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Augmentera, augmentera pas : cafouillage sur la hausse des tarifs réglementés d'EDF

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Les dossiers du mardi de Selectra

Augmentation, non augmentation… Ces dernières semaines sont marquées par un foisonnement d'annonces contradictoires sur les tarifs réglementés d'EDF. Après avoir annoncé l'annulation de la hausse des tarifs réglementés d'août 2014, l'annonce de la ministre en charge de l'énergie Ségolène Royal a été corrigée par son Premier ministre qui a annoncé qu'une augmentation aurait bien lieu à l'automne. Parallèlement, la hausse rétroactive des factures des ménages, résultant d'une décision du Conseil d'Etat d'avril 2014 se confirme. En réaction à des révélations du Parisien le 3 juillet dernier rapportant que la facture EDF augmenterait « d'au moins 30€ », Ségolène Royal confirmait à demi-mots, dans un entretien accordé au journal le lendemain, qu'il y aurait bien une augmentation des tarifs réglementés en 2014 pour prendre en compte la décision du Conseil d'État. Eclairage.

Deux effets se téléscopent : récapitulatif si vous n'avez rien compris :
  Avis de la CRE Décision des ministres Statut Déclaration de Ségolène Royal Problème Ce à quoi s'attendre
20 juillet 2012 - 31 juillet 2013 Augmentation de 5,7% Augmentation de 2% Annulée par le Conseil d'État le 11/04/2014 Pas d'augmentation d'ici août. "C'est une décision très regrettable pour les consommateurs qui ne correspond pas à la volonté du gouvernement qui avait voulu limiter à 2% la hausse des tarifs" La décision du Conseil d'Etat (qui se contente d'appliquer la loi votée par le Parlement) doit être appliquée. La loi prévoit en effet que les tarifs réglementés doivent couvrir les coûts supportés par le fournisseur historique. Le Parisien annonçait une augmentation de 30€. En fait, on s'acheminerait vers un étallement d'une augmentation de 27€ par foyer sur 18 mois pour en diminuer l'ampleur pour les Français.
1er août 2013 - ... Augmentation de 11,3% Augmentation en deux étapes : 5% le 01/08/2013 et 5% le 01/08/2014 Partielle L'augmentation d'août 2013 a eu lieu.
Par contre, Ségolène Royal a "effacé" l'augmentation d'août 2014.
Si aucune augmentation n'avait lieu, on risquerait de s'acheminer vers une nouvelle intervention du Conseil d'Etat et une hausse rétroactive.
Plus prosaïquement, la déclaration de la ministre a fait chuter l'action EDF de 10% en une journée.
Peu après l'annonce de la ministre, le cabinet du Premier ministre a annoncé le 19 juin une "hausse modérée" des tarifs en septembre ou octobre. Manuel Valls a ensuite lui-même confirmé qu'il y aurait une hausse à l'automne inférieure à 5%.

Cacophonie sur fond de hausse des tarifs réglementés

Augmentera... Ou pas ?

En juin 2014, Ségolène Royal, la ministre en charge de l'énergie, annonçait au micro de RMC et de BFMTV qu'elle « effaçait » la hausse de 5% des tarifs réglementés d'EDF prévue en août 2014. Par son geste, la ministre confirmait son attachement à la préservation du pouvoir d'achat des Français. Un peu plus tôt cette année, elle avait d'ailleurs annoncé vouloir limiter les effets d'une décision du Conseil d'Etat d'avril 2014 réclamant une hausse rétroactive des tarifs réglementés.

En fait, selon des informations exclusives obtenues par le Parisien, les factures EDF « devraient augmenter d'au moins 30 euros » pour les particuliers et en moyenne de 45 euros pour les professionnels… Dès cet autonome. La raison ? La ministre doit se plier à la décision du Conseil d'État (qui ne fait qu'appliquer la loi votée par le Parlement). Si cette hausse rétroactive devait se confirmer, ce serait une deuxième déconvenue pour la ministre. Dans la foulée de l'annonce de l'effacement de la hausse d'août 2014, Manuel Valls avait fait savoir que les tarifs réglementés augmenteraient à l'automne.

Un gel tarifaire sanctionné par le Conseil d'Etat

Alors que les grilles tarifaires des offres à prix fixes et à prix indexés proposées par les fournisseurs d'électricité sont déterminées directement par les fournisseurs, les prix des tarifs réglementés commercialisés par EDF ont la particularité d'être fixés par l'État.

A l'issue d'un avis de la Commission de régulation de l'énergie, il incombe aux ministres en charge de l'énergie et de l'économie d'adopter un arrêté de fixation des tarifs réglementés. Toutefois, cette prérogative est encadrée par la loi. Celle-ci prévoit que les tarifs réglementés doivent couvrir les coûts supportés par le fournisseur historique (EDF). C'est en raison de l'augmentation des coûts d'EDF que les tarifs réglementés ont augmenté de 5% en août 2013.

Pour la période d'août 2012 à août 2013, la CRE avait estimé que le gouvernement devait entériner une hausse de 5,7% du tarif réglementé d'EDF pour assurer la couverture de ses coûts. Tout juste nommé, le gouvernement Ayrault choisissait de limiter la hausse à 2%. Saisi par l'ANODE, le Conseil d'État, chargé de contrôler le respect de la loi par les administrations, a logiquement décidé le 11 avril 2014 d'annuler l'arrêté de fixation des tarifs réglementés. Il a en conséquence enjoint les ministres de publier un nouvel arrêté tarifaire rétroactif.

Bon à savoir :
En quittant le fournisseur historique et en souscrivant une offre d'électricité chez un fournisseur alternatif (comme Direct Energie par exemple), il est possible de réaliser d'importantes économies sur ses factures. Comparer les offres d'électricité.

Dans une interview au Parisien le 04/07 en réaction aux révélations de ce journal, Ségolène Royal a confirmé, entre les lignes, qu'il y aurait bien une augmentation des tarifs réglementés en 2014 pour prendre en compte la décision du Conseil d'État.

Explication de texte :
Comme la ministre a annulé la hausse programmée pour le 1er août 2014, elle explique avoir neutralisé la hausse et donc qu'il n'y aura pas de hausse pour les ménages. Toutefois, pour les ménages, il y aura bien une hausse de la facture à l'automne.

Augmentation des tarifs réglementés : ce à quoi il faut s'attendre

En l'état du débat, il devrait y avoir :

  • Une première augmentation de 27€ pour tout ménage qui bénéficiait des tarifs réglementés entre août 2012 et août 2013 ; cette augmentation serait étalée sur 18 mois ; selon Ségolène Royal, dans le Parisien, "Cela permettra aux Français de ne verser que 1,50 euro supplémentaire par mois sur leur facture sur cette période",
  • Une augmentation de la grille tarifaire des tarifs bleus d'EDF à l'automne, d'une ampleur inférieure à 5%.

Comment réagir aux augmentations rétroactives des tarifs réglementés ?

Interrogation sur la sécurité juridique des tarifs réglementés

La tendance du gouvernement à vouloir limiter les hausses des prix de l'électricité, quitte à finalement ne faire que les repousser, n'est pas nouvelle. Comme nous l'écrivions dans cet article, le gouvernement reste un acteur très présent dans le secteur de l'énergie et a régulièrement procédé à des gels tarifaires dans l'électricité et le gaz.

De fait, parallèlement à la hausse rétroactive des tarifs réglementés, si les tarifs réglementés d'EDF ne progressaient pas à l'automne pour refléter l'augmentation des coûts supportés par EDF, on pourrait donc s'attendre à une nouvelle saisine du Conseil d'Etat et une décision d'annulation de celui-ci. La hausse interviendrait donc plus tard et rétroactivement, mais elle interviendrait tout de même.

Quitter les tarifs réglementés : plus d'économies ?

Souscrire une offre chez un fournisseur alternatif — Selectra :
09 73 72 73 00 (lundi-vendredi 7h-21h, samedi 8h30-18h30 et dimanche 9h-17h).
Me faire rappeler gratuitement.

Les hausses rétroactives des tarifs réglementés concernent tous les consommateurs, à moins d'un geste commercial. Toutefois, il reste souvent possible de réduire ses factures d'énergie. La Commission de régulation de l'énergie l'a rappelé dans son Observatoire du marché de détail de l'électricité (1er trimestre 2014), il existe des offres moins chères que les tarifs réglementés d'EDF.

  • A noter :
  • tous les fournisseurs proposent la même énergie, à partir du même compteur : le service technique reste assuré par ERDF même si je change de fournisseur,
  • il n'y a pas d'interruption de fourniture si je change de fournisseur et/ou d'offre : mon nouveau fournisseur prend en compte ma souscription et se charge des démarches de résiliation auprès de l'ancien fournisseur,
  • la loi prévoit que les particuliers (et professionnels en tarifs bleus) peuvent revenir aux tarifs réglementés à tout moment, même après les avoir quittés ; les fournisseurs d'électricité et de gaz naturel ne facturent jamais de frais de résiliation aux particuliers (la loi l'interdit).

Vers une réforme du mode d'évolution des tarifs réglementés

Plus largement, la ministre a estimé « vouloir réformer en cohérence (…) un système brutal ». Elle envisage de supprimer l'obligation de couverture des coûts pour les tarifs réglementés. Elle déclarait : « Cette obligation sera supprimée dans le décret et, pour sécuriser le tout, elle sera inscrite dans la loi de transition énergétique. » Cependant, on peut craindre qu'une telle suppression, même inscrite dans la loi, ne soit requalifiée en aide d'Etat par la Commission européenne, accroissant l'incertitude quant à la sécurité juridique des tarifs réglementés.

Autre proposition avancée par la ministre dans son entretien au Parisien : elle souhaite intégrer les prix de marché dans la formule de calcul des tarifs réglementés de vente de l'électricité. Idée sous-jacente : les prix du MWh d'électricité sur le marché de gros ont baissé ces dernières années. Une telle indexation pourrait ainsi limiter l'ampleur des hausses tarifaires à venir. Toutefois, une telle indexation au marché pourrait aboutir à des variations de tarifs plus fréquentes. De plus, si les prix de l'électricité sur le marché de gros devenaient significativement moins chers que l'électricité d'origine nucléaire et que les tarifs réglementés baissaient ainsi, ceux-ci risqueraient de ne plus couvrir les coûts supportés par EDF pour assurer la maintenance de son parc d'électricité nucléaire. En 2013, 79,3% de l'électricité commercialisée par EDF en France était d'origine nucléaire.

Vers une réforme des règles de couverture et d'évolution des TRV de l'électricité ?
  Les règles actuelles d'évolution des tarifs réglementés La réforme inscrite dans la loi prévue pour 2015 La réforme proposée par Ségolène Royal
Règles de couverture
  • Les tarifs réglementés de vente de l'électricité doivent couvrir l'ensemble des coûts supportés par les fournisseurs historiques au plus tard le 31 décembre 2015. (article L337-6 du code de l'énergie).
  • "Pour rendre son avis [sur la fixation des tarifs réglementés], la Commission de régulation de l'énergie s'appuie notamment sur les éléments comptables produits par Electricité de France et les distributeurs non nationalisés" (article 6 du Décret n° 2009-975 du 12 août 2009 relatif aux tarifs réglementés de vente de l'électricité)
  • Supprimer l'obligation de couverture des coûts des tarifs réglementés : "Cette obligation [de couvrir intégralement les coûts] sera supprimée dans le décret et sera inscrite dans la loi de transition énergétique"
  • Intégrer les prix de marché dans la nouvelle formule de calcul.
Règles d'évolution Les tarifs réglementés de vente de l'électricité sont révisés au moins une fois par an et fixés par les pouvoirs publics suivant une procédure qui fait intervenir la Commission de régulation de l'énergie. L'initiative appartient aux ministres en charge de l'énergie et de l'économise, qui saisissent la CRE (le régulateur) d'un projet d'arrêté. La CRE rend un arrêt motivé dans un délai d'un ou deux mois sur ce projet d'arrêté. La CRE, pour rendre son avis motivé, se base sur les éléments comptables que lui font parvenir les fournisseurs historiques. Enfin, les ministres prennent un arrêté de fixation des tarifs réglementés. Les tarifs réglementés de vente de l'électricité sont fixés par la CRE après avis des ministres (article L337-4 du Code de l'énergie) à partir du 7 décembre 2015. ?

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