Centrale nucléaire de Cruas Ardèche
La centrale de Cruas en Ardèche pourrait être fermée à horizon 2035.

Energie nucléaire : la feuille de route du gouvernement enfin dévoilée

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La Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) présentée ce mardi se pose comme la nouvelle feuille de route en matière énergétique de la France. Une occasion pour Emmanuel Macron, de faire connaître ses futures mesures concernant le nucléaire, question polémique depuis plusieurs mois. Ces annonces ne semblent pas séduire l'opposition et les associations environnementales.

Réduire la dépendance à l'atome à 50% à horizon 2035

En France, 75% de l'électricité produite provient de l'énergie nucléaire. Une dépendance qui devra être réduite puisque le chef de l'Etat veut faire passer à 50% la part du nucléaire dans le mix énergétique de l'Hexagone. Initialement prévu pour 2025, l'objectif a été repoussé à 2035. Reconnaissant un recul sur les mesures annoncées, il tente de se justifier sur l'épineuse question du nucléaire en affirmant : "Je tiendrai cet engagement ; j'aurais aimé le tenir pour 2025 mais il s’est avéré que ce chiffre n’était pas atteignable. Nous allons maintenir ce cap en repoussant l’échéance à 2035 et faire de la transparence sur la trajectoire que nous allons suivre". 

Toutefois, n'est en aucun cas prévu l'arrêt total de la dépendance au nucléaire. D'ailleurs, comme le rappelle le Président de la République, ce dernier n'a "pas été élu sur un programme de sortie du nucléaire". En effet, selon Emmanuel Macron, l'atome doit demeurer important dans la production d'électricité car elle "nous permet pour le moment de bénéficier d'une énergie décarbonée et à bas coût".  

Fermeture des centrales : quel calendrier ? Quels sites ?

Pour respecter ses engagements, l'Etat devra fermer 14 réacteurs au total comme l'explique Emmanuel Macron : "14 réacteurs de 900 mégawatts seront arrêtés d'ici à 2035. Ce mouvement commencera à l'été 2020 avec l'arrêt définitif des deux réacteurs de Fessenheim". 

Toutefois, aucun calendrier précis n'a été dévoilé comme le fait savoir le Président, "il restera alors à organiser la fermeture de 12 réacteurs entre 2025 et 2035 : quatre à six réacteurs d'ici 2030, le reste entre 2030 et 2035.". Ce dernier assume parfaitement le flou lié au calendrier, sous prétexte d'une "approche adaptative et pragmatique". Dès lors, affirme-t-il, "nous ne pouvons pas dire pour le moment à quelle date précise nous fermerons tel ou tel réacteur. Le rythme variera en fonction de l’évolution du mix énergétique en France et chez nos voisins." 

Par ailleurs, outre le flou sur le calendrier, l'inconnu demeure également sur les centrales qui seront maintenues ou non en activité. Sur les 58 centrales françaises, on peut penser que les plus anciennes seront fermées en priorité, à savoir Bugey dans l'Ain, Cruas en Ardèche, Tricastin dans la Drôme, Blayais en Gironde, Chinon en Indre-et-Loire, Saint-Laurent dans le Loir-et-Cher, Dampierre dans le Loiret, et Gravelines dans le Nord.

Quid des EPR, ces réacteurs de nouvelles générations ? 

Cette réduction à la dépendance du nucléaire concernera-t-il les EPR ? La question n'a pas été tranchée et le se sera pas avant 2021, c'est à dire, après la mise en service de l'EPR de Flamanville, en Normandie. En effet, pour l'instant, l'expérience de Flamanville est peu concluante puisque de plus en plus coûteuse et sans résultats prouvés, au vu des retards pris sur le chantier. Lancés en 2007, les travaux devaient, à l'origine, s'effectuer sur 5 ans. Toutefois, ils ne sont toujours pas finis. Concernant l'EPR, EDF a donc fait savoir que le chantier s'achèverait en 2020. Des retards cumulés qui font augmenter le montant des travaux :  initialement budgetée à 3,3 milliards d'euros, la facture se porte aujourd'hui à 10,9 milliards d’euros. 

"Je demande à EDF de travailler à l’élaboration d’un programme de 'nouveau nucléaire' en prenant des engagements fermes sur le prix, pour qu’ils soient plus compétitifs. Tout doit être prêt en 2021 pour que le choix qui sera proposé aux Français puisse être un choix transparent et éclairé", a déclaré Emmanuel Macron.

Une opposition peu convaincue 

Ces annonces sur le nucléaire ont été décriées par de nombreuses personnalités de l'opposition. Parmi elles, Yannick Jadot, eurodéputé écologiste, déplore : "Emmanuel Macron continue dans la politique des grands discours et des tous petits pas. Il nous enferme dans un nucléaire en faillite. On n'éteint pas la colère avec des belles paroles sans actes de justice sociale. On ne prépare pas l'avenir avec les énergies du vieux monde." Il reprend ainsi les éléments de langage de Nicolas Hulot, ancien ministre de la Transition énergétique et solidaire, qui lors de sa démission avait avancé être las de la stratégie des "petits pas" mise en oeuvre par le gouvernement sur les questions climatiques et environnementales. 

Jean-Luc Mélenchon, député des Bouches du Rhône et chef de fil de la France Insoumise (FI), le tacle également : "Fermeture des centrales nucléaires repoussée à la Saint-Glinglin, mensonges sur les soi-disant avantages de cette énergie dangereuse, entêtement dans la catastrophe industrielle et financière de l'EPR. Macron apporte la preuve de sa totale soumission au lobby nucléaire".

Sécurité et nucléaire : les ONG tirent la sonnette d'alarme

Les associations ne semblent pas non plus enchantées par les futures mesures et se préoccupent particulièrement sur les problématiques de sécurité liées à l'atome. Comme l'explique Yves Marignac, directeur de Wise-Paris, "fin 2035, les 44 réacteurs restants auront en moyenne près de 50 ans. Cela condamne à fonctionner avec un parc très 'challengé' dans sa sûreté". Une inquiétude partagée par Alix Mazounie, porte-parole de Greenpeace, qui souligne que cette stratégie est "loin d’être une attitude responsable au regard de notre parc nucléaire vieillissant, mal en point et de plus en plus coûteux à entretenir." 

Pour l'ONG, afin de s’engager vraiment dans la transition énergétique, la solution réside dans les énergies vertes. Mettant en exergue les possibilités liées aux énergies renouvelables, Alix Mazounie rappelle : "aujourd'hui, on a la possibilité d'avoir une source d'électricité qui est bonne pour le climat et qui ne génère pas de déchets radioactifs qui vont polluer notre planète pendant des milliers d'années".

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