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La Cour des Comptes demande une révision rapide de la régulation du marché de l'électricité

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La Cour des Comptes publie ce mardi 5 juillet 2022 un rapport qui remet en question l’organisation du marché de l’électricité français, organisé par la loi Nome depuis décembre 2010. En pleine crise de l’énergie, les sages de la rue Cambon soulignent des dysfonctionnements majeurs dans les processus de régulation publique du marché de l'électricité en France. Ils appellent à une réforme profonde de ces outils d’ici à fin 2023.

Le marché français de l’électricité « ni lisible, ni pilotable »

Depuis décembre 2010, le marché de l’électricité est organisé par la loi Nome. Cette loi était destinée à favoriser la libéralisation du marché électrique face à l’acteur historique, EDF. L’un des objectifs était alors de se conformer aux directives européennes de libre concurrence, tout en essayant de conserver des tarifs bas cohérents avec les coûts de production de l'énergie nucléaire d'EDF.

Mais le constat de la Cour est clair :

"La mise en œuvre combinée de ces différents outils aboutit à une organisation qui n’est plus ni lisible, ni pilotable, et qui ne garantit plus l’atteinte des objectifs initiaux"1.

En effet, depuis 2019 et encore plus fortement depuis le début de la guerre en Ukraine, les tarifs réglementés de vente (TRV) sont soumis à l’ « évolution des prix des marchés de gros ». Le risque est qu’ils s’éloignent de plus en plus des coûts de production d’électricité propres au parc français, rentabilisé de longue date par EDF. Pour preuve : la Cour rappelle que sans le bouclier tarifaire instauré début 2022, les TRV auraient augmenté de 35 % TTC au 1er février 2022, ce qui ne reflète pas le coût de production d'électricité nucléaire en France. Pour rappel, deux tiers des ménages français sont encore abonnés au TRV.

Selon la Cour des Comptes, il est donc devenu urgent de réformer rapidement cette politique d’intervention publique pour qu’elle continue à atteindre ses objectifs initiaux.

1Source : L’organisation des marchés de l’électricité, Cour des Comptes, 5 juillet 2022.

TRV, Arenh, mécanisme de capacités : les dispositifs pointés du doigt

La Cour préconise une réforme sur trois axes principaux.

Tout d’abord, elle appelle à repenser la méthode de calculs des tarifs réglementés de vente pour « limiter l’exposition de ces tarifs à de brusques variations de prix de marché ». Pour elle, le fonctionnement mis en place autour d’EDF dans le but d'ouvrir le marché à la concurrence a entraîné une hausse des prix de l’électricité, selon la Cour. EDF n’a plus les moyens de garantir l’alignement des prix avec ses coûts de production, alors que c’était l’objectif initial.

Par conséquent, la Cour pointe du doigt le mécanisme de l’Accès régulé au nucléaire historique (Arenh), dispositif visant à proposer un prix réduit sur une quantité annuelle d’électricité nucléaire produite dans le parc français aux industriels et aux fournisseurs alternatifs. La Cour souligne d'ailleurs que l’Arenh a permis à l’opérateur historique d’engranger ainsi des revenus « supérieurs de 1,75 milliard d’euros aux coûts complets de production entre 2011 et 2021 ».

Enfin, les sages dénoncent également le mécanisme de capacité, qui vise à garantir la sécurité d’approvisionnement durant les périodes de pointe hivernale en priorisant certains besoins de consommation sur d’autres. Ce dispositif devra être revalidé par la Commission européenne en 2026, ce qui requiert de s'y pencher dès aujourd'hui.

Un nouveau rapport d’évaluation des tarifs réglementés de vente de l’électricité en France doit être remis à la Commission européenne en 2025. C'est pourquoi la Cour préconise une réforme des outils de l’intervention publique sur le marché de l’électricité français d’ici à la fin 2023. Des délais serrés qui sont renforcés par la prévision d’envolée des prix de l’énergie et les difficultés d’approvisionnements pour le deuxième semestre 2022.

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