précarité énergétique

La précarité énergétique ne touche plus seulement les ménages modestes

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Alors que le mal-logement touche presque 4 millions de personnes en France en 2017, une part croissante de la population déclare souffrir de précarité énergétique. Pour la Fondation Abbé Pierre, qui publie aujourd'hui son 22e rapport annuel sur l'état du mal-logement en France, les problèmes de logement sont un facteur d'amplification du "décrochage" des couches populaires. En dix ans, le problème s'est répandu à plus grande échelle : d'après la Fondation, près de 1,5 millions de foyers — 3,5 millions de Français — constituent le "noyau dur de la précarité énergétique" mais le phénomène toucherait au total à des degrés divers 5,6 millions de ménages, soit 11 millions de Français !

En cause : la hausse du prix de l'énergie et la mauvaise isolation thermique

Dans un contexte de hausse des loyers, les Français les plus défavorisés sont de plus en plus nombreux à économiser sur le budget énergie pour rogner sur les dépenses domestiques. Entre 2006 et 2013, ils étaient 44% de plus à se priver de chauffage à cause du coût de l'énergie. Ce dernier a enregistré une hausse de 70% entre 2000 et 2015, selon l'Insee. Conséquence directe, en 2016, c'est plus d'un Français sur deux qui déclarait souffrir du froid chez soi, selon Opinion Way.

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Dans six cas sur dix, le problème de précarité énergétique découle directement d'une isolation thermique médiocre, avec parfois des conséquences qui vont au-delà du simple inconfort. Les habitants d'un logement difficile à chauffer ont moitié plus de chances de se déclarer en mauvaise santé, avec une fréquence accrue de pathologies chroniques (bronchite, arthrose…) et aigües (rhume, grippe…). En commentaire de ces chiffres, la Fondation Abbé Pierre considère que "le mal-logement constitue insidieusement, à bas bruit pour des centaines de milliers de personnes, l’équivalent des scandales de l’amiante ou le saturnisme de demain”.

[Situation où] une personne éprouve dans son logement des difficultés particulières à disposer de la fourniture d’énergie nécessaire à la satisfaction de ses besoins élémentaires en raison de l’inadaptation de ses ressources ou de ses conditions d’habitat.

Définition de la précarité énergétique selon la loi pour l'accès au logement (2014)

Trop de logements sont encore des "passoires thermiques", difficiles à chauffer, avec des conséquences à la fois sur le budget, la santé et l'environnement. Dans le cadre de la loi de transition énergétique passée en 2015, le gouvernement s'est saisi du problème en dévoilant un plan de rénovation thermique couvrant 500 000 logements par an, dans l'espoir de réduire la précarité énergétique de 15% avant 2020 et rénover toutes les "passoires énergétiques" d'ici 2025 . Les moyens budgétaires engagés demeurent cependant "nettement insuffisants" pour la Fondation Abbé Pierre, qui estime que pour atteindre cet engagement, il faudrait multiplier le rythme des rénovations par... dix.

La précarité énergétique : 1 personne sur 5 serait concernée

Au-delà de la définition assez subjective qu'en donne la loi, la précarité énergétique englobe en fait une réalité plus vaste, brossée par la dernière édition de l'Observatoire national de la précarité énergétique (ONPE) qui relève une donnée édifiante. Six millions de ménages, soit près d'un Français sur cinq, consacrent plus de 10% de leurs revenus aux dépenses d'énergie domestique, ou déclarent une sensation de froid dans leur logement.

Le phénomène s'étend au-delà des classes populaires, pour toucher une bonne partie des locataires et des familles monoparentales. Pour chaque hausse de 10% du prix de l'énergie, c'est 500 000 personnes de plus qui peuvent basculer dans la précarité énergétique, selon Bruno Léchevin, président de l'ONPE. Un chiffre inquiétant, à mettre en perspective avec les hausses répétées du tarif réglementé de l'électricité sur ces dernières années.

Pour contrer cette dérive du prix de l'énergie, les Français sont de plus en plus nombreux à faire jouer la concurrence entre les fournisseurs. En vogue depuis le début des années 2000, le concept des achats groupés s'est répandu au secteur de l'énergie, et permet aux consommateurs de profiter de la force du nombre pour négocier de prix plus attractifs. Pour le foyer moyen, les économies s'élèvent à 196€ par an.

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Des aides du gouvernement "pas à la hauteur" de la situation

Avant le plan de rénovation thermique, l'autre pierre angulaire du programme de lutte contre la précarité énergétique, les tarifs sociaux de l'énergie, a été mise en place en 2005. Remises forfaitaires sur la facture annuelle d'électricité et de gaz accordées sur critères de ressources, ces tarifs ont été conçus pour bénéficier à 4 millions de foyers. Mais du fait de lourdeurs administratives, ils ne profitent qu'à environ 3,3 millions d'entre eux encore en 2017, selon un rapport du Sénat.

Au 1er janvier 2018, le gouvernement prépare un remplacement de ce système par un dispositif simplifié, le chèque énergie. Cette aide d'un montant moyen de 150€ sera attribuée de façon totalement automatique, et aura une utilité plus large, puisqu'il permettra de régler n'importe quelle facture d'énergie, voire de contribuer à financer des travaux de rénovation thermique. De quoi résoudre le problème de la précarité énergétique en s'attaquant à ses causes ! Le chèque énergie se présente par ailleurs comme plus équitable que les tarifs sociaux, grâce à une grille de calcul favorisant les ménages les plus précaires (consultable ici).

Pour constituer une réponse adaptée à la situation sociale du pays, le chèque énergie aurait pourtant du être plus ambitieux. En ne le proposant qu'à 3,8 millions de ménages (soit moins en théorie que les tarifs sociaux, pour un budget alloué identique), le gouvernement abandonne à leur sort presque 2 millions de foyers en situation de précarité énergétique. Au total, c'est un bilan en demi-teinte selon la Fondation Abbé Pierre, qui qualifie les avancées de "disparates et partielles".

A l'approche des présidentielles, le débat mérite d'être relancé.

Contribuez au débat sur Twitter Vous voulez faire avancer le débat ? A l'occasion de la publication de son rapport, la Fondation Abbé Pierre a lancé la discussion avec le hashtag #OnAttendQuoi.

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