blackout hiver

Comment se préparer au blackout cet hiver ?

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Pas d’éclairage, de chauffage, d’eau chaude, de réfrigérateur : le spectre d'une coupure d’énergie généralisée a rarement été aussi omniprésent en France depuis plusieurs dizaines années. La pénurie de gaz qui guette la France pourrait entraîner des blackouts durant les heures de pointe de consommation de l’hiver 2022-2023. Alors, comment agir face à un blackout ? Voici les outils pour anticiper au mieux ce scénario inhabituel.

Faut-il craindre une pénurie de gaz en France ?

Le 18 juillet 2022, l’Agence Internationale de l’Énergie (AIE) alertait l'opinion : l’Union européenne manquera de gaz cet hiver si sa consommation n’est pas réduite. En parallèle, la Commission européenne annonçait récemment s’apprêter à « gérer la pénurie » à venir.

Une pénurie de gaz sur fond de crise géopolitique et énergétique

La crise énergétique que traversent la France et l’Europe est majeure. Depuis l’éclatement de la guerre en Ukraine le 24 février dernier, le gaz est devenu une monnaie d’échange. Alors que l’Union européenne limite les importations de pétrole russe, la Russie quant à elle réduit drastiquement ses exportations de gaz vers le vieux continent.

Le risque de pénurie de gaz cet hiver en France est réel : la Russie a déjà stoppé l’approvisionnement en gaz pour la Pologne et la Bulgarie depuis le 27 avril. Or, quand on sait que les importations de gaz russe couvraient environ 20 % de la consommation française (et 40 % de la consommation européenne) avant la guerre en Ukraine, cela représente un manque à gagner considérable. Si la France n'est pas le pays le plus dépendant au gaz russe, elle doit se préparer toutefois à un scénario inédit depuis plusieurs décennies.

Le gouvernement français a déjà pris des mesures de poids pour anticiper un éventuel manque de gaz durant l’hiver prochain. Il a ainsi poussé au remplissage massif et rapide des stocks de gaz. Au 17 juillet 2022, ils étaient remplis à 71 %, contre 57,12 % à la même date en 20211. L’objectif est de parvenir à une forme d’autosuffisance qui permette à la France de répondre à ses besoins intérieurs.

Mais les stocks effectués ne suffiront probablement pas à couvrir l’ensemble des besoins pour l’hiver 2022-2023.

1Source : Historical remit storage data - EU, AGSI GIE, chiffres constatés le 19 juillet 2022.

Quels sont les risques d’une pénurie de gaz ?

Une pénurie de gaz pourrait avoir de lourds retentissements dans la vie Français.

Pour commencer, tous les équipements à gaz, qu’ils soient domestiques ou industriels, pourraient ne plus fonctionner. Cela toucherait notamment les foyers chauffés au gaz.

Ensuite, il faut savoir qu’une partie de l’électricité française et européenne est encore produite avec du gaz. Cela est d’autant plus le cas lorsque la demande électrique est forte et que toutes les centrales, y compris celles au gaz, doivent être mises à contribution. Le mix électrique français présente la particularité d’être constitué à près de 70 % d’électricité nucléaire. Mais dans une période où le parc nucléaire est amoindri par la mise à l’arrêt de douze réacteurs et les barrages hydroélectriques sont affaiblis par la sécheresse, la production d’électricité française pourrait être fortement affectée par la pénurie de gaz russe.

Le risque est simple : la France pourrait être dans l’incapacité de produire et de fournir la quantité d’électricité nécessaire pour répondre aux besoins des consommateurs professionnels et particuliers de l’Hexagone dès l’hiver prochain.

En effet, la demande en électricité et en gaz augmente significativement durant les périodes froides sous l’effet de la hausse des besoins en chauffage. Le risque de coupures d’électricité, autrement appelées blackouts, est donc avéré.

Selon Fatih Birol, directeur exécutif de l’Agence Internationale de l’Énergie :

« Le monde traverse sa première crise énergétique globale et la situation est particulièrement périlleuse pour l’Europe, qui est dans l’épicentre de la tourmente. »

Toutefois, le directeur exécutif d’EDF Marc Benayoun tient des propos rassurants :

« Il n’y a pas eu de blackout en France depuis 1978 et même si on est dans une situation très difficile, il y a quand même de très fortes chances que nous passions l’hiver sans délestage ».

Une situation qui inquiète au-delà des frontières françaises

Si les discours des politiques se veulent optimistes, le risque de pénurie de gaz inquiète tous les pays de l’Union européenne.

C’est le cas de l’Allemagne, fortement dépendante du gaz russe (51 % de ses importations en 20191), qui s’apprête à demander à la France des livraisons de gaz.

Le pays se prépare activement à faire face à une pénurie qui pourrait affecter massivement son économie. Au nom de la solidarité européenne, la France devrait répondre favorablement à cette demande inédite.

« Si nous sommes dans une bonne situation, on peut se permettre d’envoyer du gaz pour soutenir nos voisins allemands. La question, c’est quand et dans quelles quantités »

affirmaient récemment des sources du ministère de la Transition énergétique. Des propos que la Première ministre Elizabeth Borne avait déjà évoqués lors des Rencontres économiques d’Aix-en-Provence le 9 juillet dernier, en expliquant que la France fournirait à l’Allemagne une partie de son gaz. Une première, puisque historiquement, les flux de gaz ont toujours traversé l'Europe d'Est en Ouest et jamais dans l'autre sens.

Un plan de délestage axé sur les industriels

En quoi consiste le plan de délestage gaz ?

Couper la fourniture de gaz sur des sites ciblés durant une période restreinte : c’est ce que prévoit le plan de délestage de gaz fixé par le décret 2022-85, paru au journal officiel le 8 avril 2022.

L’objectif de cette décision ? Éviter un blackout pendant les heures de pointe de consommation et prioriser l’approvisionnement en gaz des lieux essentiels tels que les hôpitaux, les écoles et les EHPAD. En se basant sur une étude menée auprès de tous les acteurs concernés, GRED va dresser une liste de priorisation pour active le délestage chez les grands consommateurs de gaz qui seraient les moins impactés par une coupure temporaire de leur fourniture.

Selon l’explication transmise par GRDF sur son site internet, le plan de délestage gaz « consiste pour le site à procéder à une diminution importante de consommation en moins de 2h ».

Le plan de délestage gaz inclut-il aussi l’électricité ? La coupure immédiate de la fourniture d’électricité est déjà autorisée de façon ciblée pour dix-huit très grands consommateurs. Ce dispositif permet aussi d’éviter tout blackout national. Les sites visés par ces coupures sont rétribués financièrement proportionnellement à leur puissance effaçable.

Un plan visant les plus gros consommateurs de gaz

Le plan de délestage de consommation gaz ne concerne pas les particuliers, mais uniquement les très gros consommateurs (les sites professionnels consommant plus de 5 GWh par an).

Les 5 000 sites concernés sont notamment :

  • Les très gros sites industriels (verrerie, chimie, pétrochimie, métallurgie, etc) ;
  • Les producteurs d’électricité qui ont recours au gaz pour leur production ;
  • Les salles de spectacles, stades et grands centres commerciaux équipés d’une chaudière à gaz ;
  • Les gros bâtiments résidentiels et tertiaires dotés d’une chaudière à gaz.

Une mobilisation citoyenne encore insuffisante

Malgré l’ampleur de la crise énergétique qui s’annonce, la prise de conscience citoyenne semble encore balbutiante. Manque d’informations, lassitude, sentiment d’impuissance : les raisons pouvant expliquer la faible mobilisation citoyenne sont multiples.

L’instauration d’un « état d’urgence climatique » pour déclencher la prise de conscience citoyenne ?

« Il faut déclarer un état d’urgence climatique », affirmait le PDG de Schneider Electric, Jean-Pascal Tricoire, dans les colonnes du Figaro le 11 juillet 2022.

« Il n’y a pas suffisamment de sentiment d’urgence, pas de prise de conscience, alors qu’on risque des coupures d’électricité l’hiver prochain. »

Selon lui, les citoyens ont la possibilité de se mobiliser pour éviter les blackouts. Et ce, grâce à un outil : la sobriété. Pas question pour autant de « se serrer la ceinture, mais de réduire sa facture pour la même qualité de vie ».

Une solution qui passerait par exemple par l’installation de dispositifs connectés dans toutes les résidences pour « économiser de façon durable et ajuster les températures lorsqu’il y a des pointes » de consommation.

C’est aussi le propos transmis par les dirigeants de TotalEnergies (Patrick Pouyanné), d’Engie (Catherine MacGregor) et d’EDF (Jean-Bernard Levy), dans une tribune publiée par le Journal du Dimanche le 26 juin 2022 par : « La meilleure énergie reste celle que nous ne consommons pas », affirment-ils d’une voix. Ils appellent ensemble à :

« Une action collective et individuelle pour que chacun d’entre nous – chaque consommateur, chaque entreprise – change ses comportements et limite immédiatement ses consommations énergétiques, électriques, gazières et de produits pétroliers. »

La mobilisation citoyenne demeure en effet un levier-clé pour lutter contre un blackout général.

La consommation de gaz en France en net recul début 2022

Réduire la consommation énergétique en France et en Europe : c’est ce que recommandent d’une seule voix l’Agence Internationale de l’Énergie (AIE), la Commission européenne et de nombreux spécialistes de l’énergie.

Sur la période du 1er janvier au 24 avril 2022, la demande gazière française avait déjà baissé de 8 % par rapport à la même période l’an dernier, selon les chiffres de GRTgaz. Une évolution encouragée par une météo clémente, un ralentissement économique réel et des prix devenus prohibitifs à la suite de la guerre en Ukraine. Mais il ne faut pas oublier les efforts fournis par les ménages pour limiter leur consommation, sur les conseils des autorités internationales.

Toutefois, la consommation de gaz pour produire de l’électricité a augmenté de 25,9 % sur la période de janvier à avril 2022, par rapport à la même période l’an dernier. Cela est dû à « une très faible disponibilité du parc nucléaire, une production d’énergies renouvelables faible et une capacité d’import limitée d’électricité depuis d’autres pays », explique GRTgaz.

Aujourd’hui, la France consomme environ 450 TWh de gaz par an. Sa capacité de stockage ne s’élevant qu’à 130 TWh2, soit moins d’un tiers de sa consommation, il est essentiel d’adopter une démarche de sobriété énergétique pour éviter un blackout.

2Source : Le stockage de gaz en France, CRE, 22 avril 2022.

Comment économiser l’énergie pour éviter un blackout ?

Mais alors, comment renforcer cette tendance et l’élargir à une démarche de sobriété énergétique citoyenne ?

Le gouvernement, qui travaille actuellement sur le plan de « sobriété énergétique » dont le déploiement est prévu pour l’automne, entend inciter professionnels et citoyens à consommer moins. La notion de « sobriété » semble encore en partie taboue en France. Le travail de pédagogie pour encourager la mobilisation citoyenne doit être poursuivi pour montrer qu’il est possible de changer ses habitudes de consommation.

« Ce sera évidemment l’affaire de tous », institutions de l’État, entreprises et particuliers inclus, confirmait Agnès Pannier-Runacher sur BFM Business le 13 juillet 2022. « Cet hiver, dans notre manière de nous chauffer et d’utiliser, chacun chez soi peut faire un geste pour son portefeuille et son pouvoir d’achat, mais également pour notre souveraineté politique énergétique », ajoute-t-elle.

Ainsi, pour économiser du gaz et contribuer à éviter un blackout, il suffit de mettre en place quelques actions simples :

  • Baisser la température du chauffage : pas plus de 19 °C dans la pièce de vie. Selon l’Agence Internationale de l’Énergie, « baisser le chauffage de quelques degrés peut économiser la même quantité de gaz que celle fournie par Nord Stream sur un hiver » ;
  • Limiter l’usage de la climatisation ;
  • Opter pour un mode de chauffage adapté et performant et s’équiper d’un thermostat connecté ;
  • Entretenir régulièrement la chaudière et les équipements gaziers ou électriques pour éviter toute surconsommation ;
  • Surveiller la consommation d’eau chaude ;
  • Privilégier les appareils électroménagers les moins énergivores en consultant leur étiquette énergie, par exemple ;
  • Débrancher les appareils en veille ;
  • Éteindre les lumières inutilisées et choisir des ampoules à basse consommation, etc.

Le président de la Commission de Régulation de l’Énergie (CRE), Jean-François Carenco, encourage lui aussi les Français à réaliser des économies d’énergie dès maintenant pour prévenir les difficultés d’approvisionnement l’hiver prochain : « Il y a urgence et chacun doit s’y mettre ».

Blackout électrique en France : quelles solutions ?

Si le risque d’un blackout électrique et/ou gazier en France en 2022 et 2023 est réel, il existe des solutions pour y faire face. Zoom sur trois alternatives concrètes pour ne pas subir le blackout électrique.

Le groupe électrogène, une idée qui peut coûter cher

L’électricité peut être produite par les consommateurs eux-mêmes grâce à un groupe électrogène à essence. Il faut compter 300 € pour se procurer un modèle d’entrée de gamme de 3 kW, puissance nécessaire pour faire fonctionner les appareils principaux d’un logement.

Si le prix d’achat est attractif, il n’en est pas de même pour le coût de fonctionnement. En se référant au prix actuel moyen de l’essence SP95-E10, un groupe électrogène de 3 kW qui consomme 3 l/h coûterait environ 6 €/heure. Cela revient à 2 €/kWh produit, soit 12 fois plus que la même quantité achetée sur le réseau électrique français.

De plus, la majorité des groupes électrogènes ne peuvent fonctionner correctement que sur des plages horaires de 3 à 4 heures par jour, ce qui demeure trop limité pour des besoins quotidiens.

Sans compter que les stations-services, qui fournissent l’essence pour alimenter les groupes électrogènes, sont dépendantes de l’électricité. La pénurie d’essence, quant à elle, guette également le pays depuis plusieurs mois.

Le groupe électrogène semble donc être une solution inadaptée à la situation qui se profile en France.

Les panneaux solaires photovoltaïques et thermiques

Et si l’énergie solaire vous permettait d’assurer tous vos besoins en électricité et/ou en chaude sanitaire ?

Il s’agit d’une solution particulièrement adaptée aux habitations individuelles, mais plus difficile à mettre en œuvre si vous vivez dans un immeuble ou une copropriété.

Plusieurs solutions s’offrent à vous :

  • Les panneaux solaires photovoltaïques, qui produisent de l’électricité pour alimenter vos appareils et qui peuvent couvrir quasiment tous vos besoins en électricité, selon votre localisation, vos besoins en électricité et le type d’installation que vous choisissez ;
  • Les panneaux solaires thermiques, qui produisent de l’eau chaude et/ou du chauffage. Il faut savoir qu’un chauffe-eau solaire peut couvrir jusqu’à 80 % de vos besoins annuels en ECS ;
  • Les panneaux solaires hybrides, qui produisent à la fois de l’électricité et de l’eau chaude et/ou du chauffage.

Cependant, l’installation de panneaux solaires représente un investissement important. En effet, il faut compter un minimum d’environ 5 000 € pour un chauffe-eau solaire (panneaux solaires thermiques) et environ 9 000 € pour une installation photovoltaïque de 3 kWc. Les installations hybrides, quant à elles, coûtent encore plus cher (à partir de 15 000 € pour la plupart).

Bien que les panneaux solaires puissent vous garantir une autonomie électrique en cas de blackout, il faut rappeler qu’il existe aussi un risque de coupure automatique de la production dans certaines circonstances. Ainsi, lors d’une trop forte chaleur, la production d’électricité peut être arrêtée temporairement pour éviter tout risque de surchauffe. De plus, en cas de coupure d’électricité sur le réseau national, votre centrale peut être stoppée automatiquement pour des raisons de sécurité. Il peut donc être nécessaire de faire modifier ces réglages en toute sécurité par votre installateur afin de continuer à utiliser votre production d’électricité solaire en ça de blackout.

Pour être sûr de choisir une solution solaire adaptée à vos besoins et à votre situation, il est préférable de vous adresser directement à un installateur solaire.

La batterie électrique pour les appartements

Si vous vivez en appartement et que vous n’avez pas la possibilité d’installer des panneaux solaires, la batterie peut représenter une alternative intéressante pour faire face à un blackout.

Il existe des modèles de batteries domestiques à partir de 500 € et jusqu’à 4 000 €, dont les fonctionnalités sont parfaitement adaptées aux besoins du grand public.

Faciles à apprivoiser, ces batteries électriques peuvent stocker, réguler et enfin convertir l’électricité pour assurer les besoins des appareils prioritaires pendant plusieurs heures à quelques jours, selon les modèles. Par exemple, une batterie d’une puissance de 2 kWh peut assurer l’alimentation d’un réfrigérateur-congélateur de 170 L durant environ 72 heures.

Il faut donc veiller à garder un stockage d’électricité maximal dans la batterie afin qu’elle soit performante lorsque vous en aurez besoin.

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