouvelable à un prix fixe sur 10, 15 ou 20 ans. Cela donne une visibilité budgétaire aux entreprises et déconnecte une partie de l'industrie de la volatilité extrême des marchés spot.

4. Soutenir l'efficacité énergétique des PME

Enfin, le rapport souligne l'importance d'aider les plus petites structures. Il préconise de renforcer les aides pour que les PME et ETI puissent investir dans l'efficacité énergétique (isolation, machines moins gourmandes, etc.). 

En réduisant leur propre consommation, elles deviennent moins vulnérables aux chocs sur les prix de l'énergie.

Avez-vous trouvé cet article utile ? 100% des 2 votes trouvent l'information utile.

L'INFO QUI FAIT BAISSER VOTRE FACTURE

  • Alertes Baisse des Prix en temps réel
  • Nouvelles Aides de l'État décryptées pour vous
  • Bons Plans Exclusifs de nos experts

Rejoignez des milliers de Français et recevez gratuitement l'essentiel de l'actu énergie sur votre canal préféré.

Partagez cet article !