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Crise énergétique : se chauffer au bois cet hiver, bon ou mauvais plan ?

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De nombreux consommateurs tentent de se tourner en urgence vers le chauffage au bois, afin de ne pas dépendre du gaz ou de l’électricité l’hiver prochain. La crainte d’un black-out énergétique pousse même certains foyers à modifier leurs installations en vue de se chauffer au bois. Or, cette demande croissante et soudaine n’est pas sans conséquences.

La dangereuse ruée sur le chauffage au bois

Le granulé de bois et les bûches sont les produits de l’année. Une vague de nouveaux consommateurs a décidé de se tourner vers cette alternative afin de se prémunir de toute pénurie d’énergie cet hiver. Les fournisseurs de granulés de bois ont été surpris de l’engouement né chez les Français, qui ont commencé dès le printemps et l’été 2022, à commander des stocks de pellets de bois pour passer l’hiver, alors même qu’habituellement, les commandes ne démarrent qu’à l’automne.

La Fédération française des combustibles, carburants et chauffage (FF3C) a récemment publié des chiffres concernant la demande de bois en prévision de la fin de l’année 2022. Il apparaît que les volumes générés sur le marché du granulé de bois ne cessent d’augmenter au fil des ans. À l’hiver 2020-2021, le marché avait produit 1,8 million de tonnes, puis 2 millions de tonnes lors de l’hiver 2021-2022. Cette année, le volume est estimé à 2,4 millions de tonnes selon les données de la FF3C. Un record.

De même, pour l’installation de modes de chauffage fonctionnant au bois. Déjà “entre 2020 et 2021, les ventes de poêles à granulé ont augmenté de 41% et les ventes de chaudières à granulé de 120%, avec respectivement 180 000 et 32 000 pièces”, explique sur son site l’association Propellet, représentant les professionnels du secteur du pellet de bois. Le pic s’observe essentiellement sur l’année 2021 et le démarrage de la crise énergétique. Il est d’autant plus marquant car les trois années précédentes cette alternative était plutôt boudée.

Le granulé et le pellet de bois en particulier, sont prisés pour leur accessibilité (prix et distribution), mais aussi pour leurs capacités. “Le granulé est un combustible qui présente de nombreux avantages, notamment un rendement énergétique constant quelle que soit la température extérieure. Il peut donc être utilisé de manière indépendante dans les régions très froides”, explique l’association Propellet, dans son livre blanc. Moins polluants, plus efficaces, ces combustibles à base de bois font baisser la facture des foyers tout en réduisant la perte de chaleur et la pollution générée.

Risque de pénurie des combustibles à base de bois

L’engouement pour le bois laisse penser que cette solution est idéale pour se chauffer cet hiver. Avec l’explosion des prix de l’électricité et du gaz, le bois en comparaison, est bien moins coûteux. Sauf que la France n’est pas préparée pour répondre à une demande qui croît aussi vite. Là aussi, le combustible n’est pas à l’abri d’une pénurie.

La Fédération française des combustibles, carburants et chauffage s’inquiète à ce propos. Dans un communiqué elle a alerté le public concernant un éventuel “déficit d'offre de 5 à 15%” seulement pour la part des granulés de bois. La distribution de bois (granulés, pellets, bûches) est assurée par des producteurs locaux. La plupart confirment leur difficulté à répondre aux demandes de leurs clients. Il se retrouvent dans l’obligation de filtrer les demandes, en favorisant les consommateurs de longue date.

“Les craintes de pénurie énergétique inquiètent les consommateurs qui font des réserves et se ruent sur les granulés de bois avant l'hiver”, analyse la FF3C. Les consommateurs veulent lutter contre un risque d’insuffisance énergétique, mais ce nouveau mode de consommation risque de générer une autre pénurie.

Le granulé de bois est produit essentiellement en France. 85 % des granulés consommés en sur le territoire sont issus de la production nationale. Les 15 % restants sont importés. Avant le déclenchement de la guerre, l'Ukraine - mais également la Russie et la Biélorussie - étaient les principaux fournisseurs de l’Hexagone. Le conflit a ainsi laissé un manque difficile à pallier.

Les bûches de bois connaissent également une demande croissante. Mais cette fois, la difficulté de se fournir pourrait découler d’un changement de réglementation au sujet de distribution. Depuis le 1er septembre 2022, les fournisseurs sont dans l'obligation de ne vendre que du bois sec afin d’éviter un mauvais rendement et un surplus de pollution. Cette contrainte n’est pas négligeable puisqu’elle pourrait réduire les quantités de bûches autorisées à la vente.

Un coût pas si faible…

La conversion d’un mode chauffage pour se tourner vers le bois peut aussi bénéficier d’une aide de l’État. Le dispositif MaPrimRenov’ permet notamment de financer une partie de l’installation d’un poêle ou d’une chaudière, à granulés ou à bois. Elles sont également éligibles aux aides octroyées par le dispositif des certificats d’économies d’énergie (CEE). Ces installations bénéficient d’autres avantages comme une TVA réduite à 5,5 %.

D’ailleurs, durant le premier trimestre 2022, les installations de poêle à granulés étaient en tête des opérations financées par MaPrimRenov’, d’après l’Agence nationale de l’habitat (ANAH). Cela représentait environ 38 000 poêles à granulés dont l’aide moyenne attribuée était de 3600 euros.

Jusqu’à l’année 2022, s’équiper pour se chauffer au bois était donc intéressant financièrement. Cette année, l’explosion de la demande de bois n’a pas seulement engendré un manque de stocks, elle a également fait augmenter les prix du bois. Entre le printemps et aujourd’hui le sac de pellets est passé de 6,5 euros à 8 euros.

La production de pellets et de granulés n’échappe pas non plus à l’inflation généralisée. L'augmentation du coût des matières premières et de l’énergie ont également un impact sur le prix de vente de ce combustible.

Par ailleurs, il est important de prendre garde à de nombreuses arnaques en ligne. Des sites proposant des palettes de granulés de bois à prix réduit se sont développés au rythme de la demande. Il arrive que de réelles entreprises subissent une usurpation de leur nom, comme l’évoquait France 3 Normandie en août dernier. Le média recensait plusieurs escroqueries liées à la vente de granulés et de pellets de bois. De nombreux clients ont alors commandé et payé des palettes qu’ils n’ont jamais reçues. Là encore, le coût peut être élevé lorsqu’on ne dispose pas d’un fournisseur traditionnel et fiable.

En réalité, se chauffer au bois est une bonne alternative sur le long-terme mais moins pour répondre à une urgence, comme c’est le cas de cette année 2022 très particulière.

Certes, le bois reste l’énergie la moins coûteuse en comparaison de l’électricité, par exemple, dont le prix de gros a récemment atteint les 1000 euros le mégawattheure (MWh) contre 85 euros l’an dernier à la même période. Ou encore le gaz qui se négocie désormais à 320 euros le MWh, contre environ 15 euros le MWh avant que la crise énergétique ne se déclenche. Toutefois, sans la possibilité d’utiliser son chauffage ou sa chaudière à bois, par simple manque de combustible, la conversion devient nulle, voire peut être à l’origine d’un manque à gagner.

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