Le prix plancher du carbone fait monter les cours de l’électricité

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L’annonce par le président de la République, François Hollande, de la mise en place d’un prix plancher du carbone dans le cadre de la conférence environnementale a fait grimper les prix de l’électricité sur le marché de gros. Alors que l’exécutif français veut sonner la fin des énergies fossiles, quel impact sur les prix de l’électricité ?

Un rebond des prix de l’électricité sur le marché de gros

La centrale thermique de Richemont

La centrale thermique au gaz de Richemont en Moselle.

À l’occasion de la conférence environnementale qui s’est tenue les 25 et 26 avril, le chef de l’État a annoncé la mise en place d’un "prix plancher [qui] donnera plus de visibilité à tous les investisseurs et privilégiera, pour le secteur spécifique de l’électricité, l’utilisation du gaz par rapport au charbon (…) [et qui] permettra de changer les comportements." Il s’agit en effet de taxer l’utilisation des énergies fossiles (charbon, gaz, pétrole…), principales émettrices de gaz à effet de serre, pour la production d’électricité et d’aller progressivement vers une sortie du charbon. A l'heure actuelle, le marché européen des certificats carbone est régi par une offre trop abondante et un prix de la tonne de carbone trop bas. Dans ces conditions, le marché carbone ne remplit pas son objectif, qui est d'inciter les producteurs d'électricité à favoriser les énergies décarbonées, ou peu carbonées comme le gaz naturel. Cela pourrait changer suite à l'annonce de François Hollande. Mais cette mesure a aussi le potentiel d'induire à terme une hausse des coûts de production d'électricité, et les marchés ont anticipé cette tendance.

Saluée par les associations écologistes, décriée par d’autres qui y voient une mesure coûteuse, l’annonce d’un prix plancher du carbone ne laisse personne indifférent. Et encore moins le marché de gros français de l’électricité. En effet, en quelques jours seulement, les prix de l’électricité sur le marché de gros ont bondi : de 26 euros/mégawattheure (MWh) en mars à 31 euros/MWh aujourd’hui. De fait, les déclarations de l’exécutif français sur l’instauration d’un prix plancher du carbone en France et sur l’engagement "unilatéral" de la France dans ce domaine ont inquiété les différents acteurs qui interviennent sur le marché de gros, notamment les producteurs et les négociants.

Le marché de gros désigne le marché où l’électricité est achetée et vendue avant d’être livrée sur le réseau à destination des clients finals, à l’instar des particuliers ou des entreprises.

Dans le même temps, le prix des matières premières remonte en raison de températures en dessous des normales saisonnières. Le cours des quotas de CO2 (ETS) a lui-aussi connu un rebond, à près de 7 euros la tonne, contre moins de 5 euros la tonne il y a un mois.

Une mesure incertaine et à deux vitesses ?

L’annonce d’un prix carbone reste encore entourée d’incertitudes. Le président de la République, François Hollande, a indiqué mardi que le gouvernement devrait proposer les modalités de mise en œuvre du prix carbone "dès cette année." Un prix autour de 30 euros la tonne de CO2 a été évoqué qui devrait permettre d’appeler sur le réseau les centrales à gaz avant celles au charbon, plus polluantes.

La mise en place d’un prix plancher du carbone n’est pas pour plaire à certains producteurs d’électricité, dont la production électrique est majoritairement issue des énergies fossiles. Avec l’exploitation de deux centrales au charbon en France, Uniper France (ex-E.ON France) a observé hier dans un communiqué de presse que "sans mesures d’accompagnement, Uniper France ne sera pas en mesure de pérenniser son activité sans prévoir la mise en œuvre d’un plan de sauvegarde de l’emploi qui devra inclure un nombre significatif de départs contraints."

De même, sans prix européen du carbone, les producteurs français seraient sérieusement mis en concurrence avec leurs voisins dans l’Union européenne : "il faut évidemment prévenir cette situation qui consisterait pour certains pays fortement émetteurs à fabriquer des produits très carbonés à meilleurs prix", a estimé Gérard Mestrallet, le PDG d’Engie. L’entreprise redoute en effet la concurrence des centrales au gaz italiennes et allemandes.

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