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Pénurie de gaz, délestages, conversion : ce que les industries françaises pourraient affronter cet hiver

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Engagée dans un accord européen visant à réduire de 15% les besoins en gaz de l’UE, la France organise un plan de bataille en vue d’atteindre cet objectif. Elle demande notamment aux industriels de proposer des solutions pour réduire leur consommation. Au risque de subir des coupures de gaz en cas de pénurie cet hiver.

28% du gaz consommé par les industries énergo-intensives

Depuis des mois, le terme de “sobriété énergétique” est martelé quotidiennement. Impossible d’échapper à l’économie d’énergie au moment où toute l’Union Européenne craint une pénurie de gaz dès l’hiver prochain.

Les industriels devraient jouer un rôle décisif dans cette politique prévisionnelle. À l’heure actuelle, 28% du gaz est consommé par les industries énergo-intensives en France. Le ministère de l'Économie, des Finances et de la Relance a clairement fait comprendre à l’ensemble des industriels que l’objectif de réduction de 15% de consommation de gaz entre août 2022 et mars 2023 les concernaient en priorité.

Plusieurs secteurs sont donc appelés, dès à présent, à prendre en compte cette urgence. Le 10 juillet dernier lors des 22ème Rencontres économiques d'Aix-en-Provence, plusieurs chefs d’entreprises ont assuré qu’ils étaient prêts à participer à l’effort national afin d’éviter le point de rupture. La France s’approvisionne en gaz à raison de 17% auprès de la Russie. Si le pays décide de couper totalement ses exportations vers l’Union Européenne, ce manque ne pourra être compensé.

“Je pense que la rupture totale de l'approvisionnement de gaz venu de Russie est une vraie possibilité (..) et nous devons nous préparer à cette option”

A rappelé Bruno Le Maire, le ministre de l’Economie, des Finances et de la Relance lors de cette rencontre avec des chefs d’entreprise. Le message est clair.

Ces industries menacées par le délestage

Les industries les plus énergivores sont donc appelées à faire un effort dès à présent. Dans le cas contraire, elles pourraient subir d’importants délestages en cas de pénurie avérée de gaz durant l’hiver 2022.

Les stocks de gaz de la France sont actuellement remplis à hauteur de 79,35%, d’après les dernières données de l’Agregated Gas Storage Inventory (AGSI) établies le 1er août 2022. L’objectif est d’atteindre les 100% de capacité d’ici le mois de novembre pour répondre à la demande hivernale. L’économie d’énergie est donc une urgence que les industries ne peuvent contourner.

Le gouvernement et les acteurs principaux de ce type d’industries, réfléchiraient déjà à une liste de secteurs estimés non prioritaires. Ces industries désignées pourraient être concernées par les opérations de délestages afin d’assurer les besoins en gaz de celles dites “essentielles”. Les industries liées à la santé, l’alimentation ou encore à la défense nationale pourraient être priorisées, a expliqué Nicolas de Warren, président de l'Union des industries utilisatrices d'énergie (Uniden) lors d’une intervention sur la chaîne BFM Business.

D’autres entreprises, qui pourraient tenir le choc en cas de rupture d’approvisionnement de gaz, seraient concernées par des coupures. Les industries qui ont les stocks nécessaires pour terminer l’année pourraient tout à fait subir des délestages. Mais aussi, les cimenteries qui ont l’option d’utiliser des stocks de combustible solide de récupération (CSR). Il s’agit de gros granulés obtenus à partir des déchets non dangereux. Les productions de métaux et de verre pourraient, quant à elles, être considérées comme moins urgentes.

Mais là encore, si ces industries peuvent survivre à un délestage, elles en paieraient de lourdes conséquences sur le long-terme. Les fabricants de verre européens ont exprimé leurs craintes de voir leur production et les chaînes d'approvisionnement compromises par une pénurie de gaz. Les cimentiers font leur possible pour cumuler des CSR, mais la perte de gaz impactera quoi qu’il arrive leur productivité.

Les 5 000 entreprises françaises identifiées par le décret du 8 avril 2022 et dont la consommation dépasse cinq gigawattheures par an ont été interrogées pour savoir quel impact aurait une opération de délestage sur leur production. Le questionnaire transmis par les préfectures permettra de savoir si cette option est envisageable et sur quelle durée.

Les industries françaises se tournent vers d’autres sources d'énergie

Si de nombreux acteurs des industries énergo-intensives se sont engagés à participer à l’effort européen, ils tentent en parallèle de trouver des alternatives pour ne pas trop ralentir leur production.

C’est le cas de Michelin, producteur de pneumatiques. Florent Menegaux, président du groupe français, expliquait depuis Aix-en-Provence à Reuters que leurs unités de production européennes avaient fait le choix de convertir leurs chaudières afin qu’elles fonctionnent aussi bien au gaz qu’au pétrole. Comme le géant du pneumatique, d’autres industriels ont pensé à ce procédé, pour ne pas dépendre du gaz et se tourner vers le pétrole en cas d’urgence.

L’électricité est aussi une alternative, mais très limitée. Puisqu’il faut rappeler qu’une partie de l'électricité utilisée en France est produite à partir de gaz. Or l’électricité est également un problème. EDF rencontre d’importantes difficultés sur son parc nucléaire. A l’heure actuelle 27 réacteurs sur 56 sont à l’arrêt. La production d’électricité par le nucléaire est donc à un niveau très bas.

Le gouvernement français tente des plans de sauvetage, notamment en levant certaines contraintes subies par la production d’énergies renouvelables. Agnès Pannier-Runacher, la ministre de la Transition énergétique a annoncé le 28 juillet plusieurs mesures d'urgence pour booster la production d’énergies renouvelables. L’électricité produite par les parcs éoliens fait désormais partie des priorités de la France.

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