Catastrophe sanitaire : un nouveau régime d’assurance en préparation

Catastrophe sanitaire : un nouveau régime d’assurance en préparation

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La pandémie de Covid-19 a provoqué de nombreux débats autour du rôle des assureurs en temps de crise. Ces discussions ont été nourries par un sujet central : la non-prise en charge des pertes d’exploitation des entreprises en raison de la crise sanitaire. Dès lors, il a été question de créer un nouveau régime d’assurance dédié aux catastrophes sanitaires, et il semblerait que ces prochaines semaines, l’on passe de la discussion à l’action.

  • En bref : Un nouveau régime assurantiel pour les catastrophes sanitaires
  • Au mois d’avril 2020, un groupe de travail avait été lancé afin de réfléchir aux problématiques centrales posées par la crise sanitaire, notamment concernant les pertes d’exploitation et les assurances ;
  • En effet, depuis le premier confinement, les entrepreneurs ont fait part de leur frustration. Beaucoup ont réalisé durant la crise que leur contrat d’assurance ne couvre pas les pertes d’exploitation ;
  • Et pour cause, la pandémie ne fait pas partie des risques couverts par une large majorité de contrats ;
  • Depuis, des débats ne cessent d’animer les discussions, notamment au sujet de la création d’un nouveau régime assurantiel ;
  • Ce régime catastrophe sanitaire s’inspirerait de celui prévu pour les catastrophes naturelles – impliquant assureurs et État ;
  • En octobre 2020, Bercy a officiellement annoncé la création dudit régime dans les semaines à venir. Cependant, de nombreuses questions – souvent délicates – restent en suspens.

Catastrophe sanitaire et assurances : la question des pertes d’exploitation

Ces derniers mois, les conséquences de la pandémie de Covid-19 se sont manifestées dans tous les pans de la société. Les restaurateurs et entrepreneurs ont été particulièrement impactés, obligés de fermer durant le confinement en raison de l’urgence sanitaire. Malheureusement pour eux, les pertes d’exploitation liées à la crise sanitaire ne sont généralement pas prises en charge par les assurances. En effet, à ce jour, une grande majorité des contrats ne couvrent pas la pandémie. Cette situation a mis de nombreux commerçants dans des situations économiques incroyablement difficiles, générant frustrations et polémiques autour du rôle des assureurs face à une crise sanitaire comme celle que nous connaissons aujourd’hui. Avec le commencement d’un deuxième confinement – suite à la mise en place d’un couvre-feu –, beaucoup redoutent des conséquences dévastatrices sur leur activité, pouvant les forcer à mettre la clé sous la porte.

catastrophe sanitaire
Pour empêcher la propagation rapide du Covid-19, des mesures exceptionnelles ont à nouveau été déployées partout en France.

Le premier confinement a été particulièrement brutal pour les TPE et PME – soit les très petites, petites et moyennes entreprises. Malgré les aides exceptionnelles déployées par le gouvernement, certaines ne s’en sortent pas, et la non-prise en charge des pertes d’exploitation par les assureurs n’arrange rien à la situation. Un état des lieux publié par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution – ou ACPR – sur le sujet durant l’été révélait que seuls « 3 % des assurés couverts par les contrats analysés [durant leur enquête] peuvent prétendre à une indemnisation dans le cadre de la crise de la Covid-19. C’est notamment vrai pour les contrats garantissant les pertes quelle qu’en soit la cause et ne comportent aucune exclusion du risque pandémique ». Au total, 93,3 % des contrats étudiés par l’ACPR ne couvrent pas ces risques.

Des débats autour de la création d’un nouveau régime d’assurance spécial animent ainsi les discussions depuis plusieurs mois. Un groupe de travail avait été lancé en ce sens au printemps, mais rien n’a concrètement abouti. Mais en octobre 2020, Bercy a fait une annonce retentissante : « Nous finaliserons dans les prochaines semaines un nouveau régime d’assurance pour les entreprises en cas de catastrophe sanitaire », a ainsi déclaré le ministre de l’Économie Bruno Le Maire lors d’une conférence de presse.

Le régime pour couvrir le risque de catastrophe sanitaire pour les entreprises s’inspirerait de celui existant pour les catastrophes naturelles : « Les assureurs interviennent en premier niveau, et lorsque les primes sont épuisées, c’est l’État qui donne sa garantie et qui intervient pour faire face à des évènements d’ampleur exceptionnelle », précisait ainsi Jean-Laurent Granier, PDG de Generali France et vice-président de la Fédération française de l’Assurance – ou FFA – à BFM Business.

Covid-19 : quel modèle pour le nouveau modèle de régime assurantiel ?

Les restrictions pour lutter contre le Covid-19 sont bien souvent nécessaires, mais leurs conséquences sont également dévastatrices pour l’économie du pays. L’annonce officielle de la création d’un nouveau régime d’assurance pour les entreprises dans un tel contexte semble aujourd’hui être une nécessité, car la crise n’est pas momentanée. Elle s’inscrit bel et bien sur un temps long, et ses effets multiples – parfois imprévisibles – demandent à pouvoir s’adapter.

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Le nouveau régime sera-t-il obligatoire ?

Bercy a donc précisé qu’il s’agira de « quelque chose qui pourra accompagner [les entreprises] dans la fin de cette crise et pour la suivante ». Pour autant, rapportent Les Échos, pas question de couvrir 100 % des pertes, mais bien de créer une aide « plus plafonnée, plus forfaitaire », et ce en se concentrant sur un dispositif se focalisant sur les entreprises forcées à une fermeture administrative en raison de la crise sanitaire. Cela irait peut-être donc davantage dans le sens de la proposition faite par la FFA il y a quelques mois, laquelle recommandait un régime de « catastrophe exceptionnelle », soit une compensation forfaitaire pour la prise en charge des pertes subies par les entreprises.

Pour Bercy, le but est donc d’agir relativement vite, afin que ce nouveau dispositif soit mis en place l’an prochain. Une discussion a été engagée avec des représentants d’entreprises et les assureurs, a-t-il été indiqué. Au vu de la virulence des débats sur le sujet depuis les débuts de la pandémie, les échanges s’annoncent compliqués. Pour de nombreux assureurs, créer un régime d’assurance pour couvrir les catastrophes sanitaires serait synonyme d’une ruine économique pour leur secteur. La question du financement d’un tel régime est donc au cœur des désaccords, et explique qu’aucun consensus n’ait été trouvé par le groupe de travail lancé en avril dernier. Quelle part serait prise en charge par l’état ? Quelle part pour les assureurs ? Avant de parvenir à créer ce nouveau régime, il va falloir trouver un moyen de satisfaire chaque acteur concerné. Une tâche titanesque lorsque l’on sait les tensions encore vives qui animent les discussions autour des pertes d’exploitation.

En attendant, le deuxième confinement est désormais bien entamé, et de nombreuses entreprises ne savent pas de quoi demain sera fait.

Pour Bercy, la question centrale est : « Est-ce qu’on se dirige ou non vers une garantie obligatoire » ? Rendre cette garantie obligatoire déclencherait sans aucun doute la colère de certains assureurs. Pour autant, il semble que l’efficacité d’un tel dispositif repose bel et bien sur son obligation. Il s’agirait, selon Jean-Laurent Granier, de la seule solution pour « qu’il soit étendu au plus grand nombre ».

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