Grève contre la réforme des retraites dans le secteur de l'énergie : quelles conséquences ?

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La mobilisation générale contre la réforme des retraites touche également le secteur de l'énergie. La grève du 7 mars est largement suivie par les professionnels de la production et de la distribution de gaz et de l’électricité. Sites stratégiques de l’énergie à l’arrêt ou ralentis, opérations “coup de poing” menés par des agents du gaz ou d’EDF, ce mouvement social influence la situation énergétique du pays. Retour sur quelques chiffres symboliques qui attestent de l’impact de la grève sur le secteur.

Baisse volontaire de la production d’électricité : l’équivalent de 5 réacteurs nucléaires retirés du réseau

Depuis le 3 mars, plusieurs centrales nucléaires et hydrauliques subissent des baisses de production. Une partie des agents a pris les devants et a lancé une grève reconductible dès vendredi afin de manifester leur opposition au projet de loi de réforme des retraites, actuellement débattu par le Sénat. Cette opération a démarré en amont de la grande journée de mobilisation interprofessionnelle et nationale de ce mardi 7 mars.

Ces trois jours de grève ont eu un impact sur le fonctionnement des centrales puisque la production d’électricité a fortement baissé. “5 571 MW retirés du réseau ou aux mains des grévistes” a expliqué à Libération la Fédération des mines et de l’énergie CGT durant ces trois premiers jours de grève. Concrètement, cela représente l’équivalent d’une production émise par 5 réacteurs nucléaires.

Les unités de production nucléaires concernées sont les sites suivants :

  • Les 4 unités de Tricastin dans la Drôme, qui ont connu à elles seules, lors de la journée du samedi une perte de 2 000 mégawatts ;
  • L’unité 2 de Flamanville dans la Manche ;
  • L’unité 5 de Gravelines dans le Nord ;
  • Saint-Alban 2 en Isère ;
  • Paluel 2 en Seine-Maritime ;
  • Cattenom 4 en Moselle ;
  • La première tranche de Saint-Laurent-des-Eaux en Loir-et-Cher.

La centrale hydraulique de Bort-les-Orgues est aussi en grève et participe à l’opération de diminution de la production électrique.

Cette démarche de contestation a été mise en place, tout en maintenant le niveau de sécurité de ces sites sensibles. Les syndicats promettent de limiter les baisses pour ne pas affecter les usagers et les priver d’approvisionnement d’électricité.

Alors qu’EDF peine à relancer son parc nucléaire vieillissant, le ralentissement volontaire de centrales nucléaires vient chambouler le calendrier de remise en service de réacteurs à l’arrêt. En parallèle du ralentissement du fonctionnement des centrales nucléaires, le site d’EDF Velaines dans la Meuse est également à l’arrêt. Il est à l’origine de l’entretien du parc nucléaire. Le site de Velaines détient notamment les pièces pour réparer les 56 réacteurs du parc nucléaire français.

Les raffineries en grève : 140 stations essence en pénurie de carburant

Hier matin, la CGT a annoncé que l’ensemble des raffineries françaises participaient à la grève contre la réforme des retraites. Toutes les expéditions de carburant étaient interrompues durant cette journée de mobilisation d’après la CGT. L’action, d’après le syndicat, se poursuivra jusqu’à ce que le gouvernement retire le projet de loi.

Le site "penurie.mon-essence.fr", qui recense les stocks des stations essence en temps réel estimait ce mardi matin à 8h30 que 140 stations étaient déjà en pénurie de carburant. Alors que 379 connaissaient une rupture partielle de l’approvisionnement en carburant.

Les raffineries bloquées, mais également les complexes pétrochimiques adossés à celles-ci. Le tout, avec un objectif clair : bloquer le secteur et engager un bras de fer avec le gouvernement. C’est ce qu’a expliqué Emmanuel Lépine, patron CGT de la Fédération des industries chimiques” au micro de RTL :

“Ce qu'il faut maintenant, c'est changer de braquet. Puisque le gouvernement n'entend pas la rue, il faut qu'il entende le couinement des actionnaires des entreprises. C'est ce qu'on va essayer de lui faire comprendre. C'est-à-dire que quand on arrête le travail, l'économie s'arrête. Et du coup, le patronat, il va toquer à la porte du gouvernement pour dire 'stop' avec cette réforme.”

3 terminaux méthaniers en arrêt ne gèrent plus l’approvisionnement en gaz

Le secteur du gaz est également concerné par le mouvement de grève, avec l’arrêt de trois des quatre terminaux méthaniers français. Les syndicats ont annoncé une grève d’une durée de "sept jours". Les terminaux arrêtés sont ceux de Fos-sur-Mer dans les Bouches-du-Rhône et de Saint Nazaire en Loire Atlantique. Le quatrième terminal méthanier situé à Dunkerque est quant à lui en grève jusqu’au jeudi 9 mars, il faut donc compter sur une perturbation de son activité.

La mise sur pause de la majorité des terminaux méthaniers conduit au blocage de l’alimentation en gaz du réseau de GRTGaz ou le remplissage des citernes de gaz naturel liquéfié (GNL), mais aussi à la réception de gaz. Les navires méthaniers ne peuvent décharger le gaz transporté vers la France.

En outre, la centrale thermique de Martigues, elle aussi située dans les Bouches-du-Rhône, est impliquée le mouvement social. La tranche 6 est stoppée, ce qui implique le retrait de 460 mégawatts du réseau gazier d’après la CGT.

50% de réduction ou gratuité sur les prochaines factures d’énergie : le cadeau des “robins des bois”

Des professionnels du secteur de l’énergie ont mis en place des opérations “Robin des bois”. Elles consistent à désactiver des compteurs de gaz et d’électricité afin qu’ils ne prennent pas en compte la consommation réelle de certains établissements ou logements.

L’intervention menée par des agents travaillant pour les réseaux de distribution de gaz ou d’électricité consiste également à réalimenter en gaz ou en électricité des foyers qui ont subi des coupures, malgré la trêve hivernale qui l’interdit.

Les premières actions de ce type ont été lancées de manière coordonnée dans toute la France le 27 janvier dernier. La Fédération CGT des Mines et de l'Energie avait alors expliqué cette démarche. Le syndicat précisait que des lieux tels que des “hôpitaux ou cliniques, des patinoires et des piscines municipales, des centres sportifs publics, des associations d'intérêt public, des bibliothèques, des collèges, des lycées, des crèches, des chauffages collectifs d'université ou de HLM, des éclairages publics de petites et moyennes communes, des logements sociaux” allaient bénéficier de gratuité sur leur consommation d’énergie, pour contester la réforme des retraites.

L’action a été étendue aux particuliers ainsi qu’aux petits commerçants et artisans. À Marseille, par exemple, l'opération a été renouvelée au cours du mois de février, mais auprès des foyers choisis de manière aléatoire dans des quartiers populaires. Ces agents et techniciens travaillant dans la distribution de gaz et d’électricité ont modifié le compteur d’usagers afin qu’ils évitent de payer leur consommation d’énergie ou, à minima, qu’ils puissent bénéficier de 50% de réduction sur leur prochaine facture.

Dans d’autres communes françaises, les petits commerçants et artisans faisant difficilement face à la hausse des prix de l’énergie ont pu profiter d’une aide de ces agents pour obtenir des offres d’énergie moins coûteuses et faire baisser leur facture.

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