Le gouvernement bloque le prix de l'électricité au 1er août
Au 1ᵉʳ août, tous les ans, le tarif d’utilisation des réseaux publics d’électricité (TURPE) augmente pour prendre en compte l’inflation. Cette année, le gouvernement a décidé de le bloquer. Une décision politique populaire, mais qui ne sera pas sans conséquences.
Pas besoin du NFP pour bloquer les prix
Chaque année, la Commission de Régulation de l’Energie annonce quelques mois d’avance le niveau d’augmentation du TURPE pour le 1ᵉʳ août. L’an dernier, c’était le 7 juin.
Seulement, avec les élections législatives, le calendrier a été chamboulé, et la CRE a observé un silence surprenant sur une augmentation pourtant légale et habituelle. Enedis, et les ELD, sont en charge du service public de distribution d’électricité. RTE gère, quant à lui, le réseau de transport, schématiquement, les lignes à haute tension. À ce titre, ils sont rémunérés pour l’essentiel par un tarif fixé par la CRE qui couvre leurs charges et rémunère leur capital. Pour prendre en compte l’inflation, ce tarif, le TURPE, augmente chaque année et cette augmentation se reflète dans chaque facture, quel que soit le fournisseur d’énergie.
Selon une estimation de Selectra, une augmentation de l’ordre de 4% du TURPE était attendue cette année, ce qui aurait dû générer une hausse de l’ordre de 1% des factures d’électricité au 1ᵉʳ août 2024.
D’après une information du Parisien, le ministre Roland Lescure a décidé aujourd’hui 15 juillet que cette hausse n’aurait pas lieu. Aucune confirmation n’était toutefois accessible sur le site de la CRE, le compte X du ministre, ni même le site du ministère au matin du 15 juillet.
Quelles conséquences ?
La première conséquence est pour les gestionnaires de réseau de distribution (GRD), au premier rang desquels Enedis, mais aussi Strasbourg Electricité Réseaux, SRD ou encore Gérédis. Ces entreprises vont accumuler des pertes liées à un financement insuffisant de leurs charges par le tarif public. La décision de blocage du prix s’opposant à la loi qui dispose que les charges des gestionnaires de réseau doivent être couvertes par le tarif d’utilisation des réseaux pourrait finir par être annulée par le Conseil d’État.
Dans un contexte de baisse de la consommation d’électricité nationale, les GRD souffrent déjà d’une baisse de leurs recettes, assises sur la consommation. En effet, les coûts du réseau sont largement fixes, et toute baisse de la consommation se ressent directement dans les profits (ou pertes) de l’entreprise. Le blocage du TURPE, les empêchant de voir leur tarif indexé sur l’inflation, risque d’aggraver leur situation.
La hausse du TURPE absorbée dans la baisse de la part fourniture au 1ᵉʳ février 2025 ?
Au 1ᵉʳ février 2025, le marché anticipe une baisse de la part fourniture du tarif réglementé, devant se matérialiser par une baisse de la facture de tous les clients du tarif bleu ou d’une offre indexée dessus de l’ordre de 10%. Il faudrait donc s’attendre à une baisse d’une magnitude moindre, mais qui permettra d’augmenter le TURPE. Rappelons que cette baisse doit aussi absorber la remontée à son niveau normal de l’accise sur l’électricité, une taxe importante qui doit remonter de 10€ par MWh après une baisse conjoncturelle liée à la crise de l’énergie.
La CRE a publié un communiqué le 15 juillet 2024 annonçant que le ministre en charge de l’énergie avait refusé de publier la délibération portant augmentation annuelle du TURPE et d’utiliser son délai de deux mois lui permettant de demander une nouvelle délibération. La « patate chaude » serait alors probablement transmise à un futur gouvernement. On peut s’attendre à une négociation entre la CRE et les GRD afin que ceux-ci acceptent une hausse moins importante. La CRE a déjà fait réduire significativement les demandes d’augmentation de l’ATRD de GRDF il y a quelques mois, dans un contexte de forte baisse de la consommation.
Compte tenu du bon état du réseau électrique français, il est improbable que cette décision ait des répercussions sur la qualité de service. Il faudra néanmoins d’une manière ou d’une autre financer les charges des gestionnaires de réseau.