Engie Home Services, c'est fini ! La filiale d'Engie sera vendue dans les prochains mois

Par Matias Perea

Analyste Énergie

Dans le cadre de son recentrage stratégique vers ses activités essentielles et la transition énergétique, le groupe Engie a annoncé officiellement la mise en vente de sa filiale Engie Home Services, leader français de l'entretien et de l'installation de systèmes de chauffage chez les particuliers. Cette décision, confirmée en interne à ses 4 900 salariés, s'inscrit dans un processus plus large de désengagement d'activités non stratégiques, engagé depuis plusieurs années par l'énergéticien français.

Engie Home Services : une cession prévue à l'horizon 2026

Le 5 mars dernier, Catherine MacGregor, directrice générale d'Engie, a annoncé aux équipes d'Engie Home Services que l'entreprise allait être mise en vente. Cette filiale spécialisée dans les services d’entretien et de dépannage des systèmes de chauffage et de climatisation chez les particuliers emploie aujourd’hui près de 4 900 salariés. Le groupe espère trouver un repreneur solide capable de poursuivre et de développer cette activité. Selon Le Figaro, Engie prévoit obtenir un acquéreur d'ici au 3ᵉ trimestre 2025 et finaliser la vente en 2026.

« Cette décision s’inscrit dans un mouvement de simplification stratégique amorcé en 2020 », précise Catherine MacGregor, assurant néanmoins « la continuité des services fournis par Engie Home Services tout au long du processus ».

Toutefois, ces assurances ne rassurent pas totalement les salariés concernés. En effet, comme le rappelle une source syndicale, « ces dernières années, les revues stratégiques engagées par Engie se sont presque systématiquement soldées par des cessions ». Il est vrai qu’Engie a multiplié les ventes d’actifs importants récemment : 

• Equans (services multitechniques) revendue au groupe Bouygues en 2022 pour 7,1 milliards d'euros ;
• MesDepanneurs revendue à son fondateur début 2025 ;
• EVBox (solutions de recharge électrique) également cédée ces derniers mois. 

Depuis 2020, le montant total des cessions réalisées par le groupe atteint 12 milliards d’euros.

Engie Home Services avait d'ailleurs vu son chiffre d’affaires nettement reculer en 2022, atteignant 505 millions d’euros contre 530 millions en 2021, avec un résultat d’exploitation affichant une perte de 17 millions d’euros contre un bénéfice l’année précédente. Face à cette dégradation, certaines mesures de restructuration avaient déjà été prises : réduction de 205 postes via une rupture conventionnelle collective et fusion de plusieurs agences locales pour rationaliser l’activité.

L’arrivée à la tête d’Engie Home Services, en octobre 2023, de Benoit Pons, spécialiste des « situations de transformation et de redressement dans la distribution et les réseaux de services », avait déjà soulevé certaines interrogations chez les salariés, préoccupés par l'avenir de l'entreprise. Comme l’indiquait récemment un représentant du personnel :

« C’est la première fois qu'ils nomment un spécialiste des situations difficiles. Il est clair que la priorité est désormais la réduction des coûts pour améliorer les marges, avant probablement d’envisager une vente à la découpe. »

Une stratégie claire : le recentrage vers le cœur de métier confirmé

Selon Catherine MacGregor, ces décisions visent à recentrer clairement Engie autour de quelques activités essentielles à forte valeur ajoutée où le groupe possède une expertise forte. Lors de la présentation des résultats annuels 2024 (publiés le 27 février 2025), elle précisait les ambitions d’Engie :

« Nous avons simplifié notre organisation en passant de 25 business units en 2019 à seulement quatre aujourd'hui. Notre objectif est de faire d'Engie une référence en matière de transition énergétique, à la fois abordable et fiable, en renforçant notre dimension industrielle et en simplifiant continuellement nos structures et nos processus internes. »

Ainsi, les investissements d’Engie se concentrent désormais fortement autour des énergies renouvelables, de la gestion intelligente des réseaux électriques et du stockage d’électricité par batteries, des secteurs où Engie estime disposer d’une réelle valeur ajoutée industrielle. 

En 2024, Engie a investi massivement pour renforcer sa capacité en solutions de stockage par batteries, atteignant désormais 2,6 GW opérationnels et 2,6 GW supplémentaires en cours de construction, notamment aux États-Unis et en Europe.

Dans la même dynamique, la part des renouvelables dans le portefeuille énergétique du groupe grimpe également : en 2024, sur une capacité totale installée de 102 GW, Engie possédait déjà 46 GW de capacités renouvelables, contre 41 % en 2023. Le groupe prévoit même d’atteindre 95 GW de capacités combinées renouvelables et batteries d'ici à 2030.

Situation financière solide et objectifs environnementaux ambitieux

Engie affiche pour l'année 2024 des résultats financiers solides, malgré un contexte énergétique en voie de normalisation après une période de forte volatilité. Le résultat net récurrent atteint un niveau record de 5,5 milliards d’euros, en hausse de 3 % par rapport à 2023. Le cash-flow opérationnel reste très élevé à 13,1 milliards d’euros, permettant au groupe de proposer un dividende en hausse à ses actionnaires (1,48 euro contre 1,43 l’année précédente).

Ces bons résultats financiers accompagnent une trajectoire environnementale particulièrement volontariste. Les émissions de gaz à effet de serre liées à la production d’énergie chez Engie ont baissé à 48 millions de tonnes en 2024, contre 52 millions un an auparavant (-8 %), permettant au groupe d'avancer rapidement vers son objectif de neutralité carbone prévu à l’horizon 2045.

Inquiétudes sociales et questionnements internes

Malgré les bons résultats financiers et la solidité apparente de la stratégie adoptée par Engie, la mise en vente d’Engie Home Services ne fait pas l’unanimité parmi les salariés concernés. Nombre d’entre eux s'inquiètent d'une stratégie jugée trop tournée vers la rentabilité immédiate et les attentes actionnariales :

« La principale motivation semble être de générer de la valeur pour les actionnaires, mais on finit par oublier un peu notre raison d'être sociale et locale. »

Ces préoccupations sociales interviennent dans un contexte déjà complexe pour l’énergéticien, confronté à des incertitudes qui persistent au sujet du futur de ses activités nucléaires en Belgique, sujet sensible redevenu prioritaire avec l’évolution récente de la politique énergétique du pays.