Covid-19 : faut-il réinventer le monde assurantiel de demain ?
Suite au Covid-19, le monde de l'assurance connaît des bouleversements !

Covid-19 : faut-il réinventer le monde assurantiel de demain ?

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À bien des égards, la réalité du monde actuel peut être désarmante. Tous les pans de notre société sont touchés, de près ou de loin, par la crise sanitaire et économique du Covid-19. Pour les acteurs de l’assurance, les bouleversements sont nombreux. Comme bien d’autres, ils savent qu’il leur est indispensable d’imaginer le monde de demain, et peut-être, un nouveau modèle assurantiel.

  • En bref : Covid-19 : L’urgence d’un nouveau modèle assurantiel
  • La crise économique et sanitaire due au Covid-19 a violemment impacté les TPE et PME ;
  • Le gouvernement a mis en place un fonds de solidarité pour les aider, ainsi qu’une prime exceptionnelle pour les indépendants ;
  • Malgré tout, les pertes sont très importantes et les aides insuffisantes ;
  • Le secteur de l’assurance a déployé des mesures exceptionnelles se chiffrant à plus de 3 milliards d’euros, mais celui-ci reste encore critiqué sur la question des pertes d’exploitation ;
  • Face à l’urgence de la situation, et en vue de mieux gérer de prochaines crises, Bercy et le secteur assurantiel ont lancé une réflexion collective, notamment pour se pencher sur la création d’un « régime pandémie ».

Covid-19 : une crise sanitaire aux multiples conséquences

La crise sanitaire et économique liée à la pandémie de Covid-19 est loin d’être terminée, mais pour les acteurs du marché assurantiel, il faut déjà penser à l’après. À quoi ressemblera le monde de l’assurance de demain, bouleversé par les événements de ces derniers mois ?

L’un des sujets de débat depuis la mise en place des mesures restrictives de quarantaine concerne les professionnels, et plus précisément, les pertes d’exploitation. De nombreuses entreprises énormément fragilisées par la crise, qui n’ont eu d’autre choix que de fermer pendant plus de deux mois, font face à une situation économique d’une grande violence. Les pertes sur leur chiffre d’affaires sont considérables. Beaucoup, pensant pouvoir se tourner vers leur assureur pour limiter les dégâts, ont eu la surprise de constater que celui-ci ne leur sera d’aucune aide. Pourquoi ? Car la perte d’exploitation liée à une pandémie ou à une crise sanitaire, n’est pas prise en compte dans les risques pris en charge par leur contrat assurantiel.

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Pour ces entreprises, l’enjeu est considérable : sans une aide concrète, elles sont vouées à faire faillite dans des proportions monumentales. Dans un article, L’Express s’intéresse précisément à ces professionnels impactés dont il recueille la parole, pointant du doigt les crispations animant le secteur assurantiels. Le journal rappelle par ailleurs un chiffre important : si l’on en croit les premières analyses de marché publiées ces derniers temps, les faillites d’entreprises pourraient subir une hausse de 25 % en 2020 en raison de la pandémie de Covid-19. C’est ce qu’avancent les résultats publiés début avril 2020 par l’assureur-crédit Coface.

« Ce serait, de très loin, la plus forte hausse depuis 2009 [+ 29 %], quand bien même l’activité économique redémarrerait graduellement dès le troisième trimestre et qu’il n’y aurait pas de deuxième vague épidémique au second semestre », explique Coface dans des propos relayés par Le Monde.

Sur le plan de la responsabilité d’une telle situation, on se renvoie la balle : le gouvernement assure que la prise en charge des pertes d’exploitation fait partie des missions des assureurs, alors que ces derniers estiment que ce n’est pas la crise sanitaire elle-même qui est responsable de la crise économique, mais les mesures de quarantaine de l’État. De fait, le sujet est extrêmement complexe, puisque les conséquences de la crise actuelle prennent des formes multiples, qu’il s’agisse de celles sur les assureurs eux-mêmes, le modèle des contrats, la sinistralité, la nature des risques couverts, l’activité des entreprises, le champ d’action de l’État, et bien plus encore.

Selon le marché assurantiel Lloyd’s of London, qui a partagé les résultats d’une étude le 14 mai 2020, le secteur assurantiel mondial pourrait subir des pertes de 203 milliards de dollars en 2020 en raison de la crise du Covid-19.

Covid-19 : les entreprises fragilisées demandent plus de l’État et des assureurs

Le débat sur la responsabilité laisse les entreprises sur la touche, puisqu’en attendant, quelles solutions sont donc proposées à la réalité de leur situation actuelle ? Il serait évidemment faux de dire que rien n’a été fait, mais est-ce assez ?

Du côté de Bercy, des dispositifs ont bel et bien été déployés pour les aider, dont une prime de 1 500 euros pour les indépendants. À cela s’ajoute le fameux fonds de solidarité à destination des TPE et PME – de 7 milliards d’euros au total. Fin avril, celui-ci a par ailleurs été élargi pour que les entreprises créées après le 1er février 2020 puissent y avoir accès. Cependant, non seulement ce fonds de solidarité n’inclut pas toutes les situations, mais son accès est encadré par des critères précis : les entreprises doivent pouvoir justifier une perte minimum en fonction des différentes périodes. Au regard de sa nécessité et l’urgence de la situation, les chiffres parlent d’eux-mêmes : le 18 avril, le million de demandes enregistrées pour bénéficier de cette aide été dépassé. Mais pour beaucoup d’entrepreneurs, tout cela est très souvent insuffisant, leurs pertes sur le long terme dépassant largement ces compensations publiques. Il s’agit d’un pansement sur une plaie béante.

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À force d’appels du pied de l’état, et d’une critique se faisant plus forte au cœur de l’opinion publique, les assureurs ont commencé à mettre en place des mesures exceptionnelles de leur côté. Au mois d’avril, la Fédération française de l’Assurance – ou FFA – annonçait ainsi une participation à l’effort national se chiffrant à 3,2 milliards d’euros. Certains ont aussi pris des dispositions spécifiques, comme le CIC. La filiale du Crédit Mutuel a en effet annoncé qu’elle reversait une prime exceptionnelle à ses assurés professionnels couverts contre les pertes d’exploitation.

Une décision qui a valu au CIC de multiples critiques au sein même du secteur assurantiel, rapporte Le Monde, car il aurait « mis en porte-à-faux le reste des acteurs », lesquels seraient pour beaucoup dans l’incapacité de déployer une mesure semblable. Pour autant, précise le journal, ils sont plusieurs à avoir annoncé une décision similaire suite à cela, entre autres la MMA, le Crédit Agricole, la BPCE et la Société Générale. Sur ce sujet brûlant, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution – ou APCR – a par ailleurs été saisie.

Quoi que l’on en dise, un effort concret a donc été fait – collectif et individuel – même si pour de nombreuses personnes celui-ci reste trop tardif, voire insuffisant. Un constat auquel les assureurs répondent clairement : la crise sanitaire et économique les impacte aussi.

L’un dans l’autre, tout cela a provoqué une discussion plus large concernant l’avenir. Car si l’on en croit les spécialistes, une situation similaire à celle que l’on connaît aujourd’hui pourrait bel et bien se produire dans le futur. Il est donc nécessaire pour les assureurs de déterminer quel serait leur rôle face à ces crises, et de travailler main dans la main avec le gouvernement pour que la gestion soit coordonnée et plus efficace qu’elle ne l’est aujourd’hui. Une situation dont les deux partis semblent conscients, puisqu’une réflexion vient d’être officiellement lancée à ce sujet afin de « développer une couverture assurantielle des événements exceptionnels », expliquait ainsi Bruno Le Maire, le ministre de l’Économie.

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La pandémie de Covid-19 a amené avec elle de grandes questions sur la responsabilité des acteurs privés et publics de la société.

Bercy et la FFA travaillent donc désormais ensemble pour trouver des solutions aux problématiques rencontrées ces derniers mois. Le fer-de-lance de cette réflexion sera bien sûr le fameux « régime pandémie », ou du moins, sa potentielle création. « Il s’agit d’imaginer un système de partenariat public/privé qui permet de faire face aux catastrophes sanitaires, précisait Jean-Laurent Granier, PDG de Generali France et vice-président de la Fédération française de l’Assurance, sur BFM Business. Les assureurs interviennent en premier niveau, et lorsque les primes sont épuisées, c’est l’État qui donne sa garantie et qui intervient pour faire face à des événements d’ampleur exceptionnelle […] Le problème, c’est que ce type de dispositif n’a pas été pensé pour les catastrophes sanitaires. »

Le financement de ce régime est donc en question, et les détails de son élaboration et de son déploiement également. À ce jour, tout reste à faire et à inventer. Il semble que différents points reviennent : une mutualisation de l’effort en temps de crise, la création d’un nouveau modèle assurantiel et une collaboration étroite entre privé et public. En somme, afin de changer les choses pour le mieux, il est impératif d’imaginer le monde assurantiel de demain, dès maintenant.

Covid-19 et assurance auto : une baisse des indemnisationsSelon une étude récente d’une association de consommateurs, la baisse des indemnisations pour les assureurs automobiles se situerait entre 1,4 et 2,3 milliards d’euros. Un gain pour les assureurs qu’ils devraient, selon elle, redistribuer à leurs clients. Pour certains, l’engagement est déjà pris, comme pour la Maif qui a décidé de rembourser 2,8 millions d’assurés en raison de la baisse significative de sinistralité sur les routes pendant le confinement en France.

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