Applications, bracelets connectés et collecte de données : des solutions pour lutter contre le Covid-19 ?

Applications, bracelets connectés et collecte de données : des solutions pour lutter contre le Covid-19 ?

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Partout dans le monde, les gouvernements prennent des mesures pour surveiller la circulation du Covid-19 sur leur territoire et limiter la contamination des populations. Le recours à la technologie s’est rapidement imposé, de la géolocalisation en passant par les applications mobiles et les bracelets connectés. Ces solutions sont-elles efficaces ? Quid des libertés individuelles de chacun ?

  • En bref : Gestion de crise et Covid-19 : la technologie est-elle une solution dangereuse ?
  • La Corée du Sud est l’un des rares pays à avoir adopté une stratégie de confinement partiel grâce au dépistage massif de la maladie sur son territoire. Ainsi, seules les personnes malades sont mises en quarantaine ;
  • Pour veiller au respect de la quarantaine, les malades sont surveillés via une application mobile. Mais suite au nom respect des mesures par certains, le gouvernement sud-coréen a décidé d’avoir recours à un bracelet connecté, lequel est appairé à l’application ;
  • La France, l’Italie, les États-Unis, l’Allemagne… de nombreux pays envisagent l'utilisation d'une application mobile similaire à celle disponible en Corée du Sud ;
  • Afin d’aider à surveiller la circulation du virus, certains souhaitent exploiter les avantages des bracelets connectés.

Corée du Sud : les malades du Covid-19 placés sous surveillance

Alors que de nombreux états préparent le déconfinement de leur population, ceux-ci s’intéressent aux avantages que pourrait apporter l’innovation technologique dans ce contexte. En France, les discussions sont animées, en particulier en ce qui concerne la question de l’exploitation des données durant la crise du Covid-19 et les libertés individuelles des citoyens. Ainsi, le projet de développement d’une application, nommée « StopCovid », porté par le gouvernement est loin de faire l’unanimité. Cette application permettrait d’effectuer un traçage numérique, et fonctionnerait sur la base du volontariat et grâce au Bluetooth.

Afin de trouver des stratégies facilitant un retour à la normale dans les meilleures conditions, les pays encore en quarantaine se tournent vers celles adoptées dans d’autres états où le confinement n’est pas total, ou bien ceux où les gens sont à nouveau autorisés à sortir.

La Corée du Sud, qui a déployé un dépistage massif sur son territoire, fait partie de la première catégorie, c’est-à-dire que seuls les malades sont placés en quarantaine, mais pas le reste de la population.

En Corée du Sud, la surveillance des malades atteints du Covid-19 est imposée. Plusieurs méthodes sont employées, de la géolocalisation des smartphones aux appels au domicile des personnes confinées. De plus, une application très similaire à StopCovid a permis la surveillance du respect du confinement par les personnes placées en quarantaine. Malgré tout, certaines ont bravé l’interdit. Alors, afin de vérifier si les malades respectent les différentes mesures de quarantaine, le gouvernement a décidé mi-avril 2020 d’obliger ces personnes récalcitrantes à porter un bracelet électronique de tracking. Le bracelet fonctionne avec l’application en Bluetooth sud-coréenne, et ici les notions de choix et de consentement n’ont visiblement pas leur place. Si le porteur du bracelet décide de le détruire, les autorités sud-coréennes seront immédiatement prévenues : « Après un examen approfondi, le gouvernement a décidé de mettre des bracelets électroniques sur les personnes qui violent les règles d’auto-isolement, en sortant sans prévenir ou en ne répondant pas aux appels téléphoniques », a expliqué le Premier ministre Chung Sye-kyun, relayé par l’agence de presse Yonhap.

Covid-19 : En Corée du Sud, ceux qui ne respectent pas le confinement risquent grosEn tout, 160 personnes malades sur les 57 000 placées sous surveillance n’auraient pas respecté leur confinement imposé – en laissant leur smartphone au domicile pour ne pas être trackés par l’application du gouvernement. Les citoyens sud-coréens qui ne respectent pas la quarantaine risquent une amende pouvant atteindre 7 500 euros, et même jusqu’à un an de prison.

Montres et bracelets connectés : de la surveillance des populations à l’étude du Covid-19

Les applications et bracelets connectés seront-ils utiles pour le déconfinement ?

À des degrés différents, tous les pays touchés par la pandémie de Covid-19 prennent des mesures atteignant les libertés individuelles de leurs citoyens. Si celles déployées par la Corée du Sud ont permis de limiter le nombre de décès en raison du Covid-19 sur le territoire, ces solutions drastiques interrogent : jusqu’à où peut aller un gouvernement au prétexte de vouloir protéger sa population ? « Quand l’exception devient la norme, tout citoyen doit rester attentif et ne pas troquer sa liberté contre un peu plus d’une sécurité éphémère », affirmaient ainsi les avocats Nabil Boudi et Carbon de Seze dans L’OBS. Le recours à l’application mobile est envisagé par la France, mais aussi l’Italie par exemple.

Pourtant, désormais, c’est du côté de l’Internet des objets – ou IoT – que certains se tournent. Plusieurs pays souhaitent exploiter les avantages des équipements connectés, mais pas nécessairement pour surveiller les malades. Ainsi, en Allemagne, les autorités sanitaires proposent elles aussi à la population de télécharger une application mobile nommée « Corona-Datenspende ». Le recours à cette application est volontaire, et spécifiquement destiné aux personnes possédant un bracelet ou une montre connecté. Ces objets permettent en effet d’analyser la température corporelle des individus et leurs cycles de sommeils. Grâce aux données récoltées via l’application, le gouvernement pourrait donc garder un œil sur de potentielles caractéristiques du Covid-19, ainsi que sur la propagation de la maladie et son évolution dans le temps. Ici, la démarche n’est pas tant la surveillance de la population allemande que l’étude de la maladie.

Pour le secteur de la tech, les enjeux sont nombreux. Mais jusqu’où peut-on renoncer à nos libertés individuelles en raison de la crise sanitaire ?

Bien sûr, les bracelets pourraient aussi permettre d’identifier les malades pour savoir si l’on a été au contact ou non d’une personne infectée afin de surveiller la circulation du virus. En France, l’entreprise Sigfox travaille sur un bracelet connecté fonctionnant indépendamment du smartphone : « L’idée est d’avoir un bracelet, ou un autre objet connecté, qui ne soit pas relié au smartphone et permettrait de connaître les personnes croisées par son porteur durant la journée et celles qui se sont rendues dans différents lieux », expliquait donc à RTL.fr Ludovic Le Moan, PDG de Sigfox. L’enjeu serait de trouver des alternatives aux solutions proposées par les géants du Web, « qui savent déjà tout de notre vie privée, a-t-il affirmé. Le but n’est pas de traquer une personne pour savoir si elle est allée à la Poste ou au supermarché mais d’aider les autorités à gérer la circulation du virus. »

Qu’il s’agisse de l’utilisation des données de géolocalisation, des applications mobiles en Bluetooth ou des bracelets connectés, beaucoup s’interrogent sur les conséquences potentielles que pourraient avoir ces dispositifs sur le long terme. Que les ambitions des gouvernements et entreprises soient louables ou non, de telles solutions – même si celles-ci sont basées sur le volontariat – impliquent un réel risque pour les libertés individuelles. Comme l’expliquait Cécile Coudriou, présidente d’Amnesty International France, dans Le Monde : « L’histoire récente a malheureusement prouvé que des dispositions introduites dans des circonstances exceptionnelles risquaient de basculer dans le droit commun. »

Covid-19 : En Italie, des bracelets connectés pour les seniorsEn Italie, alors que le déconfinement approche, le gouvernement envisage le port obligatoire d’un bracelet connecté pour les personnes âgées.

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