Fin d'une époque ? Ces fournisseurs pourraient proposer le tarif réglementé d'électricité d'EDF
Alors que le marché français de l'électricité est en pleine mutation, l'Autorité de la Concurrence remet en cause l'attribution exclusive du tarif réglementé à EDF et réclame que tous les fournisseurs qui le souhaitent soient autorisés à commercialiser ce tarif défini par l'État. Le gouvernement s'est ainsi engagé à examiner la question.
Pourquoi l'Autorité de la Concurrence ne veut plus que le tarif réglementé soit une exclusivité d'EDF ?
Dans son rapport publié en novembre 2024, l'Autorité de la Concurrence estime que l'exclusivité conférée à EDF pour proposer au niveau national le tarif réglementé d'électricité renforce sa position dominante et son image de prestataire de service public, ce qui rend difficile l'accès aux concurrents d'EDF à une partie importante du marché.
Selon l'Autorité de la Concurrence, en ouvrant le tarif réglementé à l'ensemble des fournisseurs d'électricité, il serait possible de stimuler la concurrence sur le marché entre les différents opérateurs tout en préservant les objectifs de stabilité des prix et de sécurité d'approvisionnement.
La possibilité de distribuer des tarifs réglementés de vente (TRV) pourrait à ce titre être ouverte à tous les fournisseurs
Quelle est la réponse du gouvernement ?
Face à la demande de concurrence exprimée par l'Autorité de la Concurrence, le gouvernement envisage d'étudier, en profondeur, la possibilité d'ouvrir le tarif réglementé à d'autres fournisseurs ou de mettre en place des mesures alternatives ciblées.
Les autorités françaises estiment que la faculté pour tous les fournisseurs alternatifs de proposer les TRVE, tel que recommandé par l'Autorité de la concurrence, nécessite une analyse approfondie pour en évaluer l'efficacité et la faisabilité.
Le gouvernement n'entend donc pas opérer de changement radical sans avoir au préalable examiné l'ensemble des enjeux. Dans son rapport du mois de février 2025, il souligne que la protection des consommateurs, notamment des ménages vulnérables et des petites entreprises, ainsi que la sécurité d'approvisionnement ne doivent pas être compromises.
Quelles sont les conditions pour qu'un concurrent d'EDF puisse proposer le tarif réglementé à ses clients ?
TotalEnergies, ou n'importe quel fournisseur alternatif qui le souhaite, pour pouvoir proposer le tarif réglementé d'électricité, devra se conformer à un cahier des charges strict qui reprend les obligations de service public et les exigences de stabilité tarifaire.
Concrètement, le concurrent d'EDF devra :
- Garantir en permanence la fourniture d'électricité aux clients bénéficiaires du tarif réglementé, comme l'exige l'article L.121-5 du Code de l'énergie, c'est-à-dire assurer un service public universel comparable à celui d'EDF et des ELD sur leurs zones de desserte respectives.
- Maintenir les contrats de fourniture de façon indéterminée, conformément aux obligations actuelles qui font que le tarif réglementé s'applique de manière continue aux clients. Le fournisseur alternatif devra prouver qu'il pourra honorer cette obligation sur le long terme, sans que la possibilité de cesser l'offre ne compromette la sécurité ou la continuité du service.
- Respecter l'ensemble des obligations relatives à la transparence et à la communication d'informations aux consommateurs afin d'éviter toute confusion entre le tarif réglementé et les offres de marché. Cela impliquera la mise en place d'un processus de souscription distinct, garantissant que l'image de marque associée au tarif réglementé, perçue comme gage de sécurité et de fiabilité, ne soit pas diluée.
- Mettre en œuvre une couverture d'approvisionnement solide qui permette de reproduire fidèlement le lissage des coûts sur 24 mois. Cela signifie que le fournisseur peut financièrement assurer l'approvisionnement de ses clients même en cas de hausse des prix sur les marchés tout en garantissant une tarification stable et prévisible.
Quels fournisseurs pourraient proposer le tarif réglementé d'électricité ?
Selon Selectra, seuls deux fournisseurs alternatifs seraient en mesure de proposer le tarif réglementé en complément d'EDF, tout en respectant les conditions évoquées précédemment : il s'agirait d'Engie et de TotalEnergies.
En France, Engie dessert environ 8,2 millions de clients résidentiels et professionnels, répartis de manière équilibrée entre l'électricité et le gaz, soit près de 4 millions de compteurs pour chacune de ces énergies. Engie se positionne d'ailleurs en tête de la production éolienne et solaire dans l'Hexagone, et compte plus de 24 millions de clients particuliers à l'échelle mondiale.
De son côté, TotalEnergies compte plus de 5 millions de clients particuliers et professionnels en France, consolidant ainsi sa position de troisième acteur français de l'électricité et du gaz. Par ailleurs, TotalEnergies est présent dans 130 pays à travers le monde.
L'Autorité de la Concurrence prône la suppression du tarif réglementé
L'Autorité de la Concurrence considère que le tarif réglementé d'électricité, bien qu'ayant initialement servi à protéger les consommateurs de la volatilité des marchés de gros, est aujourd'hui source de distorsions sur le marché de l'électricité et souhaite donc sa suppression.
La régulation, fondée sur une méthode d'empilement des coûts et un lissage sur 24 mois, assure une stabilité du tarif réglementé qui masque les véritables signaux des marchés et limite l'émergence d'offres réellement compétitives par d'autres fournisseurs.
Selon l'Autorité, la suppression du tarif réglementé permettrait de favoriser un environnement de libre concurrence, en incitant tous les acteurs à développer des stratégies tarifaires innovantes et adaptées aux évolutions du marché. Plutôt que de s'appuyer sur un dispositif généralisé, des mesures ciblées pourraient être mises en œuvre pour protéger les consommateurs vulnérables, sans pour autant entraver la dynamique concurrentielle du secteur.
Concernant cette demande de l'Autorité de la Concurrence, le gouvernement ne souhaite pas donner suite et a confirmé qu'il continuera à proposer le tarif réglementé dans les prochaines années.
Des changements pour le tarif réglementé d'électricité en 2026
Plusieurs changements importants seront appliqués sur le tarif réglementé pour cette fin d'année.
De nouvelles heures creuses
De nouvelles heures creuses commenceront à être déployées en novembre 2025 pour mieux coller aux réalités du marché et aux évolutions des modes de consommation, notamment face à l'essor de la production d'électricité d'origine solaire et des équipements connectés.
Ces plages horaires revues pourront inclure plus d'heures creuses en journée afin d'encourager un décalage de la demande vers des périodes de moindre tension sur le réseau.
L'extinction progressive de l'option base
La Commission de régulation de l'énergie a récemment annoncé son intention de supprimer progressivement l'option Base, jugée moins adaptée aux évolutions du marché et aux besoins des consommateurs. Conçue initialement pour offrir une tarification simple sans différenciation horaire, l'option Base apparaît aujourd'hui comme un vestige d'un passé où la flexibilité tarifaire était moins cruciale.
Son élimination vise à encourager le déploiement d'offres comportant des signaux horaires plus précis, tels que les options Heures pleines/Heures creuses ou Tempo, permettant aux clients d'ajuster leur consommation en fonction des fluctuations réelles du marché et des périodes de faible demande.
Un prix de l'électricité plus proche des prix de marché
À compter du 31 décembre 2025, l'extinction programmée de l'ARENH (mise à disposition pour les fournisseurs alternatifs d'une partie de l'électricité produite dans les centrales d'EDF à un prix fixe) constitue un point de bascule dans la construction des tarifs, qui reposait jusque-là sur une combinaison de la part ARENH et d'un lissage sur 24 mois des coûts d'approvisionnement sur les marchés de gros.
Sans cette composante stabilisatrice, le prix de l'électricité sera beaucoup plus assujetti aux prix sur les marchés. En cas d'augmentation des prix sur les marchés, l'État pourra compenser en appliquant une réduction sur les factures d'électricité de l'ensemble des ménages.