TotalEnergies quitte l'ANODE

TotalEnergies quitte l'association des fournisseurs alternatifs

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TotalEnergies pense que les fournisseurs alternatifs devraient impérativement être des producteurs, l'ANODE non. Le pétrolier national a donc décidé de quitter l'association cofondée par Direct Energie en 2006 pour porter la voix des fournisseurs alternatifs.

Une discorde sur le métier de fournisseur alternatif

Chez les fournisseurs alternatifs, on trouve de tout :

  • des pétroliers comme TotalEnergies ou Eni, qui vivent essentiellement de la production d'énergie, mais se lancent dans la fourniture pour maîtriser "l'aval"
  • une ancienne entreprise publique, opérateur nucléaire en Belgique et fournisseur historique de gaz (Engie)
  • des historiques de l'électricité, qui connaissent très bien le métier et maîtrisent la production comme la fourniture (Vattenfall, Alpiq ...)
  • des start-ups qui surfent sur la possibilité d'acheter de l'électricité verte (Ilek, Ekwateur ...)
  • des discounteurs, qui cherchent à se démarquer par des prix bas (Mint Energie, Ohm Energie)
  • des fournisseurs régionaux, ne cherchant à se développer que sur une région à forte identité (Enargia, Llum)
  • une entreprise de technologie qui développe en parallèle une activité de production, de fourniture, et de fourniture de systèmes d'information à ses concurrents (Octopus Energy)
  • et même une coopérative (Enercoop)

Dans un marché très secoué par la crise de l'énergie, les entreprises qui produisent de l'électricité ont bien tiré leur épingle du jeu. Les autres, dépendants d'un EDF incapable de maintenir son niveau de production d'électricité habituel, ont été jetés en pâture à l'opinion et qualifiés tantôt de parasites ne vivant que l'ARENH, tantôt de fournisseurs "virtuels".

Si TotalEnergies a également souffert au niveau de sa filiale de vente d'électricité (héritée de Direct Energie, achetée en 2018), la hausse des cours du pétrole a plutôt profité au groupe. Patrick Pouyanné comprend bien que la concurrence de petits fournisseurs, à la structure de coût plus légère, n'est pas bonne pour TotalEnergies. Le pétrolier ne peut pas viser un leadership sur le marché de l'électricité en s'appuyant sur un mécanisme aussi artificiel que l'ARENH. Il ne peut pas non plus parier sur le marché spot, quitte à faire faillite ou pousser ses clients dehors si les prix sont plus élevés qu'attendus.

Les intérêts de TotalEnergies et des fournisseurs alternatifs sont donc divergents. Ces divergences apparaissent au grand jour au fur et à mesure qu'avancent les négociations sur l'après ARENH.

L'avenir de l'ANODE

L'ANODE est l'Association Nationale des Opérateurs Détaillants en Energie, en bref le lobby des fournisseurs alternatifs. Cette association a réalisé un travail impressionnant pour s'efforcer d'assainir la libéralisation des marchés en portant en justice les obstructions du gouvernement, d'EDF ou d'Enedis. On lui doit notamment la très saine séparation entre les équipes d'Enedis et celles d'EDF.

EDF et TotalEnergies semblent aujourd'hui très alignés sur la mise en place de contrats de long terme entre EDF et les autres fournisseurs. Des contrats dans lesquels TotalEnergies serait avantagé par la taille de son portefeuille de clients. Un mécanisme également plus "normal" et rassurant pour les marchés que l'ARENH. Du côté des alternatifs, dont le portefeuille de clients et plus réduit et fluctuant, l'ARENH dans son format actuel est plus protectrice. Dans un tweet du 4 octobre, Fabien Choné, qui a fondé, dirigé, puis vendu Direct Energie à TotalEnergies, semble regretter la position du pétrolier : "En tant que cofondateur de l'@AnodeAsso et de Direct Énergie, rachetée par Total en 2018, je suis triste de cette séparation. Mais pas du tout surpris. Car j’ai créé l’Anode en 2006 pour porter la proposition d’un accès régulé au nucléaire, ce que Total réfute (étonnement…) aujourd’hui. Je suis ainsi surtout triste pour la concurrence dans la fourniture, et donc par suite, pour les consommateurs d’une part, et la réussite de la transition énergétique d’autre part."

Naïma Idir, présidente de l'ANODE, a déclaré "Le départ de TotalEnergies est lié à un profond désaccord sur la régulation de la production nucléaire historique post-Arenh. Avec ce départ, nous gagnons en cohérence et pourrons avoir un discours plus offensif sur nos propositions pour défendre le pouvoir d’achat de l’ensemble des Français et une concurrence équitable entre tous les fournisseurs".

On comprend donc que l'ANODE poursuivra le travail de défense des intérêts des fournisseurs alternatifs sans TotalEnergies. Avec sans doute une liberté nouvelle, notamment pour entreprendre des actions en justice.

Mise à jour du 9 octobre : on apprend que le fournisseur Octopus Energy quitte également l'ANODE.

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