Le vol du Louvre révèle une faille insoupçonnée : nos trésors… ne sont pas assurés

Le vol du Louvre révèle une faille insoupçonnée : nos trésors… ne sont pas assurés

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C’est un scénario qu’on croyait réservé aux films de casse : ce dimanche 19 octobre, le Louvre s’est fait voler une partie de ses bijoux de la Couronne en plein jour. En moins de sept minutes, une équipe ultra organisée a fracturé la Galerie d’Apollon et disparu à scooter, laissant derrière elle une salle dévastée et une question vertigineuse : qui paie quand un trésor inestimable s’évapore ? Et surtout, que se passerait-il si c’était chez vous ?

Dimanche 19 octobre, premier week-end des vacances de la Toussaint. Vers 9 h 30, deux scooters T-Max s’arrêtent quai François-Mitterrand, suivis d’un camion élévateur. Trois ou quatre individus enfilent des gilets jaunes, déploient une échelle contre la façade de l’aile Denon et, à la disqueuse, fracturent une fenêtre. En moins de sept minutes, ils atteignent la Galerie d’Apollon, section mythique abritant les joyaux de la Couronne.

Les alarmes retentissent, les gardiens sont pris de vitesse, les vitrines sciées, neuf bijoux disparaissent. À 9 h 40, les voleurs sont déjà dehors. Dans leur fuite, ils abandonnent la couronne de l’impératrice Eugénie, retrouvée abîmée un peu plus tard. Le Louvre ferme ses portes pour la journée. Rachida Dati parle d’une « attaque contre notre patrimoine », Emmanuel Macron dénonce une « atteinte à un patrimoine que nous chérissons ».

Au-delà du choc, une question persiste : qui paie quand des bijoux inestimables sont volés ?

🏛️ Les musées publics : un patrimoine mythique… qui n’est pas assuré

C’est une réalité peu connue du grand public : les œuvres d’art des musées publics français ne sont pas assurées contre le vol. En France, l’État s’auto-assure.

Concrètement, lorsqu’une œuvre du Louvre, d’Orsay ou du Centre Pompidou est endommagée, la restauration est financée sur fonds publics. Mais si elle est volée ou détruite, aucune indemnisation privée ne vient compenser la perte. C’est une "perte sèche" pour la collectivité.

Pourquoi ? Parce qu’assurer l’ensemble des collections nationales coûterait une fortune. Le seul inventaire des musées de France compte plus de 120 millions d’œuvres. Et la plupart sont inestimables : fixer un prix serait aussi absurde qu’impossible. Le ministère de la Culture estime qu’une assurance intégrale représenterait des milliards d’euros de primes annuelles, pour un risque jugé faible.

En clair, l’État prend le pari du risque calculé : il entretient et sécurise ses musées, mais assume les pertes éventuelles. « C’est un mode de gestion en bon père de famille », explique Irène Barnouin, spécialiste assurance art chez WTW. « En cas de dégradation, l’État paiera les restaurations, mais pour un vol, c’est une disparition définitive. »

🖼️ Les exceptions : le prêt et l’assurance clou à clou

Une exception existe : lorsqu’une œuvre sort temporairement d’un musée, elle est automatiquement couverte.

La convention de prêt impose à l’emprunteur de souscrire une assurance clou à clou, qui couvre l’œuvre du décrochage à son retour. C’est pour cette raison que certaines pièces, jugées trop précieuses ou fragiles - comme les Joyaux de la Couronne ou la Joconde - ne quittent jamais le Louvre.

Certaines institutions privées, comme la fondation Louis Vuitton ou encore la Collection Pinault, complètent aussi leur couverture avec une assurance qui indemnise jusqu’à un montant plafonné, bien inférieur à la valeur réelle de la collection (par exemple 50 ou 100 millions d’euros pour un ensemble valant plusieurs milliards). Mais ces contrats sont rares, coûteux et négociés au cas par cas avec des acteurs spécialisés comme Axa XL, Helvetia, Hiscox ou Liberty Specialty Markets.

💰 Mettre un prix sur l’inestimable : le casse-tête des assureurs

Assurer un bijou impérial ou un chef-d’œuvre, combien ça vaut ? Dans le marché privé, la réponse dépend de la cote de l’artiste et du prix d’adjudication. Les assureurs s’appuient sur des bordereaux de vente, des expertises ou des catalogues de maisons comme Sotheby’s ou Christie’s.

Mais pour les musées, le marché n’existe pas. Les œuvres n’ont jamais été vendues, donc aucune référence de prix. C’est l’institution elle-même qui détermine la valeur d’assurance, en s’appuyant sur ses conservateurs et ses experts internes. Et cette valeur ne fait généralement pas débat : les assureurs « font confiance à la connaissance scientifique des musées », explique Barnouin.

Pour une œuvre iconique comme La Joconde, la question ne se pose même plus. Le tableau est juridiquement inestimable : aucun contrat ne pourrait compenser sa disparition. En cas d’incident, l’État financerait la restauration, mais le concept de remboursement n’a pas vraiment de sens.

🔒 Des vols de plus en plus audacieux

Le casse du Louvre s’inscrit dans une série de cambriolages qui inquiètent le monde muséal. Ces derniers mois, plusieurs musées français ont été touchés : Adrien Dubouché à Limoges, Cognacq-Jay, le Muséum d’Histoire naturelle de Paris…
Dans tous les cas, les cibles étaient les mêmes : or, métaux précieux, gemmes, des biens faciles à fondre ou à écouler. Les experts évoquent un effet combiné de crise économique et de hausse du prix de l’or, qui rendent ces objets plus attractifs pour le grand banditisme.

💍 Et pour vos bijoux à vous ?

Les musées ne sont pas indemnisés, mais les particuliers, eux, peuvent l’être. Le vol de bijoux à domicile est couvert par la garantie Vol des contrats multirisque habitation. Problème : la couverture dépend du type de vol, du montant des biens et des justificatifs fournis.

Pour être indemnisé, il faut d’abord porter plainte immédiatement puis déclarer le sinistre à l’assureur dans les 48 heures. Les compagnies exigent une preuve de propriété (factures, certificats d’authenticité, photos, inventaire notarié…). Même sans facture, des photos datées de vous portant les bijoux ou un rapport d’expertise peuvent suffire.

L’indemnisation se calcule ensuite selon la valeur déclarée (celle inscrite dans le contrat) ou la valeur agréée (fixée après expertise). En revanche, si les bijoux n’ont jamais été déclarés, la compensation peut être dérisoire… voire totalement nulle.

À l’extérieur du domicile, la protection se restreint encore : un vol avec violence peut être pris en charge, mais un vol à la tire ou à l’arraché ne l’est presque jamais sans extension spécifique.

💡 À noter

La garantie Vol n’est pas forcément incluse dans tous les contrats : souvent optionnelle, elle ne couvre pas les assurés qui ne l’auraient pas souscrit. Et certains assureurs ne prennent pas en charge les objets dits précieux dans cette garantie : par exemple, pour des bijoux d’une certaine valeur, la protection peut être conditionnée à la souscription d’une garantie spécifique, type Objets de valeur.

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🧠 Comment mieux se protéger

Les assureurs recommandent de stocker les bijoux de valeur dans un coffre-fort homologué, d’installer une alarme reliée, et de ne pas laisser les justificatifs dans le logement.

Photographier régulièrement ses bijoux, conserver les factures et faire évaluer leur valeur tous les deux ou trois ans permet aussi d’ajuster les plafonds de garantie.

💡 BON À SAVOIR Les contrats multirisques prévoient souvent un plafond global pour les objets précieux (5 000 à 10 000 € par exemple), qu’il est possible de rehausser via l’option Objets de valeur.

🧾 En résumé

  • Le Louvre, comme la majorité des musées publics, ne sera pas indemnisé : l’État s’auto-assure et assumera seul la perte.
  • Les musées privés, eux, sont couverts par des polices spécialisées.
  • Et les particuliers, s’ils respectent les démarches et disposent des preuves nécessaires, peuvent espérer un remboursement… dans les limites de leur contrat.

Ce casse express rappelle une vérité simple : qu’il s’agisse d’une couronne impériale ou d’une bague de famille, le risque zéro n’existe pas. Autant vérifier, dès aujourd’hui, ce que votre assurance promet vraiment avant de découvrir, trop tard, qu’elle ne couvre qu’une partie de vos trésors.

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