Indemnisation bloquée, documents cachés : Laura, paraplégique, réclame 235 000 € à son assureur

Indemnisation bloquée, documents cachés : Laura, paraplégique, réclame 235 000 € à son assureur

Publié le
min de lecture

Paraplégique depuis un grave accident en montagne en 2020, Laura Savoye accuse son assurance, la MAIF, de bloquer son indemnisation. Après des années de démarches, elle a porté plainte pour entrave à la justice et dénonce un système opaque.

Le 4 juin 2020, Laura Savoye chute de 50 mètres lors d’une randonnée dans le massif de Belledonne, en Savoie. Transportée d’urgence par hélicoptère, opérée, puis hospitalisée sept mois en centre de rééducation, la vie de cette étudiante iséroise bascule brutalement. À seulement 20 ans, elle apprend qu’elle ne remarchera jamais.

Mais au-delà du drame personnel, c’est une autre bataille, plus insidieuse, qui commence pour Laura : celle de l’indemnisation. Rattachée au contrat MAIF Praxis Solutions, censé couvrir les accidents de la vie courante, elle s’attend à être prise en charge. Cinq ans plus tard, elle a touché 18 000 euros, alors qu’elle en réclame aujourd’hui 235 000. Elle accuse son assureur de tout faire pour freiner, minimiser, voire empêcher toute indemnisation digne de ce nom.

Selon l’ACPR (Autorité de contrôle prudentiel et de résolution), plus de 30 millions de Français ont souscrit un de ces contrats garantie accidents de la vie (GAV). Mais leur fonctionnement manquent de clarté et les procédures d’indemnisation se révèlent souvent longues et complexes.

Une jeune femme en lutte contre un « système opaque »

En 2023, Laura sollicite l’assistance d’un avocat. « J’ai informé l’assurance que je me faisais accompagner par un avocat. En réponse, j’ai reçu un mail laconique. Et depuis, plus rien », déplore-t-elle. L’assureur aurait brusquement mis fin à toute intervention, notamment au financement de nouveaux aménagements indispensables à sa vie quotidienne.

Les travaux, réalisés en grande partie par son mari et sa famille, sont financés sur leurs fonds propres. Rampe d’accès, rénovation de salle de bain, adaptation du logement, fauteuil roulant à 12 000 euros : la liste est longue. « Ce ne sont pas des frais de confort, ce sont des frais pour vivre décemment », martèle Laura.

Avec son avocat, Me Édouard Bourgin, spécialisé dans la défense des victimes, ils déplorent une stratégie d’épuisement : dissimulation de documents, lenteurs exagérées, rendez-vous médicaux annulés, expertises non finalisées... « Mme Savoye a compris, après trois ans de démarches, que l’assureur faisait tout pour ralentir et compliquer l’indemnisation », explique Me Bourgin.

Pire : selon lui, il existe une collusion entre l’expert médical mandaté et l’assurance. « Nous avons obtenu des documents prouvant que le médecin transmettait ses conclusions médico-légales et des notes techniques au régleur, sans jamais les communiquer à Mme. Savoye. (...) Ce médecin d'assurance est totalement soumis économiquement et matériellement aux intérêts de la compagnie. », dénonce l’avocat.

Plainte pour corruption et dossier non consolidé

Laura Savoye a porté plainte pour entrave à la justice, un chef d’accusation qui vise les pratiques soupçonnées entre l’expert et l’assureur. Pour elle, cette situation dépasse son seul cas. « Je me bats pour moi, mais aussi pour tous les prochains. Ce que je vis, d’autres le vivent aussi, en silence », affirme-t-elle. « C’est une forme de maltraitance institutionnelle. »

De son côté, la MAIF affirme avoir mis en œuvre les garanties contractuelles telles que prévues par le contrat. Et sans consolidation du dossier, impossible de toucher l’ensemble des remboursements dus. Pourtant, Laura rappelle que son dossier aurait pu être consolidé dès août 2020, selon des documents qu’elle aurait obtenus récemment.

Dans le vocabulaire juridique, la consolidation marque la fin de l’évolution médicale, ce qui permet d’évaluer les dommages de façon définitive avant d’indemniser la victime. « Moi, on m’a dit un mois après la rééducation que je ne remarcherai jamais. Pourtant, rien n’a été fait », ajoute la jeune Iséroise.

Alors que la plainte suit son cours, Laura continue de vivre à Meylan, en périphérie de Grenoble, dans un appartement qu’elle a dû rendre accessible elle-même. Malgré les obstacles, elle refuse de baisser les bras : « Je suis quelqu’un qui a envie d’avancer. Mais ces méandres administratifs, ce flou permanent, ça met des bâtons dans les roues. »

Avez-vous trouvé cet article utile ? 100% des 27 votes trouvent l'information utile.

Partager cet article !