Baisse record de la consommation gaz dans l'Aube : la "tempête" qui menace les 53.000 abonnés restants

Baisse record de la consommation gaz dans l'Aube : la "tempête" qui menace les 53.000 abonnés restants

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Dans le contexte d'une baisse historique de la consommation de gaz en France, le département de l'Aube enregistre la deuxième plus forte chute, juste derrière les Pyrénées-Orientales. Avec une consommation résidentielle qui s'est effondrée de 38 % et un nombre d'abonnés en baisse de 8 % entre 2019 et 2024, ce département du Grand Est se classe au deuxième rang national de cette transition énergétique. Mais derrière cette performance se cache une "tempête" économique, une menace directe pour les 53.000 abonnés restants du département.

Chute généralisée de la consommation de gaz dans l'Aube, de Troyes aux campagnes

Les données exclusives de GRDF que Selectra a pu analyser sont sans équivoque : la baisse de la consommation de gaz des ménages est un phénomène profond qui touche l'ensemble du territoire aubois. Au total, ce sont près de 300.000 MWh qui ont été effacés de la consommation annuelle résidentielle entre 2019 et 2024, et plus de 4400 foyers qui ont quitté le réseau de gaz sur la même période.

De la métropole troyenne aux communautés de communes les plus rurales, toutes les intercommunalités affichent de fortes baisses de consommation, comprises entre -30 % et -42 %, signe que la sortie du gaz est une réalité partout.

Évolution de la consommation de gaz résidentiel dans l'Aube par EPCI (2019-2024)
Communauté de communes (EPCI)Baisse de la consommationBaisse du nombre de compteurs
CC Seine et Aube-41,2 %-9,8 %
CA Troyes Champagne Métropole-39,1 %-7,2 %
CC d'Arcis, Mailly, Ramerupt-38,7 %-7,2 %
CC de Vendeuvre-Soulaines-36,3 %-11,0 %
CC des Lacs de Champagne-35,8 %-6,8 %
CC des Portes de Romilly-sur-Seine-33,5 %-8,9 %
CC du Nogentais-31,4 %-8,1 %
CC du Barséquanais en Champagne-31,7 %-13,6 %
CC du Pays d'Othe-32,4 %-13,1 %
CC de la Région de Bar-sur-Aube-37,7 %-8,4 %
CC de l'Orvin et de l'Ardusson-33,4 %-10,2 %

Source : GRDF

Réseau public de gaz dans l'Aube
Réseau public de gaz dans l'Aube. Source : sde-aube.fr

Troyes, locomotive de la baisse

Avec plus de 39.000 compteurs sur un réseau de 780 kilomètres, la communauté d'agglomération Troyes Champagne Métropole concentre plus des deux tiers des consommateurs de gaz du département. C'est donc logiquement elle qui tire les chiffres vers le bas : la baisse de consommation sur son territoire, qui atteint -39,1 % (soit une économie de 218.000 MWh), et représente 73 % de la baisse totale du département.

Cependant, derrière cette tendance de fond qui suit la dynamique nationale, une stratégie locale se met en place pour transformer le réseau. Selon le Plan Climat Air Énergie Territorial de la métropole, 7 % du gaz consommé sur le territoire est déjà du gaz renouvelable produit localement. L'agglomération, en lien avec GRDF, vise à porter cette part à 30 % d'ici à 2030

Chiffres clés du réseau de gaz dans l'Aube

  • Taille du réseau de gaz : 1331 km de canalisations ;
  • Couverture : 84 communes auboises sont desservies en gaz ;
  • Densité : Toutes les communes de l'Aube de plus de 1500 habitants sont alimentées en gaz naturel ;
  • Consommation annuelle de gaz des ménages en 2024 : 488.958 MWh (-38 % par rapport à 2019) ;
  • Consommation moyenne d'un ménage en 2024 : 9,20 MWh (-32,5 % par rapport à 2019) ;
  • Nombre de ménages abonnés au gaz en 2024 : 53.133 (-7,7 % par rapport à 2019).

La "tempête parfaite" : les raisons d'une chute si brutale

Si le département est celui où la consommation de gaz des ménages baisse le plus en France après les Pyrénées-Orientales, c'est parce qu'il concentre l'ensemble des dynamiques qui poussent les ménages à abandonner le gaz.

L'impact direct de la flambée des prix

Le premier facteur, et le plus brutal, est économique. Comme partout en France, les ménages aubois ont subi de plein fouet la forte hausse des prix du gaz, qui a vu la facture d'un foyer type augmenter de +59 % entre 2019 et 2024

Évolution de la facture de gaz pour un client chauffage (en €)

Évolution TRVG (zone 1) / PRG (part variable moyenne) pour une consommation de 11 200 kWh par an - Source : CRE, Calculs Selectra - Graphique : Selectra

Cette onde de choc a transformé la sobriété en une nécessité économique. La preuve la plus tangible de ce changement de comportement se trouve dans les données de consommation par foyer : dans l'Aube, un ménage consommait en moyenne 13,6 MWh en 2019 ; en 2024, il n'en consomme plus que 9,2 MWh, soit une baisse de l'usage individuel de -32,5 %.

Une sortie du gaz encouragée par la réglementation

Au-delà de la simple baisse de consommation, l'Aube connaît un véritable mouvement de sortie du réseau, avec une perte de 7,7 % de ses abonnés en cinq ans. Cette tendance est activement pilotée par les politiques publiques. 

D'un côté, la réglementation environnementale RE2020 a de facto mis fin à l'installation de chaudières à gaz dans les logements neufs, tarissant la source de nouveaux clients. 

De l'autre, les aides de l'État comme MaPrimeRénov' incitent financièrement les propriétaires à remplacer leurs chaudières existantes par des pompes à chaleur. 

Des hivers plus doux, même dans le Grand Est

Enfin, ce mouvement de fond a été grandement facilité par un contexte climatique exceptionnel. Contrairement à une idée reçue, les hivers doux ne sont pas l'apanage du Sud. Les bilans officiels de Météo-France montrent que le nord-est de la France a connu une succession ininterrompue de températures anormalement élevées sur toute la période d'analyse :

  • Hiver 2019-2020 : Le plus chaud jamais enregistré en France. La température a été supérieure à la normale de plus de 3 °C sur un large quart nord-est, dont fait partie l'Aube.
  • Hiver 2020-2021 : Les températures ont été en moyenne 1 à 2 °C au-dessus des valeurs saisonnières sur une large zone allant jusqu'aux frontières du Nord-Est.
  • Hiver 2021-2022 : Qualifié de "majoritairement doux", il a affiché une anomalie de 1 à 2 °C sur une majeure partie du pays, y compris en Alsace et dans le reste du Grand Est.
  • Hiver 2022-2023 : Les températures pour la saison ont été 1 à 2 °C au-dessus des normales dans la région Grand Est.
  • Hiver 2023-2024 : Troisième plus chaud jamais mesuré, il a confirmé cette tendance avec une anomalie de +2,4 °C pour la seule région Grand Est.

Cette série continue d'hivers particulièrement cléments n'est pas neutre. Sachant que, selon la CRE, le chauffage représente 84 % de la consommation de gaz résidentiel, ces températures élevées ont mécaniquement réduit les besoins énergétiques. 

Quel avenir pour le gaz dans l'Aube ?

Avec une chute aussi rapide de la consommation, le "cercle vicieux" tarifaire est particulièrement menaçant pour les 53.000 abonnés restants. Les coûts fixes du réseau, répartis sur moins de consommateurs, risquent de provoquer une hausse continue des tarifs d'acheminement.

Face à ce défi, GRDF mise sur le développement du gaz vert. La stratégie est de transformer le réseau pour qu'il devienne un vecteur d'énergie renouvelable locale, notamment via la méthanisation. Pour l'opérateur, cette transition est la seule solution pour justifier le maintien de l'infrastructure à long terme. 

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