Fin du tarif réglementé du gaz : les Français toujours protégés face à la hausse des prix ?

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Le 1er juillet 2023 marquera la fin du tarif réglementé de vente du gaz. Cette offre tarifaire était une référence pour définir les prix de vente du gaz aux particuliers. Que faut-il attendre de sa disparition ? Sans valeur de référence, peut-on craindre une montée des prix, ou encore la fin du bouclier tarifaire gouvernemental, déployé en 2021, et qui limite la hausse des prix de l’énergie à 15% ?

Fin du tarif réglementé de gaz et impact sur le bouclier tarifaire

Le tarif réglementé de vente de gaz naturel (TRVG) est un tarif fixé par les pouvoirs publics, sur proposition de la Commission de Régulation de l’Énergie (CRE), selon plusieurs paramètres tels que :

  • Les coûts de production : fourniture, distribution, transport, stockage, etc ;
  • Le prix sur les marchés de gros ;
  • Une marge raisonnable ;
  • Les taxes.

Le 17 juin 2017, le Conseil d’État jugeait le TRVG contraire au droit européen, puisqu'allant à l’encontre du processus de libéralisation du marché du gaz. Sa disparition définitive est ainsi programmée au 1er juillet 2023. Jusqu'à présent, il demeurait le référentiel prioritaire des fournisseurs alternatifs concurrents, qui pouvaient - pour certains - s'indexer à ses prix, afin de proposer des offres compétitives. Sa disparition n’est donc pas la conséquence de la crise énergétique que traverse l’Europe depuis 2021.

De son côté, le bouclier tarifaire, lancé par le Gouvernement fin 2021 pour limiter les effets de la crise énergétique sur les factures de gaz des ménages français, repose sur le gel de ce fameux TRVG. Depuis son déploiement, les prix du gaz sont ainsi bloqués et ne suivent plus les mouvements du marché de gros, ce qui évite des hausses de prix du gaz trop importantes. Au 1er janvier dernier, le TRVG a augmenté de "seulement" 15% grâce au dispositif. D'après le Gouvernement, cela se traduit par une hausse moyenne des factures de gaz des Français de l'ordre de 20 euros par mois au lieu de 180 sans bouclier tarifaire.

On pourrait donc penser que la fin du tarif réglementé de vente du gaz implique la fin du bouclier tarifaire, ce n’est pourtant pas nécessairement le cas. En effet, une nouvelle reconduction de cette mesure anti-inflation n’est pas exclue en cas de flambée des prix de l’énergie cet été, et ce même après la disparition du TRVG au 1er juillet 2023. Le projet est actuellement étudié par le Gouvernement et la CRE.

“Il est important de noter que le bouclier tarifaire pourra continuer à s’appliquer après la fin des TRVG conformément à la loi de finances 2023 donnant au Gouvernement le pouvoir de prolonger par décret le bouclier tarifaire après le 30 juin 2023 jusqu’au 31 décembre 2023”, a tenu à rassurer la CRE dans sa délibération du 25 janvier 2023, portant sur l’échéance finale du tarif réglementé de gaz.

Quelles conséquences pour les prix du gaz en France ?

Ce qui fait l’ADN de cette offre tarifaire réglementée est son encadrement rigoureux par le ministère chargé de la Transition Écologique, le ministère de l'Économie et la CRE, garantissant le contrôle des conditions contractuelles et tarifaires.

Cependant, au 30 novembre 2022, sur les 11 millions de foyers raccordés au réseau de gaz, seulement 2,4 millions de clients étaient concernés par une offre à tarif réglementé, d’après la CRE. La majorité des consommateurs s’étaient alors déjà tournés vers d’autres fournisseurs de gaz proposant des offres non régies par le tarif réglementé mais s’y indexant, pour être commercialement intéressantes. L’offre est d’autant plus limitée qu’elle n’est proposée que par Engie - fournisseur historique de gaz - et quelques Entreprises locales de distribution (ELD) de gaz et ne peut désormais plus être souscrite.

Les consommateurs ayant des forfaits basés sur le tarif réglementé se verront par ailleurs proposer une offre de bascule par Engie et les ELD. L'offre proposée par Engie devra répondre aux critères suivants d'après la CRE :

  • Les conditions contractuelles doivent permettre à la concurrence de s’exercer efficacement et ne pas être de nature à verrouiller le marché ;
  • Le contrat ne devra pas présenter de durée excessive ;
  • Les modalités pour quitter le contrat ne devront pas être contraignantes : elles doivent notamment inclure des clauses de résiliation sans frais, à tout moment et sans préavis sur l'initiative du client ;
  • À l’issue de la première année du contrat, les conditions du contrat, à l’exception de la durée du contrat et des modalités de résiliation sur l’initiative du client, pourront évoluer ;
  • L’information accompagnant l’envoi de cette offre devra être la plus neutre possible et n’en faire aucunement la promotion.

Les caractéristiques des offres de bascule pour les ELD devraient quant à elle être validées par la CRE dans les prochaines semaines.

“Pour les consommateurs finals domestiques consommant moins de 30 mégawattheures par an (MWh/an) ainsi que pour les propriétaires uniques d'un immeuble à usage principal d'habitation consommant moins de 150 MWh/an et les syndicats des copropriétaires d'un tel immeuble, les fournisseurs de gaz naturel doivent communiquer ces nouvelles conditions contractuelles à leurs clients au plus tard le 15 avril 2023”, précise dans sa délibération la CRE.

Les associations de consommateurs s’inquiètent

Certaines associations de consommateurs restent toutefois inquiètes quant à la gestion des tarifs après la fin du TRVG au 1er juillet prochain. Elles craignent un impact sur les prix du gaz ainsi que sur l’application du bouclier tarifaire.

L'Association nationale de défense des consommateurs et usagers (CLCV) a ainsi adressé le 10 janvier 2023 un courrier à Emmanuel Macron pour demander le report de cette échéance. L’association estime en effet que le tarif réglementé restent une protection importante pour les Français, pour deux raisons :

  • Le TRVG assure une parfaite sécurité contractuelle aux 2,4 millions de ménages encore concernés, en comparaison avec les offres de marché jugées “toxiques” par la CLCV ;
  • Sans tarif réglementé, la protection du bouclier tarifaire est amoindrie. En effet, l’adossement des offres de marché sur le TRVG “induit une balise concrète pour le bouclier tarifaire”, et il est peu probable que l’indice statistique publié par le régulateur après la disparition du tarif réglementé ait les mêmes propriétés d’après l’association.

“Le tarif réglementé cessera bien sûr d’être la référence concrète d’indexation de nombreuses offres de marché”, craint ainsi la CLCV. L’association y voit un risque de hausse et d’instabilité des prix des offres pour les particuliers, problème auquel doivent déjà faire face les copropriétés et les petits professionnels.

Lors de la consultation de la CRE sur la mise en application de la fin des tarifs réglementés, des associations de consommateurs présentes lors des débats ont également appelé à une transition claire, afin d’aider les Français à suivre l’évolution des prix malgré la suppression du TRVG. “Les associations de consommateurs considèrent qu’il est préférable d’utiliser une référence de coûts d’approvisionnement reflétant les variations court terme des marchés de gros afin d’assurer une continuité avec la formule des TRVG, et de faciliter la compréhension des consommateurs”, précise ainsi la CRE dans sa délibération du 25 janvier 2023.

Un indice de prix du gaz maintenu par la CRE

Pour répondre à ces inquiétudes, la CRE prévoit de poursuivre ses estimations des prix HT de référence du gaz pour les clients résidentiels, afin d’établir un indice utile aux consommateurs comme aux fournisseurs d’énergie.

Cet indice pourra servir de point de référence aux fournisseurs de gaz, bien que ce ne soit pas une obligation. Ces prix de référence serviront principalement à stimuler les propositions commerciales auprès des consommateurs, en envoyant une information claire aux clients qui souhaitent faire jouer la concurrence entre les fournisseurs de gaz.

Dans le cas où le bouclier tarifaire serait reconduit après le 30 juin 2023, ce même indice de prix servira à nouveau de référence. La commission évoque ainsi une “proposition de formule de référence des coûts d’approvisionnement en gaz” permettant de calculer la compensation à verser aux fournisseurs d’énergie et donc le plafonnement d’une éventuelle hausse des prix du gaz.

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