S. Royal sur le renouvellement des concessions hydroélectriques

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A l’occasion du renouvellement de 150 concessions hydroélectriques d’ici 2023, le gouvernement entend ne pas laisser les mains libres au secteur privé. La ministre en charge de l’énergie a déclaré vouloir promouvoir le développement de sociétés d’économie mixte. Nouveau coup de frein dans l’épineux dossier de la mise en concurrence des concessions hydroélectriques, ou tentative de compromis ?

Fin des concessions pour 25% de la production d’électricité française

2023 est une date clé du calendrier des principaux fournisseurs d’électricité en France. En effet, à cette date, 25% des concessions hydrauliques de l’hexagone seront arrivées à échéance, et devront être renouvelées. Cette mesure concerne un parc hydroélectrique actuel qui comporte environ 400 barrages, pour une production annuelle totale d’électricité autour de 60 TWh. A titre de comparaison, les centrales nucléaires françaises produisent 400 TWh par an. Ces barrages font l’objet de concessions de long terme. La libéralisation du marché de l’électricité (loi NOME) de 2010 perturbe le renouvellement de ces permis d’exploitation au bénéfice de leurs anciens détenteurs : désormais, les fournisseurs historiques doivent être mis en concurrence pour l’exploitation des barrages français. Pour le moment, EDF exploite 80% de ces barrages. Electrabel (groupe Engie) et la Compagnie Nationale du Rhône (détenue à parité entre l’Etat et GDF Suez) opèrent les 20% restants.

Le feuilleton du renouvellement des concessions hydro-électriques

Suite à la suppression en 2006 du droit de préférence dont bénéficiait EDF, un rapport de 2006 sur le rapport sur le renouvellement des concessions hydro-électriques avait déterminé que 10 lots totalisant 49 barrages devaient être réattribués à l’horizon 2010 et, qu’à cette fin, il conviendrait de procéder à une mise en concurrence. Toutefois, aucun gouvernement n’a jamais franchi ce Rubicon. Un calendrier du renouvellement des concessions hydroélectriques a certes été publié par le ministère du développement durable et de l’énergie en 2010. Cependant, aussitôt arrivée au gouvernement en 2012, Delphine Batho déclarait qu’elle entendait revenir sur le principe de mise en concurrence des concessions hydroélectriques. Condamnée par la Cour des Comptes, cette position a été révisée par Philippe Martin, arrivé au ministère de l’écologie à la faveur du départ de sa prédécesseur. Fin 2013, le ministère du développement durable et de l’énergie, en étroite coopération avec le ministère de l’économie, relançait ainsi le dossier de la mise en concurrence des concessions hydroélectriques arrivées à échéance.

Déclarations de Ségolène Royal : nouveau rebondissement ou tentative de compromis ?

La ministre de l’Ecologie et de l’énergie a résolu de s’attaquer au problème mille fois retardé de la mise en concurrence effective des opérateurs des barrages hydroélectriques... A sa manière et sans pour autant renouveler un discours plutôt interventionniste. "La mise en concurrence pure et simple présente des risques pour l'intérêt général de la gestion de la ressource en eau, de l'équilibre écologique des vallées et des conditions de distribution de l'électricité"  a souligné Ségolène Royal, pour qui "il faut donc garder un contrôle public [sur les barrages]."
La ministre entend développer un système de sociétés d'économie mixte (SEM), au capital majoritairement public, sur le modèle de la Compagnie Nationale du Rhône. Jean-Jack Queyranne, président de la Région Rhône-Alpes, supporte cette solution et argue qu’elle permettrait de mieux prendre en compte les spécificités territoriales. Une solution que ne dénigre pas Marc Boudier, président de l'Association française indépendante de l'électricité et du gaz (Afieg), qui représente à ce titre plusieurs fournisseurs alternatifs. Avec cependant une nuance : si ces règles d’appels d’offres peuvent satisfaire un fournisseur alternatif, dans quelle mesure aurait-il le contrôle opérationnel de la société d’économie mixte, face à l’encombrant actionnaire qu’est l’Etat ? Des questions cruciales pour les fournisseurs, qui auront des éléments de réponse dans le projet de loi de programmation pour la transition énergétique, qui sera présenté cet automne à l’assemblée.

Des syndicats en embuscade

Pour conduire ce dossier à bon port, Ségolène Royal devra ménager les syndicats qui s’inquiètent de la fin du monopole d’EDF sur un secteur jugé rentable et stratégique pour le fournisseur historique. Dès lors, la solution de la SEM, qui maintient un contrôle public tout en ouvrant la voie aux investissements privés pourrait-elle se révéler une tentative de compromis... Suite du feuilleton, dans un prochain épisode...

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