Quand les plateformes SVOD redéfinissent le cinéma français et nos modes de consommation
Depuis leur arrivée dans l'Hexagone, les plateformes de streaming comme Netflix, Amazon Prime Video ou Disney+ ont bouleversé le paysage du cinéma français. Ces géants du numérique, armés de contenus illimités et d’algorithmes sophistiqués, ont non seulement modifié la façon dont les films sont produits, mais aussi celle dont ils sont consommés. En dix ans, ils ont redéfini nos habitudes culturelles, soutenu la production nationale et questionné le rôle des sales obscures...
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Les plateformes de streaming, nouvelles actrices du cinéma français
Avant 2014, les services de vidéo à la demande n'existaient quasiment pas en France. Mais ça, c'était avant. Ensuite, Netflix est arrivé, bientôt imité par de nombreuses autres plateformes de streaming.
Et, au début, elles ont été perçues comme des concurrentes directes des salles de cinéma, largement fréquentées dans le pays. Elles ont toutefois rapidement prouvé leur rôle de partenaires stratégiques via l'investissement de fonds considérables dans la production de films nationaux.
Netflix, leader incontesté du marché avec plus de 282 millions d’abonnés dans le monde au troisième trimestre 2024, a ainsi investi 250 millions d’euros dans des productions françaises rien qu'en 2022.
Et que dire de Prime Video ? La plateforme d'Amazon est loin d'être en reste. Elle a en effet promis d'injecter 300 millions d’euros sur trois ans dans l'industrie cinématographique tricolore.
Ces investissements permettent de financer des projets variés allant des longs-métrages aux séries, en passant par les documentaires, tout en renforçant la diversité et l’accessibilité de l’offre culturelle.
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Cela dit, affirmer que cette nouvelle dynamique est exempte de défis serait totalement erroné. En France, il existe ce que l'on nomme "chronologie des médias", une législation qui impose de respecter un délai minimum de 15 à 17 mois entre la sortie en salle d'un contenu et sa diffusion sur une plateforme de streaming.
Cette obligation est fréquemment critiquée pour son inadéquation avec les attentes des spectateurs, qui aimeraient évidemment être en mesure de visionner ces films le plus rapidement possible.
Bien sûr, les plateformes de vidéo à la demande ont tenté de contourner cette contrainte, misant sur des sorties hybrides qui combinent la diffusion dans les salles de cinéma et via les services de streaming pour maximiser la visibilité des œuvres, avec plus ou moins de succès.
Les Français ne consomment plus le cinéma comme avant
Au fil du temps, l’essor du streaming a, sans surprise, transformé la manière dont les Français consomment des films et des séries. L’expérience collective des salles de cinéma tend, ces dernières années, à céder le pas à une consommation individuelle, plus flexible et personnalisée.
Tout cela, depuis le confort de son domicile, à n'importe quel moment. Oubliées, les contraintes d'horaires et de transport...
La société internationale de sondages et d'étude de marché Yougov a réalisé en 2023 un sondage qui révélait que 43 % des Français n'étaient pas retournés au cinéma depuis la pandémie, privilégiant les plateformes de streaming pour leur praticité et la diversité de leur catalogue.
Le COVID-19 a énormément profité au développement et au succès des services de vidéo à la demande, qui sont parvenus à s'ancrer de manière durable dans les habitudes des téléspectateurs. Parmi les nouvelles pratiques ciné des Français, on retrouve notamment :
- Le binge-watching qui consiste à visionner plusieurs épisodes de séries ou des films à la suite.
- Un engouement pour les mini-séries au format court, parfaites pour être regardées au cours d'un week-end.
- La création de playlists personnalisées grâce aux algorithmes pointus des plateformes qui influencent le choix des téléspectateurs.
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On peut également citer la "découverte assistée" qui consiste à utiliser les algorithmes pour faire découvrir des genres ou des contenus aux abonnés. De cette manière, les services de vidéo à la demande orientent directement leurs choix et leurs goûts.
À l'évidence, ces nouvelles pratiques offrent une accessibilité inédite. Néanmoins, elles ne sont pas sans soulever aussi un certain nombre de questions, notamment sur l’impact qu'ont les algorithmes sur la diversité culturelle.
Les recommandations prédictives risquent, à terme, d'enfermer les spectateurs dans des choix récurrents, et de réduire petit à petit leur exposition à des œuvres moins populaires, mais tout aussi enrichissantes à découvrir.
Face au streaming, le cinéma doit se réinventer
Le cinéma français n'est pas resté les bras croisés face à l'expansion des services de streaming. Pour contrer leur attractivité, les salles obscures innovent et proposent davantage d'expériences immersives et haut de gamme.
Elles sont ainsi nombreuses à offrir des projections en IMAX, des sièges en cuir et des technologies 4DX, qui intègrent des effets sensoriels, visant à recréer la magie de l’expérience collective que l'on a toujours connue.
Faut-il pour autant en conclure que les plateformes SVOD sont les ennemies jurées du cinéma français ? Pas si sûr : certaines salles vont désormais jusqu'à collaborer avec ces dernières. C'est pourquoi les cinémas du groupe de production MK2, à Paris, programment des séances exclusives avec Netflix et brouillent les frontières entre les deux univers.
Une stratégie hybride qui permet de répondre aux attentes des spectateurs tout en valorisant la salle obscure comme lieu de découverte culturelle.
Il faut enfin tenir compte de l’évolution des modèles de distribution. Réduire les délais entre la sortie en salle et la disponibilité sur les plateformes SVOD aiderait le cinéma traditionnel à tirer parti de l’engouement pour le streaming, tout en maintenant son statut de pilier culturel.
Si les salles obscures doivent encore relever de nombreux défis, elles ne sont pas condamnées à disparaître. Leur capacité d’adaptation et leur collaboration avec ces nouveaux acteurs seront essentielles pour pérenniser une offre culturelle riche et diversifiée.
