Assurance emprunteur : l’ouverture à la concurrence profite-t-elle aux consommateurs ?

Assurance emprunteur : l’ouverture à la concurrence profite-t-elle aux consommateurs ?

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Depuis dix ans, le marché de l’assurance emprunteur se métamorphose, bien qu’il soit encore toujours dominé par les banques. Grâce à la publication d’un bilan par le Comité consultatif du secteur financier, l’on dispose désormais d’informations complémentaires sur l’évolution du secteur, et sur les difficultés persistantes empêchant une véritable ouverture du marché à la concurrence.

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  • En bref : Quel bilan pour le marché de l’assurance emprunteur ?
  • Le marché de l’assurance emprunteur connaît une lente métamorphose depuis maintenant dix ans ;
  • Depuis la loi Lagarde en 2010, le marché de l’assurance emprunteur s’ouvre à la concurrence ;
  • Les consommateurs peuvent choisir une assurance de crédit immobilier différente que celle de la banque prêteuse, mais également résilier plus facilement leur contrat et ainsi, opter pour une offre alternative s’ils le souhaitent ;
  • Dans les faits, cependant, les banques dominent toujours le marché ;
  • Malgré tout, dans son dernier bilan, le CCSF indique que les contrats d'assurance emprunteur ont connu une baisse tarifaire allant de 10 % à 40 % en dix ans, sans impacter négativement le niveau de garanties proposé aux assurés.

Marché de l’assurance emprunteur : une lente métamorphose

Le sujet de l’assurance emprunteur revient régulièrement dans les discussions ces derniers mois. Pendant un temps, l’espoir que celle-ci devienne résiliable à tout moment a dominé l’actualité, en raison du projet de loi ASAP (pour Action et Simplification de l’Action publique), dont un amendement prévoyait la résiliation par l’emprunteur à « la date anniversaire de l’offre de prêt, ou toute autre date d’échéance prévue au contrat ». Finalement, après saisi, le Conseil constitutionnel a invalidé un certain nombre d’articles votés précédemment, dont celui concernant la résiliation de l’assurance emprunteur. En définitive, rien n’a changé. La loi ASAP a été publiée le 8 décembre 2020 au Journal officiel.

En attendant les prochaines évolutions législatives du monde de l’assurance, la publication d'un document par le Comité consultatif du secteur financier – ou CCSF – en novembre 2020 est venue apporter de nouvelles informations et analyses sur ce marché. Son bilan sur l’assurance emprunteur, basé sur un rapport réalisé par le cabinet indépendant Actélior, est en effet éclairant.

Rappelons que ces dix dernières années, plusieurs lois ont considérablement métamorphosé le marché assurantiel et sa libéralisation. Quelques dates clés sont à connaître :

  • 2010 : loi Lagarde, soit une réforme du crédit à la consommation qui a permis l’ouverture du marché de l’assurance emprunteur à la concurrence ;
  • 2014 : loi Hamon, pour le droit des consommateurs, permettant la facilitation de la résiliation du contrat d’assurance ;
  • 2018 : amendement Bourquin, lequel donne la possibilité de résilier et de changer d’assurance emprunteur à la date anniversaire de la signature du contrat.

Faciliter la résiliation de l’assurance emprunteur avait ainsi pour but de donner davantage de choix aux assurés, afin qu’ils puissent opter pour une solution assurantielle plus avantageuse quand l’occasion se présente. En cela, la renégociation annuelle des contrats à date fixe a un rôle clé, puisqu’elle simplifie les démarches.

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En dix ans, le marché de l'assurance emprunteur a beaucoup changé.

Néanmoins, une fois les lois votées, faut-il encore que leur mise en application se concrétise. Par exemple, lors de la souscription à un prêt immobilier, les consommateurs sont libres d’opter pour l’assureur de leur choix. Traditionnellement, l’on souscrit à l’assurance de sa banque prêteuse, souvent parce que l’on ignore qu’il est possible de faire autrement. Et, encore aujourd’hui, beaucoup ne savent pas que l’on peut facilement en changer après souscription. La mauvaise volonté des banques pour en informer leurs clients est soulignée régulièrement. Voire, dans certains cas, celles-ci refusent catégoriquement les demandes de délégations de la part des consommateurs.

Pour autant, bien que les banques aient du mal à laisser d’autres acteurs venir s’inviter sur le marché de l’assurance emprunteur, cela ne signifie pas que les choses n’ont pas changé. L’arrivée prochaine d'une nouvelle offre assurantielle par l’assurtech Luko est par exemple un signal fort, indiquant que la concurrence est vouée à grandir et à se moderniser.

La libéralisation du marché est également visible dans les chiffres. Selon le bilan du CCSF, on relève une baisse tarifaire allant de 10 % à 40 % sur les contrats emprunteur, les contrats groupes bancaires ou les contrats dits alternatifs (comprendre les contrats internes distribués par les banques, ou les contrats externes distribués par l’intermédiaire de délégations d’assurance, précise le CCSF).

Le bilan du CCSF a été réalisé auprès d’assureurs externes, d’intermédiaires, de réseaux bancaires et de bancassureurs qui représentent 96,5 % des contrats du marché, indique le Comité.

Assurance emprunteur et libéralisation du marché : on en est où ?

Pour le CCSF, le bilan montre que les consommateurs sont aujourd’hui « les principaux bénéficiaires » de cette ouverture à la concurrence, « avec notamment des tarifs réduits et des garanties renforcées ». Plusieurs informations importantes relatives à ces évolutions sont ainsi détaillées dans le document du Comité, que nous allons prendre le soin de résumer ci-dessous :

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Comment les changements législatifs impactent-ils le marché assurantiel en 2020 ?
  • La part des contrats alternatifs en hausse : aujourd’hui, ces contrats représentent 25 % du marché global. Et, concernant les 30-45 ans, soit le public avec le plus grand nombre de contrats souscrits, cette part monte jusqu’à 40 % selon les réseaux bancaires ;
  • Les tarifs ont globalement baissé : pour les contrats emprunteurs, contrats groupes bancaires ou contrats alternatifs, les tarifs ont énormément diminué, « avec des baisses allant de 10 % à 40 % » sur dix ans. Et cela n’aurait pas impacté le niveau de garanties, voire, dans certains cas, ces dernières ont même été renforcées. Le CCSF estime donc que cela est « au bénéfice de la majorité des emprunteurs » ;
  • Les banques dominent encore le marché : malgré l’ouverture à la concurrence, comme nous l’indiquions précédemment, les banques continuent de représenter la part la plus importante du marché. Le CCSF indique que cela a été permis entre autres grâce à la mise en place de stratégies de leur part, « en pratiquant parfois un alignement sur le prix du contrat alternatif externe ou en développant leurs propres contrats alternatifs internes ». De plus, les banques ont une relation privilégiée avec le client, puisque c’est auprès d’elles que le consommateur souscrit à son crédit.

Pour le Comité consultatif du secteur financier, il est cependant important de nuancer la baisse des tarifs. Il est ainsi précisé que « les contrats alternatifs affichent très souvent de fortes segmentations et leurs courbes de tarifs moyens – de moins de 70 € à plus de 1 000 € par an – correspondent à la prise de risque âge par âge, fonction de la catégorie socioprofessionnelle ou encore du caractère fumeur/non-fumeur. En revanche, les contrats groupes bancaires continuent dans leur grande majorité à afficher des tarifs moyens assez concentrés, entre 200 € et 400 € même si on constate une baisse des tarifs sur les moins de 40 ans et une hausse pour les plus de 50 ans, ce qui pousse certains opérateurs à évoquer le risque de démutualisation. »

De plus, et cela est crucial, bien que les taux d’acceptation des demandes de délégation d’assurance soient aujourd’hui très élevés, le CCSF rappelle que les taux de concrétisation sont en fait variables selon les acteurs du marché assurantiel. Ces taux sont importants pour « les plateformes spécialisées qui ont investi des sommes importantes dans l’industrialisation de cette activité, et extrêmement faibles pour les courtiers et acteurs décentralisés ».

Enfin, le dispositif semble encore trop complexe à ce jour – notamment concernant les modalités de tarifications –, et certaines de ces difficultés viennent compliquer les démarches. L’organisation interne des banques pour le traitement des demandes de substitution est notamment pointée du doigt par 85,7 % des assureurs et grossistes. De plus, les assureurs et intermédiaires alternatifs soulignent également que les banques ne jouent pas le jeu, puisqu’il arrive fréquemment qu’elles ne fournissent pas les informations nécessaires en cas de demande de substitution.

Dans un communiqué, la Fédération bancaire française – ou FBF – estime que malgré tout, « le rapport du CCSF confirme que c’est un marché concurrentiel, sur lequel les différentes offres, y compris celles des bancassureurs, se développent et évoluent, dans l’intérêt des clients ».

Crédit immobilier : les taux sont à la baisseD’après les données de l’Observatoire Crédit Logement/CSA, en novembre 2020, les taux moyens des crédits immobiliers étaient à 1,20 %. Depuis juin dernier, les taux d’intérêt d’emprunt sont en baisse continue. Ces taux bas participent à la vitalité du marché du crédit immobilier, malgré la crise sanitaire et économique actuelle. Pour autant, obtenir un prêt immobilier est de plus en plus difficile, en raison du resserrement des conditions d’accès par les banques depuis décembre 2019. Cela fait suite à la demande du Haut Conseil de Stabilité financière – ou HCSF –, lequel voulait limiter le nombre de prêts accordés à des ménages non solvables. Les taux bas des crédits ne profitent donc pas à tout le monde.

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