Les assureurs santé redoutent la crise du chômage à venir
La période de confinement est terminée, la période d’urgence sanitaire aussi, et désormais, la France se prépare à une crise économique longuement annoncée. Le secteur de l’assurance, qui n’a pas été épargné par la pandémie de Covid-19, sonne l’alerte quant à la future hausse du chômage. Celle-ci pourrait en effet mettre les assureurs santé dans une situation compliquée. Explications.
- En bref : Santé : les assureurs alertent sur une potentielle future crise du chômage
- La crise sanitaire du Covid-19 a eu de lourdes conséquences pour l’économie française ;
- Malgré quelques signes encourageants alors que la période d’urgence sanitaire prend fin, de nombreux spécialistes estiment cependant que le plus dur reste à venir ;
- La crise économique n’en serait donc qu’à son commencement, et beaucoup redoutent une augmentation significative du taux de chômage ;
- Les assureurs santé couvrant les salariés en craignent le coût, qui pourrait être très important pour eux ;
- Un salarié peut en effet bénéficier de sa couverture de complémentaire santé professionnelle jusqu’à un an après son licenciement ;
- Mi-juin 2020, le gouvernement demandait aux complémentaires santé de contribuer aux coûts de la crise sanitaire, se lançant donc un nouveau bras de fer avec le secteur assurantiel.
Crise économique : le plus dur reste-t-il à venir ?
Après des mois de confinement dus à la pandémie du Covid-19, et la sortie de l’état d’urgence sanitaire le 10 juillet 2020, beaucoup s’accordent à dire que nous sommes à l’aube d’une crise économique d’ampleur. Les conséquences de la mise en pause de l’activité sur tout le territoire sont difficiles à quantifier tant elles sont multiples. Certains observateurs tentent de rassurer l’opinion publique, à l’instar de la Banque de France qui a fait état de résultats moins négatifs qu’anticipés sur l’économie française à la sortie de la quarantaine. De plus, elle anticipe un rebond important au troisième trimestre, ce qui permettrait de limiter les dégâts.
Pour autant, si quelques chiffres sont encourageants, de nombreux spécialistes affirment également que nous n’en serions qu’au commencement d’une crise économique inévitable. Augmentation des prix généralisée – et notamment dans l’immobilier –, recul du PIB, plans sociaux à venir, baisse du pouvoir d’achat et hausse significative du chômage : tout cela constitue une menace imminente pour la France. De plus, la crise sanitaire que nous avons connue a également eu de lourdes conséquences sur le moral des Français et leur confiance envers les dirigeants et l’avenir économique du pays.
Un récent sondage Odoxa pour Challenges, BFM Business et Aviva révèle que 76 % des Français estiment qu’une taxe spécifique pour les personnes touchant plus de 6 000 euros par mois et/ou pour les personnes dont le patrimoine immobilier et financier se chiffre à 500 000 euros serait une solution pour pallier les dégâts de la crise économique. Ainsi, les lueurs d’espoir mises en avant en ce début d’été pourraient donc finalement rapidement s’éteindre. La crise économique pourrait bien se coupler à une crise sociale.
Par ailleurs, dans le domaine de l’assurance, la hausse du chômage inquiète le secteur. Selon la Banque de France, le taux de chômage pourrait augmenter jusqu’à atteindre les 11,5 % d’ici l’année prochaine. Un chômage qualifié de « bombe à retardement » par Les Échos.
Les économistes sont encouragés par les chiffres de la consommation qui, selon l’Insee, a affiché une hausse de 36 % au mois de mai par rapport à avril. De plus, les Français auraient épargné quelque 55 milliards d’euros durant la période de confinement selon un rapport récent de l’Observatoire français des conjonctures économiques – ou OFCE.
Covid-19 les craintes du secteur assurantiel face à la hausse du chômage
Mi-juin 2020, alors que le secteur de l’assurance était au cœur de négociations avec le gouvernement sur le sujet de leur participation au financement du domaine de la santé, les assureurs concernés par ce marché sonnaient l’alerte. Une nouvelle tension entre assureurs et gouvernement par ailleurs, alors que ce dernier appelle le secteur assurantiel à se joindre à l’effort national, estimant que les assureurs auraient a priori réalisé des économies durant la période de confinement grâce à la baisse des dépenses liées à la santé. Un argument souvent accueilli avec froideur par les assureurs, qui estiment avoir aussi subi de plein fouet l’impact de la crise du Covid-19, mais aussi que certaines dépenses n’ont pas été éliminées, mais simplement reportées.
L’inquiétude des assureurs est nourrie par l’anticipation des plans sociaux annoncés – et à venir –, c’est-à-dire à la suppression massive d’emploi, rapporte Les Échos. La conséquence pour les assureurs ? Une augmentation significative de leurs dépenses concernant la couverture des salariés licenciés en raison de la crise économique. Comme le rappelle le journal, une personne peut continuer à profiter de sa complémentaire santé professionnelle, jusqu’à un an après son licenciement.
Jean-Laurent Granier, président-directeur général de Generali France, explique ainsi : « Le dispositif de portabilité va trouver, beaucoup, beaucoup plus à s’appliquer dans la crise actuelle qu’avant. Je suis un peu surpris de voir que ce dispositif n’est pas évoqué par le gouvernement. Il est essentiel et protège les salariés mais il va coûter cher aux assureurs ». Un constat accompagné d’une prévision chiffrée de Marie-Laure Dreyfuss, déléguée générale du Centre technique des institutions de prévoyance – CTIP : « Avec un taux de chômage annoncé à 11 % cette année, le coût de la portabilité pourrait être de 750 millions d’euros pour les institutions de prévoyance, à répartir sur 2020 et 2021. Le coût habituel de la portabilité va être multiplié par trois ce qui n’avait évidemment pas été anticipé dans les tarifs », explique-t-elle aux Échos.
Face à la crise, les mutuelles de santé se sont mobilisées à travers de multiples initiatives : plans de solidarité, services de garde d’enfants ou même de soutien psychologique, mise en place de dispositifs spéciaux, et ainsi de suite. Pour autant, alors que se déroule le Ségur de la santé, et que la colère des personnels soignants se fait entendre, la situation semble complexe et les problèmes loin d’être résolus.
L’effort du secteur de l’assurance durant la crise a été chiffré à 3,2 milliards d’euros, a indiqué la Fédération française de l’assurance – ou FFA. De nombreux engagements ont été pris afin d’aider les consommateurs, et en particulier les entreprises les plus fragilisées par la crise.